Photo : A. Lemili De notre correspondant à Constantine A. Lemili Boxeuse ! Peu courant quand même d'utiliser ce mot dans une société comme la nôtre, machiste à l'excès. Pourtant Akila Ramoul, du haut de ses quinze ans, a décidé de le devenir et est prête à tous les sacrifices mais aussi à bousculer toutes les conventions pour y parvenir. Tout a commencé par les entraînements dans une salle de boxe avec sparring-partner, excusez du peu, des garçons et rien que des garçons.Zeghad Messaoud, son coach, nous dira : «Vous savez, au tout début, elle avait commencé par jeter un coup d'œil à travers une porte entrebâillée, s'attardant un peu plus tard pour regarder les jeunes s'échauffer et taper dans les ballons de vitesse, le sac ou le punching-ball pour ensuite venir, crânement, me demander de l'intégrer dans le groupe et… de l'entraîner.»Bien évidemment, cela a quelque peu interloqué un coach plutôt habitué à n'entraîner et pour cause que des hommes qu'il pouvait rudoyer quand il y avait nécessité d'exprimer son mécontentement. Et en boxe, être mécontent fait partie du lot quotidien compte tenu de la somme de frustrations qui touchent la discipline et de ceux qui, à la limite du militantisme, s'acharnent à vouloir la maintenir en vie : manque de moyens, désintérêt quasi total des instances sportives locales concernées, absence de subventionnement direct d'une discipline sans doute considérée comme mineure. Or, preuve nous est donnée sur place que la section boxe du CS Khroub a rapporté plus de titres à l'association que tous les clubs de football de la wilaya réunis. En effet, une série de trophées conquis sur les plans local, régional et national attestent de la qualité d'antre formatrice de champions qu'est le CSK.Karim Ramoul, frère d'Akila, est également passé par cette salle et aurait pu, en raison de ses qualités physiques et morales aller loin dans la discipline s'il n'avait pas, pour des raisons professionnelles, remisé momentanément ses gants. Ce dernier n'aurait pas eu une grande influence sur sa sœur, elle nous l'affirme d'ailleurs : «Non, j'ai aimé tout de suite la boxe comme une fille de mon âge peut aimer la danse ou le chant. C'est une question de feeling et, un jour, je me suis dit que, si je devais pratiquer un sport et envisager la compétition, ce ne serait qu'en boxe.»Chausser des gants et monter sur le ring pour évaluer ses capacités même face à un garçon ne constituent pas un casse-tête pour la boxeuse en herbe. Loin s'en faut d'ailleurs et l'opportunité de matérialiser ses velléités va lui être donnée à partir de jeudi prochain où elle devra, dans le cadre d'un critérium qu'organise la ville de Hamma Bouziane, croiser les gants avec un adversaire du même poids (mouche).Son entraîneur croit dur comme fer que «la présence de la petite dans sa salle sera tôt ou tard payée de retour», notre interlocuteur rappelant dans la foulée qu'«il y a quelques jours seulement un championnat d'Algérie de boxe filles s'est déroulé au centre du pays. Il n'y a donc pas de raison pour que d'autres filles ne se décident pas à opter à l'avenir pour la boxe et rejoindre les différentes salles existant à hauteur de la wilaya de Constantine».En tout état de cause, bien des choses semblent avoir changé en 2009 dès lors que des personnes du sexe féminin, tous âges confondus, ont commencé d'abord à s'intéresser au football encore un peu plus en supportant la sélection nationale, d'aller au stade quand celle-ci évolue en Algérie et, enfin, se déplacer, parfois à la limite de l'odyssée, avec cette même sélection. Des tabous tombant par voie de conséquence d'eux-mêmes. Alors, une fille qui boxe, c'est le plus grand mal que nous pouvons souhaiter à nos compatriotes et à une Algérie qui, sur le plan sportif, a retrouvé la joie de jouer et de gagner, le punch en somme. Ceux qui ne partagent pas cet avis n'ont qu'à regarder «Million Dollar Baby» et ils en changeront. Du moins pour la boxe.