Le président de la République vient d'adresser à la chefferie du gouvernement une instruction lui intimant l'ordre (ça ne peut s'expliquer autrement) d'engager sérieusement la lutte contre la corruption. Si le premier magistrat du pays a été contraint de prendre cette instruction, c'est que le feu est dans la demeure et qu'il est excédé par ces scandales qui éclaboussent les entreprises algériennes et les grands projets engagés à coups de milliards de dollars. A la lecture du document, d'aucuns voudraient reprendre espoir que la chasse aux voleurs et aux corrupteurs et corrompus est animée d'une véritable volonté politique d'en finir avec cette gangrène. Cela, au moment où des conflits sociaux et autres émeutes éclatent ici et là en raison de l'érosion du pouvoir d'achat et des conditions de vie qui vont en se détériorant. Ce n'est pas la première fois que le président de la République exprime son exaspération quant à ce fléau. Il a, à maintes reprises, instruit, sommé, ordonné aux responsables de l'Etat de s'assumer dans ce dossier. Pourtant, force est de constater que très peu de choses sont faites sur ce plan. On n'en veut pour preuve que l'instance de prévention et de lutte contre la corruption qui n'a toujours pas vu le jour, et qui pourtant pourrait jouer un rôle non négligeable. L'opacité qui entoure les déclarations des appels d'offres frappés à tout bout de champ d'infructuosité pour privilégier le gré à gré est édifiante, sans compter les transactions douteuses dans la passation des marchés publics, souvent morcelés moyennant pots-de-vin et autres privilèges aux proches et personnes influentes. Pour pouvoir être à la hauteur et appliquer dans ses moindres termes l'instruction présidentielle, il faut être irréprochable. Le Premier ministre, en emboîtant le pas à Abdelaziz Bouteflika pour la mise à exécution de l'instruction n°13, sait pertinemment que les différents responsables ne sont pas tous des anges. Certains ont plutôt à leur crédit une multitude de griefs. De plus, la culture de la démission n'est pas une tradition dans notre pays, y compris quand les institutions ou les organismes qu'ils dirigent sont éclaboussés. D'autre part, il faut noter que la loi est sans cesse violée, parfois par ceux censés l'appliquer. A l'exemple de l'obligation de publier au Journal officiel les déclarations de patrimoine de l'ensemble des agents publics et le suivi du train de vie de ces mêmes agents. En fait, c'est un véritable coup de pied dans la fourmilière qu'il faudra donner, quitte à y laisser des plumes et à se faire traiter de tous les qualificatifs. La presse seule ne peut venir à bout des lobbys, parce qu'il s'agit de lobbys qui se sont installés et comptent imposer leur propre mode de gestion du pays. F. A.