L'état de Aminatou Haidar est critique. A son 27e jour de grève de la faim, la militante sahraouie est au seuil du supportable. Le gouvernement espagnol se mord les doigts et regrette d'avoir accepté sa compromission avec le palais royal marocain. Au cas où le pire arrivait à Mme Haidar, l'Espagne serait accusée avec le Maroc de non-assistance à personne en danger de mort. La position inconfortable de Madrid est manifeste à travers les accusations lancées hier à l'encontre des services de police espagnols qui renvoient la balle au gouvernement. Deux syndicats policiers, le CEP et le SPP, ont dénoncé dans un communiqué «l'hypocrisie politique» du gouvernement qui cherche à «éluder sa responsabilité» et à «imputer à la police l'origine du conflit international entraîné par l'entrée en Espagne d'Aminatou Haidar». Le chef du gouvernement José Luis Rodriguez Zapatero avait indiqué vendredi dernier à Bruxelles que la décision d'autoriser Mme Haidar à entrer sur le sol espagnol avait été prise par «les autorités administratives» et non par une «autorité politique». Les deux syndicats affirment au contraire que «le gouvernement a empêché le retour de Mme Haidar au Maroc le jour de son arrivée» en Espagne. Le gouvernement a toujours affirmé que Mme Haidar ne pouvait reprendre un vol vers Layoune car elle ne possédait pas de passeport, mais les syndicats policiers affirment eux que «cela aurait été possible avec un sauf-conduit». Pour sa part, le Maroc poursuit sa politique de fuite en avant et cherche ainsi des responsables d'une crise politique avec l'Espagne en accusant vendredi dernier le Front Polisario de manipuler Aminatou Haidar, compromettant ainsi les pourparlers sur l'avenir du Sahara occidental. «Nous ne pouvons pas répondre à un chantage», a déclaré M. Fassi-Fihri, suggérant que la grève de la faim de Mme Haidar, ainsi que le cas des sept activistes sahraouis des droits de l'Homme arrêtés en octobre dernier à leur descente d'avion à Casablanca, étaient orchestrés pour faire dérailler la reprise des pourparlers sur l'avenir du territoire. «Le Maroc regrette que le second tour informel des négociations ait été reporté (...) à cause de certaines manœuvres de l'Algérie et du Polisario qui refusent d'aller vers cette solution politique et préfèrent le statu quo», a dit M. Fassi-Fihri. Les contradictions du Palais royal contenues dans les discours des responsables marocains sont si flagrantes que le ministre des Affaires étrangères de Rabat reconnaît de facto qu'il existe un conflit et qu'il y a lieu de négocier avec le Polisario sur «l'avenir du territoire», accusant en même temps le Polisario de manipulation et de blocage d'un processus que le Maroc utilise pour gagner du temps. Si le Sahara occidental était marocain, pourquoi le Maroc a-t-il accepté la mission onusienne sur son territoire ? Si le Sahara occidental était marocain, pourquoi Rabat voudrait-il négocier avec une organisation à la solde d'Alger ? Le Maroc connaît les réponses et c'est pourquoi il est dans le désarroi. Il refuse aussi d'accepter l'organisation d'un référendum d'autodétermination parce qu'il devine le résultat des urnes malgré la forte communauté marocaine implantée de force dans les territoires du Sahara occidental. Aminatou Haidar risque de mourir parce qu'elle a été empêchée par l'occupant de rejoindre sa terre natale, son pays, sa patrie. Le Maroc et l'Espagne sont responsables à part égale des conséquences de leurs décisions et de leurs agissements. A. G.
