à défaut de pouvoir réguler le marché du ciment, les pouvoirs publics se rabattent sur l'importation de ce produit afin de satisfaire une demande toujours croissante. Après l'introduction d'un million de tonnes à la fin de l'année écoulée, une autre opération est engagée pour l'importation d'un million et demi de tonnes de ciment. Les nombreux chantiers et la réalisation du deuxième programme d'un million de logements nécessitent certainement une quantité accrue de ce matériau. L'objectif est d'inonder le marché et de faire baisser les prix qui ont connu une hausse vertigineuse. Ce qui n'est pas évident, ce domaine étant jalousement gardé par des spéculateurs qui ont réussi à faire main basse sur le commerce. La solution prônée ne peut contrecarrer les desseins d'une maffia aux tentacules puissants capable de régner en maîtresse sur toute l'économie du pays. On ne peut pas invoquer l'insuffisance de la production comme argument justifiant l'importation de ce matériau, le nombre de cimenteries et l'existence de moyens sont là pour soutenir le contraire. Mais la rareté du produit intervient en raison de la défaillance en matière de gestion de ces cimenteries, surtout depuis que ces dernières sont passées sous la coupe d'étrangers, et en raison des arrêts de production pour maintenance qui interviennent en même temps, sans concertation aucune. Une manière de gérer à tout va, qui n'obéit à aucune réglementation et qui nuit considérablement à l'économie nationale. Il va sans dire qu'elle arrange les affaires des trafiquants qui se saisissent de toutes les opportunités pour bâtir des empires sur le dos de l'Etat et au détriment de celui-ci. Avec la complicité tacite des pouvoirs publics qui, par leur inertie, leur facilitent la tâche. L'arrestation, la semaine dernière, de 23 personnes entre responsables de cimenteries et commerçants démontre l'ampleur du trafic de ciment et témoigne du climat délétère qui préside au négoce et à la gestion en général. Comme beaucoup de domaines qui se trouvent entre les mains des spéculateurs, celui du bâtiment semble échapper aux pouvoirs publics qui sont convaincus que l'importation de produits sous tension –et ils sont nombreux– réduirait les prix et ferait relâcher l'emprise de tous les affairistes malhonnêtes. C'est faire preuve de naïveté que de le croire. Il ne suffit pas d'inonder le marché en produits devenus sujets à la spéculation. Les précédentes expériences ont été vaines devant le pouvoir de la maffia qui a pu investir un terrain laissé à sa portée. Au lieu d'emprunter des chemins biaisés, il faut plutôt s'attaquer à la racine du mal en livrant à cette maffia un combat acharné et sans merci. Il faut le vouloir et s'y mettre. Un travail de titan ? Le jeu en vaut la chandelle. R. M.