«Est puni d'un emprisonnement de trois (03) mois à douze (12) mois et d'une amende de 50 000 à 500 000 DA ou de l'une des deux peines seulement, toute personne qui offense le président de la République par une expression outrageante, injurieuse ou diffamatoire, que ce soit par voie d'écrit, de dessin, de déclaration ou de tout autre support de la parole ou de l'image, ou que ce soit par un autre support électronique, informatique ou informationnel.» Cet article, le 144-bis de la loi 01-09 du code pénal de 26 janvier 2001, est perçu comme une véritable épée de Damoclès par les journalistes algériens. Comment peut-il en être autrement puisque cette loi -ainsi que deux autres articles qui suivent et qui concernent le délit de diffamation- est un véritable problème ? Elle est non seulement un frein à la liberté d'expression, puisqu'elle encourage l'autocensure, mais elle ouvre la voie à d'autres dépassements.Car, en plus du danger que peut représenter la menace d'emprisonnement, la définition de «la diffamation» pose d'énormes problèmes. Où s'arrête la liberté de critiquer et d'informer et où commence la diffamation ? Le président de la République est, en effet, un homme public. C'est le premier responsable du pays dont la politique et les décisions sont sujets à commentaires. Parfois même à des critiques. Et c'est un des rôles qui reviennent à la presse et les médias de manière générale. Cela est-il passible de poursuites ? La loi ne le dit pas, même si, officiellement, la liberté d'expression est garantie par la Constitution. Pire que la définition de la diffamation, la menace d'emprisonnement est également une pratique révolue. En dépit du fait que, officiellement, les rares cas d'emprisonnement opérés en Algérie l'ont été pour des motifs autres que celui d'offense au chef de l'Etat, la menace est bien réelle. Des journalistes et des caricaturistes ont même été condamnés par cet article, même si là aussi, soit une amnistie, soit une décision politique a empêché l'application des peines. Il y a lieu de préciser que cette loi ne concerne pas uniquement le président de la République. Puisque dans les deux articles (144-bis 1 et 144-bis 2), d'autres responsables sont cités. Sur un autre plan, un véritable déficit dans la surveillance des dépassements des journalistes -il peut y en avoir, bien sûr- est patent. Il suffit de voir l'inertie du Conseil d'éthique et de déontologie pour s'en rendre compte. Car force est de constater et d'admettre que certains journalistes font rarement la différence entre vie publique et vie privée des responsables. Pis, les limites entre le droit d'informer et celles du respect de l'intégrité des biens et des personnes sont rarement définies. C'est, en revanche, le rôle du Conseil d'éthique et de déontologie. Un organisme a été créé à ce effet. Mais il est inexistant. Il revient aux journalistes de le reconstituer. Mais cela est une autre histoire. A. B.