De notre correspondant à Tizi Ouzou Malik Boumati Tizi Ouzou vit ces derniers mois au rythme des routes fermées et des pneus enflammés dans des actions de protestation qui touchent les quartiers et les villages l'un après l'autre. Mais ces actions se sont dangereusement (curieusement pour certains) intensifiées ces dernières semaines au point où l'on enregistre des expressions de colère quasi-quotidiennement. Dans les discussions populaires, d'aucuns affirment que les autorités de wilaya et de daïra encouragent indirectement ce genre d'actions, dans la mesure où l'action de protestation violente est souvent suivie de solution rapide que les pouvoirs publics apportent avec une célérité déconcertante. Et les citoyens ne comprennent pas pourquoi les responsables de l'Etat attendent que des actions violentes soient menées dans les rues pour qu'ils daignent apporter des solutions à leurs problèmes. Le plus grave dans cette situation, c'est que depuis quelques semaines, les actions violentes deviennent récurrentes dans plusieurs quartiers de la ville. Des habitants de quartiers vont même jusqu'à imiter d'autres quartiers dont les actions ont apporté des réponses concrètes à leurs doléances. Dans certains cas, les revendications ne méritent même pas des actions aussi violentes tellement elles paraissent à la limite de la futilité. C'est surtout pour tout cela que les citoyens ne comprennent pas l'immobilisme des autorités de daïra, de wilaya et même parfois de la commune qu'ils accusent de pousser les citoyens à la révolte pour des desseins inavoués. Récemment, le wali de Tizi Ouzou dans une déclaration improvisée devant des confrères de la presse, au lendemain de l'action de protestation menée par les habitants de la cité Eucalyptus qui réclamaient leurs indemnités suite à l'attentat terroriste qui a ciblé, une année auparavant, le siège des Renseignements généraux de Tizi Ouzou, a suggéré une manipulation qui concernerait toutes ou certaines de ces actions de protestation, et ce, sans donner plus de détails qui puissent éclairer l'opinion publique sur notamment l'identité des auteurs de ces manipulations et leurs objectifs. Il précisera seulement la coïncidence, dans certains cas, entre la signature de l'ordre de service (ODS) et l'éclatement de «l'émeute» pour des revendications liées directement par ce même ODS. Un conflit d'intérêt ? Par ses déclarations, le wali de Tizi Ouzou a laissé les citoyens sur leur faim. Surtout que pour la population de la région les revendications exprimées lors des actions de fermeture de routes paraissent toutes aussi réelles que légitimes, pour la simple raison que ce sont des doléances tout aussi réelles que légitimes. De l'installation de ralentisseurs sur des routes meurtrières, (l'image de feu Ammi Ahmed étalé dans une mare de sang sur la route du nouveau lycée est toujours dans lesmémoires) au revêtement de chaussées délabrées, en passant par les nombreuses promesses non tenues relatives au logement, à l'installation d'avaloirs, aux décharges sauvages et à l'éclairage public, tout est devenu bon pour enflammer les pneus et fermer les routes à la circulation. C'est de cette façon qu'ils daignent se déplacer et s'enquérir de nos problèmes, dit la majorité des citoyens impliquée dans ce genre d'actions. Et il ne faut surtout pas se précipiter en dénonçant «de jeunes désœuvrés qui s'adonnent à des actes de vandalisme» pour la simple raison que dans la plupart des cas, ce sont des pères de famille et des gens respectables qui se révoltent contre l'immobilisme des pouvoirs publics et les promesses non tenues. Pour l'instant, en ce qui concerne les soupçons du wali quant à d'éventuelles manipulations autour de ces actions, cela reste une interrogation, y compris dans les esprits des gens des quartiers en colère. Et ce n'est pas le silence curieux des responsables de l'APW qui va élucider ces interrogations.