Photo : Riad Par Ali Boukhlef La Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'Homme peut-elle désormais siéger comme membre à part entière au niveau du Conseil des droits de l'Homme des Nations unies ? Oui, répond Tayeb Belaïz, garde des Sceaux, ministre de la Justice, qui a présenté hier à l'Assemblée populaire nationale la nouvelle ordonnance qui fixe les nouveaux statuts de la commission. L'opposition, constituée d'une dizaine de députés en exercice du RCD et d'anciens a voté contre l'ordonnance, dénonçant notamment la subordination au pouvoir de la commission que préside Farouk Ksentni. Ils mettent en avant le fait que le président et l'essentiel des membres de la commission soient désignés par décret présidentiel. Le représentant du gouvernement a, au contraire, expliqué que les représentants de la présidence de la République et ceux des deux chambres du Parlement, désignés par le chef de l'Etat, n'auront qu'un rôle d'observateurs et n'auront plus de fonction délibérative. Cela suffit-il à l'indépendance de la commission ? Oui, répondent à l'unisson le gouvernement et l'actuel président de la commission. «La commission est totalement indépendante du pouvoir […] si tel n'était pas le cas, je serai resté chez moi», avait affirmé, le jeudi 24 septembre dernier, Mustapha-Farouk Ksentini lors d'un débat au forum du journal El Moudjahid. La thèse est soutenue par Tayeb Belaïz qui met en avant le fait que le décret adopté hier «exige que la composition de la commission et la désignation des membres soient fondées sur le principe du pluralisme sociologique et institutionnel, et les membres choisis parmi les citoyens aux compétences avérées et de haute moralité et connus pour l'intérêt qu'ils portent à la défense des droits de l'Homme». Cela dans le texte. Mais l'ordonnance, déjà publiée au Journal officiel le 30 août dernier (le texte est signé par le président de la République le 27 août) ne précise ni la qualité des personnalités à choisir ni quelles sont les associations nationales désignées pour faire partie de cette commission. Car, le décret présidentiel n° 09-263 du 27 août 2009 précisant les modalités de nomination des membres de la commission précise, dans son article 2, que les membres de l'instance sont désignés, en plus des représentants des institutions publiques, de «12 à 16 membres, dont la moitié est constituée de femmes, au titre d'associations à caractère national dont l'objet se rapporte aux droits de l'Homme». Jusque-là, rien d'anormal, sauf qu'au chapitre III du même décret, il est indiqué que tous les membres, y compris ceux issus d'associations, seront nommés par… décret présidentiel après «avis d'un comité comprenant le premier président de la Cour suprême, le président du Conseil d'Etat et le président de la Cour des comptes». Plus que cela, le président de la commission est désigné par le président de la République, au même titre d'ailleurs que tous les autres membres dont le nombre total n'est pas connu. «Sous d'autres cieux, ce sont les membres de la société civile activant dans le champ des droits de l'Homme qui proposent les personnes devant représenter leur organisation dans les instances consultatives, et il revient à ces mêmes personnes d'élire librement leur président», réplique le RCD qui a déploré le manque de débat sur la question. «Le renvoi de l'identification de sa composante à un texte réglementaire ultérieur fait fortement craindre le recours aux mêmes clientèles dociles sous couvert de la société civile», a dénoncé, de son côté, le député de Bouira, Ali Brahimi dans un texte distribué à la presse à la fin de la session du Parlement qui a duré moins d'une heure. Il est à rappeler que l'ordonnance présentée hier à l'APN a été prise après que le Conseil des droits de l'Homme de l'ONU eut exigé que la CNCPPDH se conforme à ses statuts. C'est ce qu'a fait le gouvernement algérien. Tayeb Belaïz a précisé que la Commission nationale est maintenant dans le groupe A qui lui permet d'avoir un rôle de membre à part entière. Auparavant, la commission que préside Ksentini était dans le groupe B qui lui donnait juste le rôle d'observateur. Le texte présenté hier par le ministre de la Justice a été adopté par les députés de l'Alliance présidentielle (FLN, RND et MSP). Le RCD et quelques députés indépendants ont voté contre, tandis que les parlementaires du Parti des travailleurs se sont abstenus. A. B. «Aucune condition au retour des prisonniers de Guantanamo» L'Algérie est apparemment prête à recevoir ses ressortissants détenus dans la prison américaine de Guantanamo. Sept d'entre eux vont être extradés la semaine prochaine, selon des informations rapportées, hier, par certains médias nationaux. «Nous n'avons aucune condition à poser à leur retour», a indiqué hier le garde des Sceaux, Tayeb Belaïz, en marge de la session de l'Assemblée populaire nationale consacrée à l'adoption de l'ordonnance relative à la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'Homme. Le ministre de la Justice a répondu à des appréhensions de plusieurs de ces prisonniers, dont une bonne partie détient la double nationalité, quant aux risques de leur transfèrement en Algérie. La semaine dernière, un autre détenu avait été extradé en Algérie. La commission Ksentini est en train de l'auditionner pour connaître les conditions de détention dans cette sinistre prison que veut fermer le président américain avant la fin de l'année en cours.