Décidément, plus rien ne peut rassurer les Algériens au sujet de la menace que fait peser sur leur santé la pandémie de la grippe A. Après la vague de décès qui a ponctué leur quotidien ces dernières semaines, les Algériens assistent désormais ébahis à la rupture de stock qui touche le gel désinfectant hydro-alcoolisé et les bavettes médicales. Dans les pharmacies, ces deux produits se font réellement rares à l'heure même où la pandémie gagne l'ensemble du territoire national et dans des proportions plus qu'alarmantes. Pourtant, Saïd Barkat, le ministre de la Santé, n'a eu de cesse de rassurer l'opinion publique sur la volonté et l'engagement des pouvoirs publics à veiller sur la disponibilité de ces moyens de protection. A chaque fois, des promesses sont faites aux Algériens et des chiffres sont communiqués, mais sans que cela ne soit suivi d'actions concrètes sur le terrain. «Le gouvernement fera ceci… il ramènera cela», telle est le refrain avec lequel le ministère de la Santé tente de réconforter des citoyens, terrifiés par les ravages du virus H1N1. Mais entre ces promesses et la réalité, un gouffre immense les oppose car il est bel et bien apparent que les Algériens sont livrés à eux-mêmes face à la grippe A. Et pour cause, sans gel désinfectant et bavettes médicales, aucune protection contre cette maladie n'est garantie. «Ce n'est pas normal ! Le ministère devait nous approvisionner en bavettes, mais jusqu'à l'heure nous sommes obligés de nous débrouiller seuls. Les grossistes nous demandent à chaque fois de patienter car les producteurs locaux n'arrivent pas à répondre à la demande. Alors que, au quotidien, nous faisons face à des citoyens inquiets et nous comprenons leur désarroi. La moindre des choses en matière de prévention contre cette maladie est que ces bavettes soient disponibles dans tout le pays», s'emporte un pharmacien d'Alger, qui nous a confié, hier, que depuis une semaine une pénurie de bavettes touche de plein fouet toutes les officines de la capitale. «C'est la première que cela nous arrive. Le problème, c'est que ce n'est pas le moment. Dans les écoles, tous les élèves doivent être munis de ces bavettes. Faute de quoi, le virus se répandra plus dangereusement», avertit-il. Le même constat est à dresser pour le gel désinfectant, également introuvable. «Nous sommes en rupture de stock depuis trois ou quatre jours. Les grossistes nous disent que ces produits tarderont à venir car la très forte demande a épuisé toutes les quantités disponibles jusque-là sur le marché», explique la gérante d'une pharmacie située à la place du 1er Mai, qui ne cache pas aussi son inquiétude. «On nous livre seulement 50 à 80 flocons par semaine, qui sont arrachés par les clients en quelques heures. Parfois, des citoyens veulent acheter 3 à 4 flacons pour se mettre à l'abri contre les pénuries. Toutefois, nous nous interdisons de vendre de grosses quantités au public. Nous voulons que tout le monde puisse se procurer ce gel en cette période de crise», affirme notre interlocutrice. De leur côté, les citoyens sont en proie à une véritable psychose. «Cela fait deux jours que je recherche désespérément des gels et des masques. J'ai fait le tour des pharmacies d'Alger et aucun de ces produits n'est disponible !», s'indigne une mère de famille, au visage tuméfié par la peur, que nous avons croisée à Alger. Comme elle, de nombreux parents qui attendent devant les écoles la sortie de leurs enfants, nous ont fait part de leur colère quant à cette pénurie qui met la santé de leurs enfants en péril. Par ailleurs, il est à souligner qu'une spéculation malhonnête s'opère sur le dos des citoyens dans le commerce de ces produits. «Le gel désinfectant ne contient que de l'alcool, de l'eau et un colorant. Son prix ne saurait dépasser les 100 DA. Mais les grossistes des médicaments profitent de la psychose ambiante pour augmenter leurs marges bénéficiaires. C'est ce qui explique qu'un flacon de 200 ml revient à plus de 160 DA ! C'est vraiment malhonnête», révèle un pharmacien chevronné, qui se demande au passage qu'attend le ministère de la Santé pour sévir contre ces exploitants de la détresse humaine. Assurément, la tutelle est encore aux abonnés absents. A. S.