Révolution sur le marché du gaz : les nouvelles techniques d'extraction dans les roches souterraines dopent la production des Etats-Unis, dont les réserves sont désormais estimées à plus de cent ans, et bouleversent les équilibres mondiaux. Selon une étude publiée mercredi dernier par le cabinet IHS Cera et reprise par des médias, ces techniques dites «non conventionnelles», ignorées de l'industrie il y a cinq ans, ont permis de «plus que doubler» l'estimation de ressources disponibles en Amérique du Nord, à 85 000 milliards de m3. «C'est la plus grande innovation en termes d'énergie depuis l'an 2000», a estimé Daniel Yergin, président d'IHS Cera, lors de la conférence CeraWeek à Houston (sud des Etats-Unis). On a vu le gaz naturel passer d'une situation d'offre limitée à une situation d'abondance. Cela modifie la nature de la concurrence dans l'énergie, cela modifie le débat», a-t-il ajouté. Les techniques d'extraction des gaz contenus dans les schistes ont connu un développement spectaculaire, ces dernières années, ramenant les compagnies vers des régions où l'on croyait les ressources épuisées, comme dans l'Etat de New York (est). Elles consistent à casser la roche en y injectant sous haute pression un liquide contenant des produits chimiques qui libèrent le gaz et le fait remonter à la surface, puis à forer à l'horizontale pour suivre les couches de la roche. Alors qu'ils ne représentaient que 1% de la production américaine en 2000, les gaz de schiste atteignent aujourd'hui 20% de la production et pourraient dépasser 50% d'ici à 2030, selon l'étude d'IHS Cera. A l'échelle mondiale, cette évolution fulgurante du marché américain a eu un effet spectaculaire : les Etats-Unis ont ravi en 2009 à la Russie la place de premier producteur mondial de gaz. Le géant russe Gazprom s'est récemment inquiété de cette «révolution», qui «peut modifier fondamentalement le marché du gaz». Avec un excès de production aux Etats-Unis, l'offre mondiale de gaz naturel liquéfié (GNL) s'est redirigée vers l'Europe, faisant concurrence à l'offre russe, dont certains pays voudraient être moins dépendants vu les conflits à répétition entre la Russie et l'Ukraine sur l'acheminement des hydrocarbures.