Le gaz contenu dans le schiste bitumineux des Etats-Unis suscite les convoitises. La société indienne Reliance Industries est le dernier groupe étranger en date à s'y être intéressé. En pourparlers avec Atlas Energy pour acheter des parcelles sur le site de Marcellus Shale, il ne fait que suivre les traces du japonais Mitsui et du norvégien Statoil. Les quantités disponibles suffisent à faire miroiter des perspectives alléchantes. De nouvelles techniques de forage rendent accessibles 17 443 milliards de mètres cubes, soit trente années de consommation de gaz pour les Etats-Unis ou 106 milliards de barils de pétrole. Comme le rendement des puits de cette zone vaut plusieurs fois celui des puits classiques, son coût d'extraction est bien inférieur. Enfin, le gaz obtenu émet moitié moins de carbone que le charbon. C'est une filière idéale pour échapper aux pénalités que les mesures de lutte contre le réchauffement climatique vont infliger aux producteurs de charbon comme Consol. La hausse de la demande a fait monter les enchères. D'après le cabinet d'études IHS Herold, le prix moyen de l'acre (environ 0,4 ha), a doublé à Marcellus Shale en 2009, pour atteindre 4 000 dollars. Lorsque le groupe Mitsui a fait affaire avec Anadarko, il s'est acquis l'accès à son expertise en matière de forage, mais aussi à ses gisements pour 14 000 dollars l'acre. Les prix grimpent, alors que le cours du gaz ne vaut que la moitié de son record de 2008. La reprise économique mondiale va bientôt le faire s'envoler. Il fait dire que la course au gaz de schiste a démarré au début des années 2000 et, en moins de dix ans, la production de gaz de schiste représente... près de 20 % de la production de gaz aux Etats-Unis ! Et pourrait atteindre la moitié en 2030. "C'est la plus grande innovation énergétique de la décennie", dit un gourou de l'industrie des hydrocarbures, Daniel Yergin, de Cambridge Energy Research Associates. L'Agence internationale de l'énergie écrit dans son "World energy outlook 2009" que ce "boom inattendu (...) devrait contribuer à un important excédent de gaz dans les prochaines années". Quant au "pic gazier", ce moment où la production mondiale devrait diminuer, il est vraisemblablement repoussé de plusieurs décennies. Selon l'institut français du pétrole les réserves mondiales de gaz de schiste sont estimées à près de 900 téramètres cubes, soit plus de quatre fois les ressources de gaz conventionnel. Dans tous les coins du monde, on cherche frénétiquement le nouveau fluide : en Pologne, en Allemagne, en Chine, au Québec - où la vallée du Saint-Laurent est visée - et en France, où paraîtront prochainement au Journal officiel des permis de recherche dans les régions de Villeneuve-de-Berg (Ardèche), Montélimar (Drôme) et Lodève (Hérault). Nénamoins son exploitation n'est pas aussi simple et suscite quelque appréhensions d'ordre écologique.Il faut beaucoup, mais alors beaucoup d'eau pour fissurer les roches. Et quand on la récupère, elle est souvent chargée en métaux lourds, donc toxique. Ensuite, il faut de très nombreux puits pour exploiter ce gaz, parce que la ressource est disséminée : au Texas, déjà des dizaines de milliers. On tire le gaz - mais les paysages en prennent un sacré coup.