Photo : Riad De notre correspondant à Annaba Mohamed Rahmani Le complexe sidérurgique ArcelorMittal d'El Hadjar à Annaba n'est pas encore sorti de la zone de perturbation qu'il traverse depuis plus de 8 mois et vraisemblablement avec les dernières rumeurs de compression des effectifs, cette situation peut encore se prolonger. En effet, même après les assurances données par M. Vincent Le Gouic, président-directeur général du complexe, concernant cette compression déguisée, le moral des travailleurs n'est pas pour ainsi dire au beau fixe. Celui-ci avait parlé de départ volontaire et de retraite afin de mettre le site au même niveau que les autres implantés un peu partout à travers le monde. Cette nouvelle politique de gestion visera dans un premier temps les postes dits secondaires et n'ayant pas de relation directe avec la production. Le flou et l'opacité sont savamment entretenus pour maintenir la pression sans pour autant remettre en cause l'accord du 7 juillet 2009 qui avait évacué la question de dégraissage des effectifs pour assurer une augmentation des salaires avec des clauses prévoyant, entre autres, des primes pour certaines catégories et la revalorisation des métiers clés. Or, en l'état actuel des choses, le syndicat et les travailleurs restent vigilants et surveillent de près les actions de l'administration qui, selon nos informations, continue à agir dans la discrétion pour élaborer un nouvel organigramme prévoyant la suppression de certains postes. M. Daniel Atlant, nouveau directeur des ressources humaines (DRH), s'y est attelé depuis sa nomination et compte aller jusqu'au bout pour une véritable refonte de la gestion du personnel et, ainsi, atteindre les standards appliqués sur les autres sites du groupe, affectations du personnel, services, effectifs, production, coûts, etc. Une gestion scientifique comme on aime à le répéter. Cette façon de faire n'est pas du tout du goût du syndicat d'entreprise dont le secrétaire général, M. Kouadria, y voit des manœuvres pour réduire les effectifs tout en augmentant la production avec un personnel qui sera constamment soumis à une pression pour réaliser les objectifs fixés. «Il y a, aujourd'hui, exactement 6 630 travailleurs alors que l'organigramme arrêté avec la direction prévoit 7 200 travailleurs, donc normalement, on devrait recruter pour pourvoir les postes prévus. On ne l'a pas fait et nous comprenons cela vu la conjoncture actuelle où la baisse des commandes a engendré des surcapacités qui ont amené la fermeture de certains sites en Europe et aux Etats-Unis. Nous ne voudrions pas en arriver là et c'est pourquoi nous avions mis en veilleuse la question en attendant une reprise qui s'annonce pour l'année prochaine, la crise financière mondiale est en train de s'estomper et certains pays l'ont déjà dépassée, c'est le retour de la croissance. Toutefois, je peux assurer et rassurer les travailleurs, que tant qu'on sera à la tête de ce syndicat, il n'y aura pas de dégraissage des effectifs, quelle que soit la situation. Nous avons une lourde responsabilité : ce sont des milliers de familles qui vivent du complexe qui est le moteur de l'économie locale.» Concernant la revalorisation des métiers clés, prévue par un des points de l'accord signé entre l'employeur et les représentants des travailleurs intervenu début juillet dernier, le syndicat s'y est attelé depuis bientôt deux semaines pour présenter ses propositions avant janvier 2010, date prévue pour l'entrée en vigueur de l'accord concernant cette catégorie. Rappelons qu'il sera affecté 3% de la masse salariale du complexe à la revalorisation des métiers, somme qui sera injectée dans la formation et l'amélioration des conditions de travail de cette catégorie jugée indispensable pour la production. Le syndicat compte défendre bec et ongles ses thèses pour, nous dit-on, arriver à motiver le travailleur parce que tous les problèmes liés à l'exercice de son métier seront réglés et il n'aura plus à s'inquiéter de tout ce qui est en rapport avec son travail. «Nous comptons réaliser les 1,2 million tonnes prévues pour 2010, nous confie M. Bouraï, président du conseil de participation. Il y va du devenir du complexe et, donc, pour réaliser cet objectif, il nous faut mettre tous les atouts du côté du travailleur. Il est à la base de tout.» Si côté syndicat, direction et travailleurs, les conflits sont d'ordre strictement professionnel et visent à améliorer la situation avec des points de vue divergents et, somme toute, conciliables pour peu que les uns et les autres se comprennent, certains en profitent pour escroquer, voler et détourner. Ainsi, il y quelques jours, ce sont trois camions de gros tonnage qui ont été interceptés par des gardes à l'un des postes de contrôle avec à leur bord des déchets ferreux. Les chargements étaient destinés à la transformation au niveau du complexe ; or, il s'est avéré que sous la couche supérieure desdits chargements, il y avait uniquement de gros rochers qu'on tentait de faire passer comme déchets ferreux pour être facturés et payés par le complexe. Plusieurs agents responsables des contrôles avaient été suspendus de leurs postes ainsi que le directeur par intérim de l'unité FERSID. L'entreprise incriminée, GSW, a déjà trempé dans ce genre d'affaires puisque ses employés avaient été pris sur le fait en rapportant du crassier des déchets rejetés par le complexe et qu'on avait voulu malgré cela lui fourguer. L'affaire avait été portée devant les tribunaux et est encore pendante. Rappelons que ce n'est ni la première ni la dernière affaire au complexe, celui-ci aiguise les appétits de certains qui n'hésitent pas à user de leur influence pour s'enrichir sur le dos des travailleurs. Le complexe n'est pas encore à l'abri de ces bandits en col blanc et il faudra une vigilance de tous les jours pour pouvoir arrêter la saignée.