Avec la déliquescence du secteur de l'éducation nationale (le ministère et les enseignants en ont encore donné toute la mesure ces derniers jours), les parents d'élèves vivent dans la peur de la violence que leurs enfants côtoient quotidiennement à l'intérieur comme à l'extérieur des établissements, qui semble se banaliser de manière dramatique : «Je suis effarée de voir toute cette violence chez les élèves d'aujourd'hui, déplore la mère d'un collégien. Ils ne craignent plus leurs enseignants ni le personnel administratif et sont comme livrés à eux-mêmes.» La preuve ? «Leurs tenues vestimentaires pour certaines plus que débraillées, le fait que de nombreux élèves sont armés, qu'ils consomment de la drogue, qu'ils sèchent les cours… Tout cela, sous les yeux indifférents de la ‘‘famille'' de l'éducation nationale.» Et la chronique oranaise donne quotidiennement raison à notre interlocutrice : des bagarres sanglantes, des agressions violentes, la vente de drogues à proximité des établissements, des enseignants menacés par leurs élèves ou carrément ridiculisés… la liste est longue. Il y a seulement quelques jours, le lycée Ben Othmane El Kébir, situé dans le quartier de Maraval, a subi la visite d'un groupe d'individus qui n'ont pas hésité à s'introduire à l'intérieur de l'établissement pour s'en prendre à des lycéens. On imagine la panique que cette descente d'un genre inédit a provoquée chez les élèves et les responsables de l'établissement qui ont porté plainte auprès des services de police. Pour de nombreux parents d'élèves, le laisser-aller et l'absence de sécurisation seraient pour beaucoup dans ce drame qui, heureusement, n'a pas fait de victimes ; contrairement à la tragédie du CEM Zaki Saïd, du quartier des Amandiers qui, l'année dernière, avait provoqué la mort d'un adolescent : «Les établissements scolaires ne sont plus ces espaces de savoir et de culture que nous avons connus à notre époque, continue la jeune dame, en évoquant avec nostalgie la période de sa propre scolarisation dans les années 70 et 80. Nous avions du respect pour nos aînés mais les enseignants et responsables de l'éducation ne se laissaient pas faire comme ceux d'aujourd'hui.» Beaucoup d'enseignants, particulièrement des femmes, ne cachent pas leur crainte de subir des représailles en cas de sanction de certains élèves : «Il est même arrivé que, pour une histoire de notes ou de discipline, des collègues soient menacées en plein cours par des élèves ou agressées verbalement», confirme un enseignant de cycle moyen qui reconnaît que les enseignants sont dépassés par l'ampleur de la violence : «Comment, avec seulement 3 surveillants, gérer convenablement 1 400 élèves d'un CEM situé dans un quartier aussi difficile que les Amandiers ?» s'étaient plaints les enseignants de l'établissement Zaki Saïd à la cellule d'écoute psychologique mise sur pied après le drame : «Nous avons fait des séances de psychothérapie avec de nombreux collégiens, filles et garçons, notamment un groupe de 15 élèves que la direction de l'établissement nous a indiqués comme étant très difficiles et agressifs ; nous avons été frappés de constater par leurs paroles à quel point la violence était présente dans leur quotidien. Aujourd'hui, si l'on ne veut pas perdre le bénéfice de ce travail, il est impératif d'avoir sur place en permanence un psychologue…» avait conclu le rapport de la cellule de crise. Et ce ne serait pas exagéré de dire que la recommandation de la cellule de crise vaut pour la plupart des établissements scolaires et appelle à une prise en charge urgente de la violence scolaire.