Médéa, cette ville imposante qui surplombe toute la vallée de la Mitidja du haut de sa montagne, se transforme petit à petit en un important pôle universitaire de la région du Titteri. Dotée d'un simple institut de formation supérieure depuis les années 80, Médéa abrite dès 1990 un centre universitaire qui ne compte à l'époque qu'une centaine d'étudiants. Mais, depuis, beaucoup de réalisations ont été accomplies et à partir de 2009, le centre universitaire se transforme en une université à part entière. Aujourd'hui, l'université Yahia Fares de Médéa compte plus de 12 000 étudiants, 809 enseignants permanents et 4 facultés. Ce qui était naguère un simple centre universitaire est désormais un véritable pôle universitaire en construction. De nouvelles infrastructures pédagogiques D'ailleurs, à la prochaine rentrée universitaire, de nouvelles infrastructures pédagogiques seront réceptionnées. Des locaux flambant neufs qui abriteront 5 000 autres étudiants. De plus, pour répondre aux besoins des nouvelles filières qui verront le jour, pas moins de 200 nouveaux enseignants seront recrutés. Ainsi, tout indique que Médéa se trouve à présent aux avant-postes de la décentralisation de la formation universitaire. Il s'agit là d'un nouveau déploiement territorial des universités dans le souci d'éviter la congestion des grands centres et pour rapprocher l'étudiant de son lieu de résidence. Cependant, l'enjeu économique est réel. La spécialisation de la formation dans les établissements créés graduellement est souvent liée au développement économique, qui a besoin de cadres. Ainsi, des filières d'électronique, de génie mécanique ou de chimie ont été associées aux industries existant dans les villes. Le poids des filières de technologie est d'ailleurs particulièrement marqué. La production pédagogique et scientifique de qualité, espérée pour accompagner le développement économique, n'a pas toujours suivi, de même que l'interface organique entre l'université et l'industrie n'a jamais été établie. Dans ce contexte, les établissements qui ont été créés dans des grandes villes régionales, souvent des pôles économiques d'importance (Annaba, Sétif, Batna, Sidi Bel Abbès, Blida, etc.), ont toujours de la peine à s'imposer sur la scène nationale. D'où leur difficulté de se doter d'un encadrement pédagogique de qualité. Mais à Médéa, on ne baisse pas les bras pour autant et les dirigeants de l'université continuent à se battre pour réussir à former des étudiants qualifiés à même de percer plus tard dans le marché du travail. Pour preuve, la bibliothèque centrale de cette jeune université comprend aujourd'hui près de 35 000 titres. Aussi, de nombreuses conventions lient la faculté des sciences et technologie avec des entreprises comme Saidal, Sonelgaz et d'autres encore qui ont ouvert par la suite leurs portes aux diplômés de l'université. Conventionnée également avec 5 à 6 universités françaises, l'université de Médéa a pu envoyer de nombreux étudiants en formation à l'étranger. Mais, en dépit de toutes les avancées, toujours est-il qu'on a réellement du mal à recruter des enseignants à Médéa. Au-delà des critères nationaux de recrutement qui sont beaucoup plus administratifs qu'universitaires, l'université de Médéa arrive à peine, reconnaissent ses gestionnaires, à répondre à 50% de ses besoins en termes d'encadrement pédagogique. «Lorsque nous cherchons 100 enseignants, nous ne réussissons à en recruter que 50», avoue Bouksnakdji Othmane, vice-recteur chargé de la recherche scientifique, des relations extérieures et de la coopération. L'encadrement, un problème à prendre en charge L'université de Médéa ne peut donc guère ouvrir de nouvelles filières comme celles relatives à la médecine, domaine dans lequel la région éprouve de grands besoins, en l'absence d'un encadrement pédagogique conséquent et approprié. Cette réalité ne s'explique nullement par le manque de logements de fonction dont dispose la ville, des quotas de logements LSP sont en chantier, mais beaucoup plus par l'absence d'une prime de zone au profit des enseignants. Cette prime, qui représente 80% du salaire de base de l'enseignant universitaire, est octroyée lorsqu'un enseignant accepte de travailler dans une université du Sud ou des Hauts Plateaux. Ainsi, à Djelfa, un maître-assistant pourrait arrondir son salaire à plus de 50 000 DA grâce à cette prime alors qu'à 122 km de là, à Médéa, il ne pourra guère dépasser les 35 000 DA. Du coup, la plupart des postulants répondent davantage favorablement à une offre d'emploi à l'université de Djelfa qu'à une proposition de l'université de Médéa, lesquelles sont séparées pourtant par seulement 125 km. Il est clair dès lors que rares sont ceux qui jettent leur dévolu sur Médéa. Malheureusement, même ceux qui sortent fraîchement, avec leurs masters et doctorats, des campus de l'université de Yahia Fares prennent leurs valises et descendent un peu plus au sud pour bénéficier de cette prime dans d'autres universités. En quête de liaisons avec le secteur économique Cela dit, alors que d'autres l'universités confrontées à l'effritement de l'appareil industriel, à l'absence de liaison avec les secteurs de la vie économique et sociale, à la faiblesse de la connexion avec les réseaux internationaux ou mondiaux, ne font que dans l'attentisme, l'université de Médéa cherche à s'accrocher à l'évolution du monde dans laquelle l'adaptation des programmes et des thématiques doit être rapide et souple. Pour ce faire, de nombreux séminaires et colloques sont organisés. Des rencontres internationales, auxquelles participeront d'éminents chercheurs étrangers, sont prévues également prochainement. Et en attendant des horizons prometteurs, l'université Yahia Fares s'évertue à développer davantage la fonction de recherche dans le cadre des laboratoires et avec le soutien des enveloppes financières importantes dégagées par le gouvernement. Aujourd'hui, elle s'impose comme référence dans l'application du système L.M.D. Est-elle en mesure de créer dans la région un environnement scientifique de qualité, susceptible d'aider à améliorer la formation, d'établir des liens avec des secteurs de l'économie et de contribuer à l'accueil de l'investissement ? Tout le défi de cette nouvelle université réside là et elle semble, en tout cas, bien déterminée à parvenir à le relever. A. S.