De notre correspondant à Béjaïa Kamel Amghar Les jeunes, notamment les chômeurs et ceux issus de milieux défavorisés, ont-ils aujourd'hui les moyens de voyager pour découvrir les innombrables richesses touristiques et culturelles de leur pays natal ? Les structures mises en place dans cette optique par les pouvoirs publics sont-elles bien exploitées ? A-t-on sérieusement réfléchi à créer des réseaux d'échanges et à élaborer des programmes conséquents pour permettre aux jeunes algériens de se rencontrer et de nouer des relations fraternelles ? La réponse à toutes ces questions n'est pas aisée. Il est vrai que l'Etat, à défaut de ressources financières suffisantes, n'avait pas beaucoup investi dans ce chapitre pendant des décennies. Toutefois, les infrastructures existantes, souvent mal gérées, n'ont pas joué pleinement leur rôle dans ce sens. A ce jour, dans le subconscient populaire, le tourisme est toujours synonyme de réussite sociale. Il est presque l'apanage exclusif des nantis. Au cours de cette dernière décennie, d'importantes enveloppes ont été, cependant, affectées à la réalisation de nouveaux établissements de ce genre. Auberges et maisons de jeunes, terrains de proximité et bibliothèques sont réceptionnés dans la quasi-majorité des communes du pays. Des équipements similaires sont en chantier ou inscrits dans les municipalités qui n'en sont pas encore pourvues. Seulement, la gestion de ces espaces sociaux laisse partout à désirer. La wilaya de Béjaïa, à titre d'exemple, dispose d'un dense réseau de maisons et d'auberges supposées destinées aux jeunes, mais ces derniers n'en tirent presque aucun avantage. Les administrateurs de ces établissements, n'obéissant à aucun critère de performance, se limitent souvent à l'entretien périodique des bâtiments et au «remplissage» de la paperasserie quotidienne. Loin de polariser l'attention des jeunes pour créer l'indispensable dynamique à ce genre d'activité, la bureaucratie titulaire de ces lieux se confine dans le service minimum. Des auberges comme celle de Tichy ou celle des frères Soumari (Béjaïa) se prêtent, pourtant, très bien à la réception des jeunes gens qui viendraient des autres régions du pays. Chambres, dortoirs collectifs, cuisines, foyer, salle de jeu, club Internet, terrain de sport, elles offrent tous les services et les attractions recherchés par les masses juvéniles à des prix étudiés. Des annexes comme celles de Darguina, Souk El Thenine, Aokas, Melbou ou Ouzellaguen, pour ne citer que celles-là, sont également bien dotées, mais tout aussi inexploitées. Un semblant d'activité est annuellement enregistré durant la saison estivale où l'on reçoit quelques groupes pour de courts séjours au bord de la mer. Sinon, c'est le désert. Il est absolument nécessaire de rendre toutes ces structures à leur vocation première : celle qui consiste à rassembler les jeunes, à les encadrer pour prendre des initiatives culturelles, sportives et touristiques. Pour cela, il faut garder constamment les portes grandes ouvertes et rester régulièrement à l'écoute des pulsions de cette jeunesse volontaire qui aime tant vivre, s'amuser et faire des choses agréables. Des programmes d'échange et de partenariat avec d'autres établissements similaires sont essentiels pour organiser régulièrement des excursions et des visites mutuelles entre les différentes wilayas du pays. Les auberges et les maisons des jeunes de Béjaïa, pour reprendre encore le même exemple, doivent absolument collaborer étroitement avec leurs homologues à Ghardaïa, Ouargla, Biskra ou Oran pour assumer pleinement la vocation qui est la leur. Sans cela, il ne sert à rien d'en construire davantage. Afin d'imposer cette collaboration mutuellement bénéfique, la tutelle devra exiger des résultats et des bilans satisfaisants des gens qui en ont la charge. Les jeunes, on l'aura remarqué, ne demandent que ça.