Le Ramadhan n'est pas encore là que la spéculation sur les fruits et légumes a déjà commencé et que les consommateurs ont déjà des sueurs froides à la vue des prix affichés et la qualité des produits exposés : «Le prix de la pomme de terre a déjà atteint 50 DA le kilogramme et la qualité de la tomate proposée à 35 DA est d'une médiocrité qui dépasse l'entendement», s'effare une mère de famille dont seul le mari travaille. A l'évidence, les Oranais devront, encore une fois, faire face à un Ramadhan brûlant… Dans les différents marchés de fruits et légumes, c'est la consternation des consommateurs devant les prix affichés et la quasi-certitude qu'ils augmenteront durant le mois du jeûne : le poivron, les aubergines et la tomate sont proposés à 70 DA, la pomme de terre et la carotte à 50 DA… «Chaque année, c'est la même chose, s'inquiète-t-on. Les prix doublent ou triplent sans autre raison que la volonté de spéculateurs de tout bord de se remplir les poches à moindres frais. Et cela, avec la complicité active ou passive des autorités chargées de réguler le marché.» Pour les mandataires des halles centrales, ce sont les spéculateurs qui se trouvent à l'origine des différentes hausses des prix : «Par exemple, ils ont déjà commencé le stockage de la pomme de terre [qui se vend entre 28 et 30 DA chez les producteurs] qu'ils ne mettront en vente que lorsqu'elle se raréfiera sur le marché et qu'ils pourront imposer leurs prix.» Depuis plusieurs années, les Algériens vivent une rentrée sociale très perturbée en raison des augmentations souvent aberrantes des prix des produits de large consommation pendant le mois sacré du jeûne, couplées aux dépenses exigées par la rentrée scolaire, alors que leur pouvoir d'achat demeure presque au même point : «Les augmentations de salaires enregistrées par les travailleurs sont sans commune mesure avec la hausse des prix de ces produits», explique un enseignant universitaire. «Lorsqu'un fonctionnaire bénéficie d'une augmentation de 2 000 DA, par exemple, c'est généralement après que le prix de l'huile ou du sucre a triplé ou quadruplé. C'est pour cela que les augmentations de salaire sont d'un effet quasi nul sur le pouvoir d'achat.» Alors que les officiels commencent à rassurer quant à un Ramadhan abordable aux plus démunis, les citoyens se remémorent le précédent où la pomme de terre a atteint les 100 DA le kilogramme et que toutes les mesures prises par les pouvoirs publics n'empêchèrent pas la saignée. L'arrivée annoncée de la nouvelle récolte des régions de Maghnia et Aïn Defla réussira-t-elle à infléchir les prix de la pomme de terre durant le mois de Ramadhan ? C'est la conviction de la section mandataires de l'Union générale des commerçants et artisans algériens (UGCAA) tout en reconnaissant toutefois que de puissants opérateurs vont s'approprier la majeure partie de la récolte pour l'écouler à des prix qu'ils fixeront le moment venu. Autrement dit, en l'absence de puissants outils de contrôle et de régulation, la spéculation a encore de beaux jours devant elle.