Photo : S. Zoheir Par Karima Mokrani Les enseignants du technique prennent à témoin l'opinion publique sur «la mise à mort» de l'enseignement technique en Algérie. Désabusés, désorientés, ils lancent un nouvel appel aux représentants de la société civile, aux partis politiques… et autres pour les soutenir dans leur combat. «L'enseignement technique n'existe plus en Algérie. Les pouvoirs publics sont en train de consacrer la dépendance technologique. Ce problème ne concerne pas seulement les enseignants ou les élèves, il concerne toute une nation […] Nous ne devrons pas nous taire devant pareille situation !» ont–ils soutenu lors d'une conférence de presse tenue hier à Alger. Les membres fondateurs de la Coordination nationale des lycées techniques et des technicums (CNLTT) attirent l'attention sur un fait qu'ils considèrent assez grave pour l'avenir de toute une génération : «Ils essaient de régler le problème du surplus des enseignants du technique par la création d'un autre problème. Les directeurs de l'éducation des 48 wilayas du pays ont envoyé des circulaires à tous les établissements du secondaire, obligeant les premiers responsables de ces établissements à inscrire un quota bien précis d'élèves dans la filière technique mathématique, sans que ces derniers aient le profil ou le désir de suivre les études dans cette filière. Les parents, non plus […].» «Après avoir sacrifié les enseignants, voilà qu'ils s'en prennent aujourd'hui aux élèves», s'indigne une enseignante. Un de ses collègues tranche d'ores et déjà sur le devenir de cet enseignement (les techniques mathématiques) : «Ces classes seront bientôt fermées. Les élèves inscrits finiront vite par déchanter. C'est l'échec programmé de cet enseignement qui n'a rien de technique en fin de compte.» Interrogés sur l'utilisation de l'ordinateur dans l'enseignement des nouvelles filières techniques, en remplacement des anciens appareils et autres machines utilisés dans les ateliers, l'enseignant est catégorique : «Ce n'est pas possible de travailler seulement sur ordinateur. Ce n'est pas du tout pratique.» Concernant leur transfert vers les centres d'enseignement professionnel : «Aucun des enseignants n'a été orienté vers l'enseignement professionnel. Les enseignants en surplus sont, en revanche, affectés dans des lycées d'enseignement général pour enseigner la technologie et parfois d'autres matières, sinon s'occuper de tâches administratives.» A ce sujet, interviennent deux autres enseignants : «Est-il normal de demander à un enseignant du technique de s'occuper de la surveillance de la bibliothèque ou des laboratoires ? C'est du mépris à notre égard.» Un autre enseignant, ayant plus d'une vingtaine d'années à son actif, évoque le problème des professeurs dans les lycées techniques (PTLT) : «Nous sommes les premières victimes du nouveau statut. Les PTLT qui ont exercé, pour la plupart, plus de 20 ans dans l'enseignement secondaire technique, ont été reclassés à la même catégorie que les instituteurs des écoles primaires. Nous demandons à ce que les pouvoirs publics réparent cette injustice. Nous demandons l'intégration des PTLT dans le corps des enseignants du secondaire.»