Si les ports constituent le poumon de l'économie d'un pays en ce sens qu'ils sont censés être des générateurs de la valeur ajoutée, vraisemblablement, ce n'est pas le cas en Algérie. Ce concept largement vérifié à travers le monde n'a jamais été appliqué dans l'Algérie indépendante. Ce constat amer est la résultante d'une série de critiques et de reproches, parfois chiffrés, de l'ancien directeur général de l'Entreprise portuaire de Béjaïa, Abdelkader Boumessili, qui était hier l'invité du Cercle d'action et de réflexion autour de l'entreprise (CARE). Il a jeté un véritable pavé dans la marre en ce qui concerne la gestion de nos ports mais surtout leur développement depuis 1962. Car, selon lui, si la question de l'organisation portuaire en Algérie remonte aux premières années de l'indépendance, la situation n'a pas vraiment changé au fil des années. «La création de 10 entreprises portuaires, assurant chacune à son niveau les missions de service public et exerçant les prestations commerciales, a au contraire aggravé la situation au fil des années. En 2009, comme en 1978, 1982 ou 1995, la situation n'a pas beaucoup changé. Les files d'attente sur rade demeurent, les séjours à quai des navires sont toujours assez lents, les espaces d'entreposage aussi désordonnés et obstrués qu'avant», explique M. Boumessili. Cet ancien responsable, qui est actuellement secrétaire général du groupe Cevital et consultant en management portuaire, a déploré l'inertie de la situation en dépit de l'instauration de textes juridiques et de lois notamment ceux relatifs à la gestion portuaire (les modalités d'exercice des activités de remorquage, de manutention et d'acconage). «La situation de notre système portuaire n'a pas beaucoup évolué, contrairement à ses similaires de la Méditerranée qui ont depuis longtemps déjà emprunté la bonne dynamique de mutation et pris quelques bonnes longueurs d'avance sur lui», précise-t-il. Et d'ajouter que s'il a évolué de manière très marginale par rapport aux changements intervenus au cours de ces 20 dernières années dans le monde des transports maritimes en général, le port a cumulé fatalement d'importants retards à tous les niveaux. Le port algérien est resté recroquevillé sur lui-même, alors que l'ensemble des systèmes méditerranéens se sont depuis longtemps adaptés aux nouvelles exigences technologiques, managériales et organisationnelles. Chiffres à l'appui, il a fait savoir que seulement 35 millions de tonnes hors hydrocarbures ont transité par nos ports en 2009 alors que le trafic méditerranéen est de l'ordre de 2 milliards de tonnes. «Nous sommes restés figés à cette époque de gestion socialiste et nous sommes en train de prendre du retard», a-t-il ajouté. S. B.