Photo : S. Zoheir Par Hassan Gherab Tout a été dit sur la situation du livre en Algérie, de l'écriture, de la lecture, de l'édition, de la diffusion et de tout ce qui se rattache, de près ou de loin, au monde livresque. Tous les constats ont été faits, peu reluisants dans l'ensemble, et toutes les voies de réflexion en vue de rendre au livre et à la lecture la place qui leur sied ont été ouvertes. Mais pour ce qui est des résultats, des résolutions et des actions dans la perspective -il serait illusoire de croire que la situation puisse changer du jour au lendemain par la grâce d'une décision ou d'une loi- d'apporter les correctifs et les changements attendus, nib, nib de nib. Certes, on ne peut pas mésestimer les méga-opérations d'édition et de réédition massives de centaines de titres lancées et financées par l'Etat à l'occasion des manifestations «Djazaïr, année de l'Algérie en France» et «Alger, capitale de la culture arabe». Toutefois, ce n'était que des actions conjoncturelles. Elles ont, il est vrai, permis à des éditeurs de mettre un peu de beurre dans leurs épinards et aux bibliothèques d'enrichir leurs fonds livresques, mais n'ont aucunement redonné au livre et à la lecture ou aux métiers du livre le statut qu'ils devraient avoir au sein de la société, de l'école et dans l'économie. Encore et toujours, on lit peu (pour ne pas dire pas du tout), on édite «utile» (commercialement parlant) et on refuse l'entrée de la lecture à l'école algérienne (elle n'a plus sa place dans les programmes). Et pour boucler la boucle, les professionnels du livre se tirent dans les pattes, lapident le ministère de la Culture ainsi que tout ce qui en émane, sans trop se soucier de ce pour quoi ils sont censés travailler. N'est-on pas allé jusqu'à appeler au boycott du 14ème Salon international du livre d'Alger (SILA) pour une futile histoire de délocalisation et de restructuration du cadre d'organisation du salon, qui, en fait, est la véritable raison de la levée de boucliers. Pendant ce temps, le livre attend toujours qu'on s'occupe de lui. Comment ? En lui redonnant tout simplement sa place à l'école. Car, quand les parents, qui sont la première école, ont failli et n'ont pas inculqué à leurs enfants l'amour de la lecture, ce qui est le cas aujourd'hui en Algérie, c'est à l'école qu'il revient de prendre le relais et de pallier la défaillance. La première décision que l'Etat devra prendre est donc celle de rendre la lecture «obligatoire», et ce, en l'intégrant dans les programmes scolaires. Il appartiendra alors à l'enseignant de faire preuve de pédagogie pour éveiller l'intérêt de ses élèves et leur faire découvrir la magie des mots et la beauté d'un texte, qui leur donneront envie de lire d'autres livres que ceux inscrits à leur programme. Dès lors, la dynamique est enclenchée. Le reste ne sera que détail. Car, à l'ère des bibliothèques virtuelles, le problème des prix des livres et de leur disponibilité ne concernera essentiellement que les enfants qui n'ont pas les moyens de se payer un micro-ordinateur et la connexion à Internet. Professionnels du livre et pouvoirs publics auront ainsi le temps de trouver les solutions idoines pour remettre le livre sur son trône.