De notre envoyé spécial à Istanbul Smaïl Boughazi La Turquie est décidée à se positionner sur le devant de la scène économique internationale. Une rencontre de haut niveau a été organisée à cet effet par Tukson (la confédération des hommes d'affaires et des industriels turcs) -un organisme qui regoupe les industriels turcs- du 13 au 16 du mois en cours. L'objectif de cet événement, soutiennent nos interlocuteurs, est de nouer des contacts avec les pays africains et de promouvoir les échanges commerciaux entre les deux parties. Lors de cet événement, pas moins de 45 pays africains ont tenu à répondre favorablement à l'invitation turque. Les échanges entre l'Afrique et la Turquie en constante augmentation Le ministre turc du Commerce extérieur, M. Kursat Tuamsu, lors de l'ouverture du forum, a mis en exergue, devant un parterre d'invités de marque, composé de ministres et de délégations africaines, les avancées remarquables de l'économie turque mais aussi tout ce qui concerne les échanges commerciaux entre ce pays et le continent africain. Estimé, pour cette année, à plus de 20 milliards de dollars, le taux des échanges entre les deux parties ne dépassait pas les 5,5 milliards de dollars, en 2003. Selon le ministre, le volume des échanges commerciaux de la Turquie a atteint 300 milliards de dollars toutes catégories confondues, et ce chiffre continuera à augmenter pour atteindre 320 milliards de dollars cette année. Au cours de la séance d'ouverture, les pays participants ont signé, également, la déclaration d'Istanbul suivie de la signature, entre chaque pays (les chambres de commerce et d'industrie participantes) et Tuskon, des agréments de coopération mutuelle. Echanges commerciaux : faiblesse des échanges entre l'Algérie et la Turquie Le président de Tukson, au sujet des échanges commerciaux avec l'Algérie, s'est contenté, en marge de la rencontre, de dire que la Turquie veut aller loin avec l'Algérie dans les différents secteurs d'activité et de nuancer sa réponse quant à une question sur la faiblesse des échanges entre les deux pays, en disant que «l'Algerie traîne le pas». Sur le même sujet, notre interlocuteur a estimé que la présence turque en Algérie est perçue dans les domaines de l'emballage, du bâtiment, de l'électroménager, de l'ameublement et du textile. Quant aux importations de la Turquie, elles sont essentiellement des matières premières, particulièrement le gaz liquéfie. Ce qui est, aux yeux de notre locuteur, «faible». D'ailleurs, interrogé sur le taux des échanges entre les deux pays, il a dit que les chiffres ne sont pas disponibles. Précisons au passage qu'une délégation d'hommes d'affaires algériens a été invitée pour la prospection du marché turc et les opportunités existantes. Tukson table sur 3 milliards de dollars durant le forum Au sujet de la rencontre, troisième du genre depuis 2006, et qui regroupe quelque 950 hommes d'affaires du côté africain et 2 500 autres turcs, celle-ci est considérée par les différents responsables turcs comme étant une occasion favorable pour asseoir les bases d'une coopération étroite entre le continent et la Turquie. L'organisation initiatrice de cette rencontre dit avoir regroupé quelque 150 compagnies et 12 000 participants. Elle prévoit, à l'issue de la rencontre, engranger 3 milliards de dollars à la faveur des accords signés et les entretiens évalués à quelque 40 000 entretiens entre les deux parties. L'économie turque, la sixième en Europe Par ailleurs, le ministre de l'Economie, lors de la rencontre avec les participants, a préféré évoquer la situation économique de la Turquie. Une situation qu'il estime favorable aux investissements. Il fait savoir aussi, s'agissant des performances de son pays, qu'elle est la sixième puissance en Europe, la deuxième en matière de démographie, et prévoit que la Turquie sera la 16e puissance économique dans le monde. Même si, pour lui, des défis attendent le pays, notamment le chômage, la question de l'énergie et l'inflation, les chiffres qu'il a fournis lors de la rencontre ont été pour lui des indicateurs de la bonne volonté du gouvernement. 117 milliards de dollars d'exportations, en 2007, avance le ministre, ne peuvent être que le signe d'une évolution et le fruit des réformes entamées depuis quelques années, même si, sur un autre registre, il n'a pas manqué de relever ce qui attend le pays pour résoudre la crise du chômage qui a atteint des proportions inquiétantes, mais aussi de lutter contre la non-déclaration des travailleurs qui touche environ 10 millions de Turcs. Les privatisations : une politique irréversible Au sujet des privatisations, le ministre de l'Economie a estimé que le gouvernement «continuera à opter pour les privatisations même si le climat international n'est pas favorable». Il a, à ce titre, dit que tous les secteurs ont été touchés par cette vague de privatisations et il ne reste que les ports qui ne sont pas concernés. Cette politique, pour le ministre, a dévoilé ses résultats en une durée courte, augmentant le PIB en six ans de 37 milliards de dollars. Dans le constat qu'il a dressé, il a parlé aussi de réformes du système de la Sécurité sociale ce qui permettra au Trésor d'économiser des sommes importantes. L'autre défi auquel le pays des Ottomans doit faire face a trait aux ressources énergetique. 70 % des importations du pays sont des produits énergétiques. Par voie de conséquence, le ministre a estimé que la construction de centrales nucléaires, l'option pour l'énergie géothermale et éolienne pourraient réduire la facture de l'énergie. Un sommet Turquie-Afrique prévu au mois d'août prochain Pour sa part, le ministre turc des Affaires étrangères a fait valoir les projets qui sont en voie de concrétisation. Devant les invités africains et la presse internationale, il a annoncé que la Turquie organisera un sommet Turquie-Afrique au mois d'août prochain. «Nous avons envoyé les invitations aux chefs d'Etat africains, afin qu'ils participent à cet événement», a-t-il déclaré. L'objectif recherché est de promouvoir la coopération entre les deux parties et de permettre la consolidation des liens qui les lient. Outre cette annonce, la Turquie, par ailleurs, ambitionne d'ouvrir 15 ambassades en Afrique, ce qui lui permettra d'augmenter le nombre des représentations diplomatiques de 7 à 22 ambassades. Le ministre n'en restera pas là, puisque, au sujet des aides accordées aux pays pauvres du continent, la Turquie leur consentira une enveloppe évaluée à 50 millions de dollars ajoutée à l'aide déjà accordée et estimée à 12 millions de dollars. Un salon et des visites Tukson a parallèlement organisé une foire exclusivement pour les hommes d'affaires africains et turcs, environ 40 000 participants. Cette organisation a mis les gros moyens pour la réussite de l'événement. Ils étaient, en fait, nombreux les industriels turcs qui ont occupé des stands spacieux pour exposer leur production. Une production qui se concentre dans les textiles, les équipements industriels et d'autres industries manufacturières. Le point crucial à relever, pour nous Algériens, était l'absence remarquée de nos hommes d'affaires. Ceux-ci, pour des raisons inconnues, n'ont pas donné signe de vie. Le président turc, Abdullah Gul, s'est déplacé, lui aussi, au deuxième jour de la foire et a eu des discussions avec les hommes d'affaires en présence de la presse turque, laquelle a accordé une importance capitale à cet événement. Cela était visible dans les différents titres de la presse locale.