La réduction des surfaces agricoles de la Mitidja et même si nous n'avons pas pu en avoir les chiffres peut être vérifiée auprès des professionnels du secteur de l'agriculture. Une virée la semaine dernière à Blida nous a permis de recueillir des impressions des agriculteurs qui nous ont confirmé que le béton continue à leur arracher encore plusieurs hectares de leurs terres irriguées à leur sueur au quotidien. De Boufarik à Soumaa pour ne citer que ces régions-là, des habitations collectives ou individuelles, des édifices publics… poussent partout, sur d'anciens terrains agricoles ayant fait dans le temps la fierté de la wilaya comme tant d'autres encore constituant la Mitidja à savoir Tipasa, Boumerdès, Alger, Aïn Defla et Médéa. Les nombreux citoyens que nous avons interrogés, surtout les plus âgés, nous ont confirmé que des surfaces entières sont inondées de béton armé. Nous continuons notre périple quand nous nous engouffrons dans la région de Halouiya à 5 km de la wilaya de Blida où nous rencontrons par hasard des fellahs à l'entrée de leur champ. Ils étaient au nombre de quatre, dont deux jeunes et deux hommes âgés d'une cinquantaine d'années. L'un de ces derniers nous raconte son désarroi de devoir se séparer encore et pour la deuxième fois de quelques hectares pour la réalisation d'une autoroute qui doit passer au milieu de cette exploitation agricole spécialisée dans l'arboriculture. Selon Mohamed, 58 ans, «nous avons déjà été expropriés d'environ 5 hectares en 1995 pour construire des bâtiments et aujourd'hui, un autre projet d'autoroute devra passer par notre champ qui sera encore une fois délesté». Notre interlocuteur nous apprend que les services concernés «se sont déjà rendus sur les lieux pour faire le tracé et relever la surface qui servira à la réalisation de cette infrastructure de base». Sur un ton de regret, ce fellah nous confie que «toute l'exploitation d'environ 40 hectares initialement risque de disparaître complètement si ça continue sur cette lancée et si des mesures ne sont pas prises pour stopper l'avancée du béton». Et de regretter que «l'Etat attribue des parcelles de terrain aux agriculteurs pour les reprendre par la suite». Il dit que, lorsqu'il est arrivé avec 8 autres agriculteurs dans cette région, le terrain était vierge avant d'être transformé en arbres fruitiers, entre autres pommiers, abricotiers… Un autre fellah nous explique que «nous avons consenti beaucoup d'efforts dans ce terrain pour faire grandir les arbres en les soignants chaque jour que Dieu fait pour qu'on vienne aujourd'hui nous les arracher avec facilité». De plus, Ahmed aurait souhaité que les agriculteurs soient «concertés pour leur éviter ce sentiment de hogra qu'ils ressentent au fond d'eux-mêmes». Plus encore, «leur parler des modalités de dédommagement quand à l'expropriation. Ce qui ne se fait pas souvent», selon les agriculteurs que nous avons rencontrés à Halouiya. «Nous-mêmes, nous n'avons pas encore été dédommagés pour les 5 hectares qui nous ont été retirés par le passé». Pourtant, ces agriculteurs indiquent qu'ils ont «frappé à toutes les portes pour faire valoir leur droit mais en vain», et disent qu'ils sont maintenant âgés et «nous ne pourrons plus nourrir nos familles si nous perdons notre terre qui est notre seule source de revenu». Et de conclure que «quel que soit le dédommagement qu'on pourrait avoir un arbre n'est jamais remplacé». Le cas des agriculteurs de Halouiya n'est sans doute pas isolé. Combien d'autres hectares de terres agricoles fertiles de la Mitidja, ou des différentes régions du pays ont fait l'objet d'expropriation pour des projets d'utilité publique ? Sans doute nombreux si l'on compte les grands projets mis en place dans le cadre des programmes quinquennaux et de relance économique.