Photo : Riad Par Amar Rafa après une immersion qui aura duré plus d'une année, Abdallah Djaballah, leader islamiste et fondateur d'Ennahda et El Islah, refait surface en rendant publique son intention de créer un autre cadre partisan. Lors d'une conférence de presse tenue hier au siège national du parti, Djaballah a précisé que la décision a été prise au sein du conseil consultatif (madjlis echoura), samedi dernier à Alger, d'élargir la consultation aux militants et cadres du parti au sujet de l'appellation et de la nature (s'agissant de l'ouverture à d'autres sensibilités) de ce nouveau cadre. Aussi, rendez-vous est donné à la fin du mois de décembre prochain pour trancher définitivement la question. La décision de refondation du parti El Islah, telle qu'annoncée, repose sur les structures déjà existantes, dont le conseil consultatif, et les bureaux de wilayas, encore fidèle au «cheikh», affirmant d'ailleurs, sur un ton de défi, que «l'organisme qui existe toujours et que personne ne peut annihiler», Djaballah, veut certainement rappeler la mésaventure, qu'il a désigné par «agression inédite contre la loi et la Constitution», en allusion à l'imbroglio politico-judiciaire par lequel un groupe de dissidents ont pris possession du sigle du parti. Si lui et ses fidèles se tournent vers une démarche strictement partisane, c'est surtout, faut-il le souligner, suite à l'échec consommé de la tentative de réunification des rangs d'Ennahda «historique» qui rassemble les militants de l'actuel mouvement, ceux des deux ailes d'El Islah, dont certains ont abandonné l'activité politique, et de tout le courant islamiste, en ce sens que la priorité sera donnée aux ceux qui croient aux principes de «modération et de juste milieu». Djaballah a affirmé que les efforts qui ont été fournis avec Ennahda ont abouti à trois accords portant sur un accord politique et idéologique, les statuts et les questions organiques ayant trait à l'organisation du congrès rassembleur. «L'espoir demeure encore permis de trouver un cadre de coordination avec tous ceux qui croient au changement», a indiqué Djaballah en dépit du fait que cet accord a été dénoncé par l'autre partie, concernant surtout le volet inhérent aux statuts. Croyant dur comme fer à l'inéluctabilité d'un changement, le leader islamiste estime qu'il n'est pas du seul ressort d'un parti, voire du courant islamiste, mais la responsabilité en incombe à tous ceux qui y croient, indépendamment de leurs orientations politiques. Il a indiqué que la démarche de rassemblement des rangs qui devait passer par trois étapes, dont celle qui a consisté à rassembler les militants d'Ennahda «historique», et dont les efforts ont abouti à un accord sur les statuts de l'ex-futur cadre commun, qui a été remis en cause, mais pour le leader islamiste, rien n'est encore perdu. Pour lui, cette démarche, en panne actuellement, pourrait connaître une relance à l'avenir, car pour lui, la question dépasse le seul cadre d'un retour de sa personne, mais d'une réunification des rangs sous une autre dénomination, comme il l'a souligné en insistant sur le rejet sur l'autre partie l'échec de cette démarche fédératrice. Tout en éludant les divergences qui ont été à l'origine de cette mésentente, Djaballah n'en démentira pas moins que la question des prérogatives était la pierre d'achoppement des commissions paritaires mises en place autour des trois projets de texte devant sceller le pacte avec le mouvement de Fateh Rebiai. Ce n'est qu'après insistance qu'il révélera que «le document portant les statuts, que nous avons accepté, a été rejeté par l'autre partie, qui nous a demandé de reprendre [celui d'Ennahda] sans changement». Et de poursuivre : «Contrairement à un consensus entre les deux parties de la rencontre des deux directions avec les membres des deux commissions, il y a eu volte-face des autres». Il devait également rejeter les allégations selon lesquelles il aurait aspiré à prendre la direction du parti, tout en se défendant d'être «un militant de dernière heure, à l'affut d'intérêts immédiats ou un militant temporaire». «Je suis militant depuis mon jeune âge», s'est-il écrié. Aussi, s'agissant d'un éventuel refus d'agrément de son nouveau parti, Abdallah Djaballah a estimé qu'à la différence des partis qui servent d'outil électoral, sa conception du parti est qu'il doit servir d'outil de militantisme. Le parti qu'il veut lancer existe «en tant que projet, option de changement et militants et ne lui manque qu'une dénomination», a-t-il dit, estimant que «la fermeture politique actuelle est appelée à disparaître un jour».