Le Ramadhan tire à sa fin. Il se termine en laissant comme du spleen chez de nombreux jeunes. Non qu'ils regrettent le Ramadhan et tous les désagréments et les comportements inciviques qu'il suscite chez les mauvais jeûneurs, mais plutôt pour tout ce qui vient avec ce mois comme ambiance, animation des longues soirées ramadhanesques qui durent jusqu'à l'aube et les opportunités pour se faire un peu d'argent avec tous ces petits métiers occasionnels.Pour l'ambiance, l'animation des soirées s'est déclinée sous différentes formes, dont les kheïmas qui ont constitué au fil des années des endroits courus par les jeunes. Cette année et malgré la réduction de leur nombre, elles ont toujours le vent en poupe. Les quelques-unes «dressées» ont brillé de mille feux, à l'instar de celle de Hyundai ou des hôtels Hilton et Safir Mazafran. Ils étaient des centaines de jeunes à s'y rendre pour de belles veillées animées par des chanteurs du cru. S'asseoir confortablement et se laisser emporter par d'envoûtantes ondes musicales en sirotant son thé et en grillant sa cigarette, ce n'est cependant pas le programme de soirée de tous les jeunes. D'autres attendent ce mois impatiemment pour ce qu'il leur apporte comme occasions de se faire de l'argent. Dès le premier jour du Ramadhan, ils dressent leurs étals ambulants grâce auxquels ils pourront gonfler un tant soit peu le budget familial qui, avec les dépenses qui s'annoncent, fondera certainement comme neige au soleil. Cette deuxième «caste» de jeunes, que le rude quotidien a responsabilisée et rendue débrouillarde, arrive en l'espace d'un mois à se constituer des fournisseurs et une clientèle. On entend souvent dire que la charbat (jus de citron) d'un tel est bon ou qu'on peut trouver de la bonne menthe chez tel autre. Le phénomène est très courant et visible dans les quartiers populaires d'Alger, à l'image de Bab El Oued, un quartier populaire et populeux dans lequel la circulation automobile est devenue quasi impossible durant ce mois sacré. Et pour cause, l'installation de plusieurs étals sur les trottoirs, la chaussée, voire devant les portes des magasins. Cassant tous les prix et usant des meilleurs slogans, ces jeunes chômeurs qui se sont transformés en de redoutables commerçants ont vite fait de comprendre le produit qui intéressera la demande. Les dernières semaines du Ramadhan, leur commerce a ciblé les produits vestimentaires dont la majorité est contrefaite. Evidemment, ils peuvent se diversifier et englober toutes les gammes de produits, laitiers, de beauté, confiseries… Et ça marche. Les gens achètent sans trop se soucier de la qualité à partir du moment où le prix est plus qu'intéressant. Farid, jeune étudiant de 22 ans qui vend sur étal des habits pour femmes, nous dira : «Durant l'année, je n'ai pas de revenu fixe mis à part la maigre bourse d'étudiant. Mais chaque Ramadhan, avec quelques amis, on cotise pour constituer un capital consistant. Nos gains sont importants surtout à l'approche de l'Aïd.» Le cas de Farid est à multiplier par mille pour avoir une idée du nombre de jeunes qui pratiquent ce commerce et une vague idée des pertes qu'enregistre le Trésor. W. S.