«La crise économique et financière est d'une telle gravité qu'il serait dérisoire de penser qu'il ne s'agit que d'une crise conjoncturelle et que tout va recommencer comme avant. On ne pourra sortir de cette crise que s'il y a des changements profonds dans les dispositifs de régulation et de surveillance des acteurs des marchés de la finance. Ces premières évolutions montrent que cette dynamique de reconstruction, de refondation du système financier international semble enfin engagée.» Ce sont là les déclarations de quelqu'un qui sait de quoi il parle et qui ne «bégaye» pas quand il parle de finances internationales. Il s'agit de Daniel Lebègue, ancien directeur général de la Caisse des dépôts et consignations, aujourd'hui à la tête de Transparency International France, organisme qui se consacre à la lutte contre la corruption. Pour lui, le lien entre la crise économique mondiale et les paradis fiscaux est établi. Il ne suffit donc pas de raccommoder les structures économiques des différents pays, mais surtout de refonder le système financier mondial en s'attaquant de front aux bulles spéculatives, à la corruption, à l'évasion fiscale, au blanchiment d'argent… Des masses fiduciaires colossales sont détournées régulièrement du marché financier formel pour s'engloutir dans des avaloirs dont profitent les banques qui veillent au secret bancaire, les marchés informels, les trafiquants de drogue et d'armes et le terrorisme. Pour Christian Chavagneux, rédacteur en chef adjoint d'Alternatives Economiques et rédacteur en chef de la revue L'Economie politique, parlant des paradis fiscaux, «là où ces territoires apparaissaient dans les années 1930 comme de petits confettis destinés à servir quelques individus fortunés, on sait désormais que les centres financiers offshore sont au cœur du fonctionnement de la mondialisation. Et qu'ils sont la source de trois maux : des pertes importantes de recettes fiscales [l'équivalent de 3% du PIB pour la France, 2,5% du PIB en Europe selon la commission], une instabilité financière [ils favorisent les prises de risque opaques], un accroissement des inégalités [ils profitent aux plus riches et aux plus grandes entreprises].» La crise financière enclenchée par la déroute des subprimes n'a-t-elle pas commencé par une forme complexe de spéculation sur les crédits immobiliers et leur transformation bancaire qui ont aiguisé les appétits des banques européennes, asiatiques et australiennes. Lorsque l'édifice s'est écroulé outre- Atlantique, l'effet de domino a été immédiat. La crise a commencé donc par un assèchement brutal de la liquidité bancaire à partir de juillet 2007. La lutte contre le secret bancaire, vise à récupérer une partie de la liquidité gelée dans les paradis fiscaux sans produire de valeur ajoutée. A. G.