Photo : S. Zoheïr Par Samira Imadalou L'accord d'association Algérie-Union européenne connaîtra une révision cette année. Ce sera à l'occasion de la réunion du conseil d'association en juin prochain. L'objectif est de donner un nouveau souffle à cet accord qui n'a pas profité, faut-il le rappeler, à l'Algérie, selon les déclarations des responsables algériens. C'est d'ailleurs en prélude de cette rencontre qu'une délégation de l'UE a séjourné ces derniers jours à Alger. Conduite par le directeur chargé de la Méditerranée du sud et du Moyen-Orient à la Direction générale des relations extérieures, M. Tomas Dulpa Del Moral, cette délégation a eu à rencontrer des représentants du gouvernement. A l'issue de ses entrevues avec ces derniers, le chef de la Mission européenne n'a pas écarté une révision de l'Accord d'association. «L'Accord d'association reste un choix stratégique. C'est un document qui a la possibilité d'être révisé pour l'adapter aux réalités et aux potentialités des relations entre les deux parties». C'est ce qu'a déclaré M. Tomas Dulpa lors d'une conférence de presse animée hier au siège de la Commission européenne au terme de sa visite à Alger. Il s'agit, selon le représentant de la CE, de revoir certaines clauses de l'accord de manière à apporter des changements bénéfiques aux deux parties, des changements qui s'imposent d'autant que l'Algérie est loin d'être satisfaite des résultats dudit accord entré en vigueur en septembre 2005. Le ministre du Commerce, El Hachemi Djaaboub, l'a d'ailleurs clairement souligné hier sur les ondes de la Chaîne III de la radio nationale «L'UE n'a pas aidé l'Algérie à adhérer à l'OMC comme convenu. Plus grave, les pays qui s'opposent à notre adhésion à l'OMC font partie de l'UE et sont censés être nos meilleurs partenaires», a-t-il avancé, relevant par ailleurs que l'UE n'a pas tenu ses engagements et a failli dans la coopération en matière de transfert de technologie et dans la lutte antiterroriste. Du côté de l'UE, on avance que les discussions sur l'OMC entre les deux parties sont insuffisantes. L'UE précisera par la voie de M. Tomas Dulpa : «L'Algérie nous dit que l'adhésion à l'OMC était un choix stratégique irréversible. C'est important pour nous. Nous voulons redynamiser les contacts sur ce dossier. Ces contacts ont été insuffisants jusque-là». Et d'ajouter : «Nous avons envoyé un mémorandum au gouvernement algérien avec toutes les questions qui doivent être réglées dans le processus d'adhésion à l'OMC. Nous n'avons pas reçu de réponse directe à ce mémorandum». Sur un autre plan et toujours au sujet de l'Accord d'association, le conférencier, interrogé sur les nouvelles mesures d'investissement en Algérie, rappellera que l'Algérie n'a pas respecté les clauses de l'accord à travers les mesures prises dans le cadre de la loi de finances complémentaire 2009. Le chef de la Mission européenne a en effet remis sur le tapis, dans ses discussions avec les responsables algériens, le dossier de la LFC 2009. Une question qui continue à gêner les investisseurs européens. «Nous voulons faciliter la conduite des investissements européens en Algérie. Ce que nous pouvons faire c'est de faciliter les conditions pour que l'opérateur économique soit attiré par le marché algérien», a laissé entendre M. Tomas Dulpa, non sans avoir précisé au préalable : «En général, l'Accord d'association est respecté par les deux parties. Exception faite aux dispositions de la LFC 2009 dont le gouvernement a rappelé à maintes reprises le caractère souverain (LFC 2009) et qui ont fait l'objet d'explications côté algérien.» «La partie algérienne a fourni les clarifications au sujet du contexte et des objectifs de ces mesures», précise en effet le communiqué rendu public par la délégation de l'Union européenne en Algérie Un communiqué dans lequel il est également mentionné : «Les deux parties ont convenu qu'elles attribuent à la réussite de la mise en œuvre de l'Accord d'association dans le respect des obligations juridiques découlant de l'Accord», d'où la décision de le réviser. S. I. Coopération énergétique : le solaire en ligne de mire En matière d'énergie, le conférencier dira que l'intérêt à mettre en place un partenariat stratégique est affiché par les deux parties. Mais certaines incompréhensions ont retardé les discussions concernant l'accord stratégique sur l'énergie. «L'Algérie a demandé des changements», a précisé M. Tomas. L'UE, qui, pour rappel, reproche à l'Algérie de subventionner le prix des carburants sur son marché, est appelée à répondre à un questionnaire «complexe» qui lui a été adressé par le ministre de l'Energie et des Mines Chakib Khelil, selon le chef de la mission qui s'est contenté de dire : «Nous allons y répondre». Et d'annoncer que l'Algérie et l'UE ont coopéré dans le domaine des énergies renouvelables, notamment à travers le plan solaire euro-méditerranéen. Un plan qui sera débattu le 10 février prochain à Bruxelles en présence de l'Algérie. Investissements européens en Algérie : 1,1 milliard d'euros en 2009 Précisant que le flux des investissements européens en Algérie n'a pas baissé ces dernières années, le représentant de l'UE a avancé que ceux-ci ont été multipliés par cinq en trois ans. «Il y a eu une progression importante des investissements européens en Algérie. A la date de l'entrée en vigueur de l'Accord d'association en 2005, ils étaient de l'ordre de 234 millions d'euros. En 2008, ces investissements ont atteint 1,14 milliard d'euros. On peut considérer que ce n'est pas suffisant mais il y a clairement une tendance à maintenir dans l'avenir», a expliqué M. Tomas Dulpa. Et d'indiquer dans le même sillage que ces investissements sont de plus en plus diversifiés. Alors qu'en 2005, 70% d'entre eux étaient concentrés dans les hydrocarbures, alors que cette tendance s'est inversée aujourd'hui. En d'autres termes, actuellement les projets européens en Algérie hors énergie représentent 70% du total dans des secteurs hors hydrocarbures. «Les investissements ont augmenté dans le sens de la diversification», a relevé le responsable européen. Affaire Fertial : l'UE rassure «Nous allons résoudre le problème Fertial.» C'est l'engagement de Tomas Dupla del Moral. Interrogé à ce sujet, le conférencier évoquera une petite avancée dans le différend Algérie-UE concernant ce dossier. «La situation semble beaucoup s'améliorer. Cela nous permet de considérer que nous allons résoudre le problème de Fertial», a indiqué l'hôte de l'Algérie sans donner plus de précisions. Cependant, M. del Moral n'a avancé ni de date ni les points litigieux avant une éventuelle issue à ce différend. «Nous avons discuté sur la manière d'aborder ce problème du point de vue des procédures. Il y a des aspects techniques à prendre en considération», a-t-il ajouté. Pour rappel, le litige remonte à deux ans : Fertial subit une taxe antidumping pour l'exportation des ses produits à destination de l'Europe. Pour l'UE, cette taxe est justifiée dans la mesure où avec un prix du gaz subventionné, l'entreprise algérienne possède un avantage comparatif par rapport à ses concurrents européens. Non-adhésion de l'Algérie à la politique européenne de voisinage : «C'est un choix souverain» «C'est un excellent instrument pour les relations avec les voisins !» C'est ainsi qu'a qualifié M. Tomas Dulpa Del Moral la politique européenne de bon voisinage. Même si la plupart des pays travaillent avec l'UE dans le cadre de la PEV, l'Algérie a décidé de ne pas se joindre à cette démarche. «C'est un choix souverain que nous ne contestons nullement», a expliqué le conférencier, rappelant que le processus donne des avantages, une manière d'inviter l'Algérie à réfléchir sur la question et à revoir sa copie. «Libre circulation des personnes : l'Algérie négocie dans un cadre bilatéral» Evoquant la question de la libre circulation des personnes, le chef de la mission européenne a émis le souhait de voir ce dossier traité dans un cadre global, c'est-à-dire européen. Mais l'Algérie a préféré, jusqu'à présent, la traiter dans le cadre bilatéral avec quelques Etats européens. «Nous avons exprimé à la partie algérienne notre avis pour la négociation d'un accord de réadmission, c'est une obligation qui est dans l'Accord d'association à la demande des deux parties, en plus du fait qu'il serait bénéfique pour les deux côtés de traiter cette question à l'échelle européenne», a-t-il expliqué.