Trente ans après le début de l'épidémie du VIH sida, la prévention reste de mise. Car l'épidémie va vite et inquiète de plus en plus. Les experts et notamment le président du Comité national de lutte contre les maladies sexuellement transmissibles et sida (CNLIST-SIDA), M. Abdelwahab Dif, insistent sur l'importance du dépistage précoce car beaucoup de personnes peuvent être infectées par le virus sans le savoir. Encourager le dépistage volontaire est donc le plaidoyer des différents experts et associations de par le monde. Selon le docteur Oulmane, président de l'association Primage, «notre pays a beaucoup investi dans le domaine du dépistage avec la mise en place de 60 centres de dépistage volontaire (gratuit et anonyme)». D'autre part, affirme notre interlocuteur, l'Etat algérien assure la prise en charge gratuite des personnes vivant avec le virus du sida (soit près de 400 000 DA par malade et par an). «Toutefois, la prise en charge médicale ne suffit pas», dit-il, expliquant que les malades ont aussi besoin d'un soutien social, d'aide de l'Etat, de la société civile et des associations. Le docteur Oulmane estime en effet que les malades ont des difficultés à trouver du travail et à se faire accepter par la société, voire par leur propre famille». Ainsi, bien que des efforts aient été déployés en matière d'accès aux soins, l'accès aux droits sociaux demeure insuffisant. Il y a lieu de rappeler par ailleurs qu'il est possible désormais de prendre un médicament dans les 24 heures si on pense avoir été exposé au sida. L'Organisation mondiale de la santé (OMS) recommande de donner plus tôt des traitements antirétroviraux aux personnes séropositives, avant même l'apparition de symptômes de maladie. L'organisation onusienne demande aux mères séropositives de prendre des antirétroviraux pendant la grossesse et durant toute la période d'allaitement afin d'éviter la transmission du VIH. «Plusieurs essais cliniques ont démontré l'efficacité des antirétroviraux pour la prévention de la transmission pendant l'allaitement», note l'OMS qui préconise désormais de commencer le traitement dès la 14ème semaine de grossesse et jusqu'à la fin de la période de l'allaitement. A propos de la maladie «Le sida est une maladie causée par un virus appelé VIH qui envahit le corps et détruit les globules blancs, les défenses de l'organisme. Cet organisme contaminé ne peut plus se défendre et son état de santé se détériore peu à peu pour aboutir à la mort. C'est ce qui fait la dangerosité de ce virus», explique le docteur Oulmane. Ainsi, dit-il, «quand une personne est contaminée par le virus du sida, il n'y a, au début, aucun signe qui laisse apparaître qu'on est malade. Une certaine période (jusqu'à plusieurs années) peut donc s'écouler sans que la personne infectée se doute que le virus est présent dans son corps». Cette personne infectée qui paraît en bonne santé (c'est ce que l'on appelle un séropositif) peut donc contaminer d'autres personnes sans s'en rendre compte. Seul un dépistage (analyse du sang) peut prouver la présence du virus dans le sang. Le virus utilise 3 voies pour pénétrer notre organisme : 1 - La voie sexuelle : c'est de loin la voie la plus fréquente à cause des rapports non protégés 2 - La voie sanguine : elle est très rare et est le produit d'une imprudence pendant la manipulation de matériel touchant le sang. Lames de rasoir, aiguilles, ciseaux, outils de piercing et autres instruments piquants ou coupants peuvent transmettre le virus en cas de leur utilisation par plusieurs personnes… 3 – La voie sanguine ou lactée de la mère à l'enfant : une femme enceinte contaminée peut transmettre le virus du sida à son fœtus par l'intermédiaire de la circulation sanguine commune et durant l'accouchement. Le lait maternel d'une femme contaminée peut aussi transmettre le virus au nourrisson. Cela pose un nouveau problème : celui des enfants qui naissent séropositifs et dont le nombre augmente de plus en plus. Traitement et vaccins Malgré les progrès réalisés par la recherche, il n'y a, à ce jour, pas de traitement qui guérisse définitivement cette maladie. Les médicaments actuels permettent seulement aux malades de gagner quelques années de vie supplémentaires. Mais l'espoir est permis. Il faut signaler le vaccin qui vient d'être produit par des chercheurs américains et thaïlandais et dont les essais annoncés en septembre dernier ont montré que «dans 1/3 des cas, le vaccin réduit le risque d'infection». «Ce résultat représente une avancée scientifique très importante car cela nous donne de l'espoir qu'un vaccin efficace dans le monde entier pourra être possible à l'avenir». Ce vaccin a été testé dans deux provinces thaïlandaises sur des volontaires dont l'exposition au risque de contamination était jugée similaire à la moyenne. Concernant la lutte contre le sida en Algérie, le docteur Oulmane dira qu'elle est coordonnée par un Comité national de lutte contre le sida intersectoriel. Il comprend une vingtaine de secteurs (santé, éducation nationale, enseignement supérieur, jeunesse, défense nationale, communication, tourisme, transport, etc.). Dans ce cadre, il note aussi le travail des associations issues des quatre coins du pays qui collaborent étroitement avec ce comité, notamment solidarité-Aids pour Alger, Anis pour Annaba, Sid El Houari pour Oran. Faire reculer le sida Il faut dire que, parallèlement à la prise en charge des malades, la prévention reste, pour le moment, le meilleur moyen de se protéger contre le sida. 1 - Pour éviter la voie de transmission sexuelle : l'abstinence, la fidélité, l'utilisation du préservatif sont les comportements préventifs les plus sûrs. 2 -Pour éviter la voie de transmission sanguine : Restez méfiants lors de l'utilisation d'objets ou d'instruments pouvant entrer en contact avec le sang (lame de rasoir, aiguille, brosse à dents…) Respectez les règles d'hygiène et de stérilisation lors de certains gestes qui percent, incisent ou coupent la peau (tatouage, percement d'oreille, circoncision…) S'agissant de la transmission par la voie sanguine, les structures de santé et les personnels de santé ne doivent pas relâcher leur vigilance. Les gestionnaires sont invités à renforcer les moyens de prévention sur les lieux de travail : matériel de stérilisation, gants, eau de Javel… 3 – Pour protéger l'enfant à naître : encourager les femmes enceintes à faire un dépistage (car la prise en charge précoce permet à l'enfant qui naît de s'en sortir dans 90% des cas). Le docteur Oulmane estime enfin que «la communication sociale doit être renforcée pour toucher de plus en plus de citoyens, en particulier les personnes à risques». A. B.