De notre envoyée spéciale à Tamanrasset Wafia Sifouane Adulé et respecté de tous, le groupe Tinariwen a déclenché une euphorie généralisée lors de son concert dans la soirée de jeudi dernier en plein air, près de la maison de l'imzad, à quelque 5 kilomètres de Tamanrasset. En effet, le groupe s'est donné à fond en offrant au public des bouchées doubles de pur plaisir sonore. Invités dans le cadre de la deuxième édition du Festival «Sauvez l'imzad» organisée par l'association qui porte le même nom, le groupe Tinariwen s'est d'abord produit sur scène lors de la soirée inaugurale. Mais hélas, le manque de sécurité accentuée par la folie d'un public fan a conduit à l'arrêt du concert… grande déception du public et panique chez les organisateurs. Mais cela finalement a été parfaitement rattrapé. La soirée commence avec la formation Tartit venue de Tombouctou pour exécuter une démonstration excellente de l'art de manier l'imzad. Issues de la tribu des Kel Tamacheq, ces jeunes femmes mettent bien en avant leurs traditions à travers un son mystique mêlé à une voix triste et résonnante à donner froid dans le dos ! Mohamed Issa qui les accompagne à la guitare se déchaîne sur la scène en faisant appel à tous ses sens. Le rythme monte crescendo sur fond de notes de l'imzad. Ces femmes touareg chantent leur vie, leurs espoirs, leurs malheurs et ces coutumes de leur peuple. Elles feront par la suite appel au bassiste et au percussionniste du groupe Atri N'assouf. Les deux musiciens tentent une approche plutôt moderne, mais sans trop s'éloigner des sonorités et rythmes de la musique targuie. Ils restent dans le giron de l'authenticité. Le spectacle durera plus d'une heure et le public s'impatiente. Le groupe Tinariwen est réclamé à cor et à cri. Et c'est l'explosion de joie quand il répondra à la demande. Ce sera un grand moment lorsque les six musiciens rejoignent la scène… rien à dire. Le silence qui règne est épaissi par le froid glacial de ce début de soirée. Tous les yeux sont rivés sur la formation. C'est là qu'on constate la notoriété du groupe dans cette région. Dès les premières notes, le style musical se dessine, prend des formes, se joint à d'autres sonorités pour étonner nos oreilles. La formation exécute une intro blues qui annonce la couleur du show et donne un avant-goût étourdissant. Le temps est suspendu. Un concert de Tinariwen ne peut qu'être un événement, qu'on ne peut, qu'on ne doit rater. Et le public en est bien conscient. Trois titres suffiront pour mettre dans le bain les spectateurs qui n'ont pas eu la chance d'écouter et de découvrir le style du groupe malien. Quelques minutes plus tard, Ibrahim Ag Lahbib, le leader du groupe, monte sur scène. Coiffure afro, bazane (tunique ample) bleu électrique et guitare à la main, très décontracté, il se balade sur la scène. Il se mêle au jeu puis quitte les planches. Incontrôlable et imprévisible, Ibrahim emplira l'air avec son jeu à la Jimi Hendrix. Les frontières s'effondrent, les conflits se dissipent, seule la musique est reine de la soirée. Les musiciens du groupe Tinariwen ont su développer un son bien à eux, qui, tout en gardant une trame targuie, puise dans leurs influences multiples. Cette fusion de la musique saharienne avec des sonorités mêlant blues, rock et jazz est un pur régal, ça plaît et ça déchire ! Le groupe jouera Aman iman, Assouf, Imidiwan, Chatma et régalera ses fans avec quelques extraits de leurs anciens albums Amassakoul. Les fausses notes sont du côté des organisateurs du festival qui multiplient les couacs et enchaînent les retards, le manque de tact avec les invités, en un mot une organisation à la «va comme je te pousse», ça marche comme ça peut, comme ça veut ou ça ne marche pas. Entre organisateurs qui ne savent pas exactement de quoi il retourne, absence de transport et oubli des artistes et des invités, c'est à se demander s'il y a réellement une organisation pour qu'il y ait critique !