La nostalgie et la poésie étaient au rendez-vous dans dimanche dernier, au soir, dans les jardins du Centre culturel français d'Alger (CCF). Au programme de cette soirée d'été ramadhanesque, un hommage à Lili Boniche et aux autres musiciens de sa génération pour le plus grand bonheur des Algériens qui ont grandi aux rythmes de cette culture musicale. Nostalgiques et avides de souvenirs, ils étaient nombreux à répondre à l'appel du music-hall d'Algérie. A peine 21h et toutes les places étaient déjà occupées. Des femmes, des familles, des couples, quelques jeunes assis et debout attendent, tous les regards fixés sur la scène illuminée mais encore vide installée en face de l'entrée. L'équipe d'organisation du CCF s'est vite vue dépassée tant le monde n'a cessé d'affluer alors que les espaces étaient déjà complètement bondés ! Il faudra attendre de mettre de l'ordre et d'installer tout ce monde avant de voir Salah Gaoua, star de la soirée, apparaître sur scène, accompagné de ses musiciens. Un véritable voyage dans le temps, pour une redécouverte de la musique judéo-arabo-berbère célébrant Alger sans retenue dans laquelle il est très facile de se reconnaître tant ses sonorités et ses formes sont bien de chez nous. En revisitant le répertoire de Lili Boniche, Blond Blond, René Pérez, Reinette l'Oranaise, Lili Abassi, El Hasnaoui…, il offre au public un bonheur nostalgique mais tellement savoureux. L'entrée en matière se fera tout en douceur avec un prélude musical en duo entre violon et piano… La voix aérienne et légère du chanteur Salah Gaoua retentira quelques minutes plus tard sur un air bien connu : Ya kalbi kheli el hal yemchi ala halou. C'est les premières notes d'un concert qui transportera les mélomanes des années en arrière avec des standards où se mêlent chaabi et musique andalouse. Mechat alya, welad el gherba, chilet laayali, fat eli fat, adjini, ana el warka el meskina, dour biha y a chibani… autant de titres sur lesquels beaucoup ne pourront pas se retenir de danser à coups de youyous et d'applaudissements pleins d'enthousiasme. Une ambiance tantôt mélancolique soutenue par une interprétation douce et raffinée, tantôt simplement de fête où la derbouka prend le dessus sur le reste. Il y a une année, jour pour jour, le même spectacle avait été donné en ce même endroit. Sauf que, cette année, le public a été plus nombreux… et a affiché un peu plus d'enthousiasme en redécouvrant le répertoire de celui qui a bien marqué la musique populaire algéroise. Celui qu'on appelait «l'Oriental» et qui s'est imposé à partir des années 1940 comme le chantre de la musique arabo-andalouse, de la chanson francarabe, en mêlant tous les genres pour créer son propre style : Lili Boniche, le crooner incontestable de la Casbah, qui s'est éteint il y a plus d'un an… F. B.