La compétition du Festival national du théâtre professionnel (FNTP) s'est clôturée en apothéose, dimanche dernier, au Théâtre national algérien (TNA) avec la représentation du Théâtre régional d'Oum El Bouaghi (TROB, El Bassiss (La Lueur) écrite et mise en scène par Mohamed Dine El Hannani. Ce dernier, qui fait partie de la nouvelle génération de metteurs en scène, marque talentueusement sa première participation au FNTP tant par la qualité de sa mise en scène que par son texte percutant et émouvant. A préciser que le texte est la seule création dans la compétition de cette édition. Toutes les autres pièces étaient des adaptations.La Lueur relate l'histoire d'un groupe de personnes qui sont prises sous les décombres suite à un tremblement de terre. Au fil des répliques, le groupe s'agrandit, et tous les personnages se retrouvent dans un huis clos où se mêlent confrontation et réconciliation. Ainsi, le public est face à un microsome social avec les archétypes qu'il comporte, le fou, la jeune fille-mère poussée à la débauche par le manque d'amour parental, son père, cadre de l'Etat corrompu qui a renié sa fille, le criminel, la veuve qui s'escrime au travail pour nourrir ses enfants, le jeune universitaire serviable mais qui ne rêve que de «harga» et une petite fille symbole de la nouvelle génération en quête d'espoir. Dans une langue fluide et accessible, l'auteur a dressé un tableau de la dislocation des liens sociaux et des maux qui en résultent. Ainsi, les décombres dans lesquels sont prisonniers les personnages sont ceux de leur propre esprit et ce n'est qu'à travers des prises de positions courageuses que la lueur salvatrice peut enfin les libérer de leurs démons intérieurs. Dans cette représentation, rien n'a été omis, tant dans le choix des comédiens que dans la maîtrise des autres éléments scéniques. Sabrina Bougharia, Loubna Latrech, Nouara Berah, Mourad Badiss, Adlane Triï, Baroudi Fakoura et Hichem Bardouk ont impressionné le public par la qualité de leur prestation. Ils n'interprétaient pas mécaniquement leurs rôles mais incarnaient avec passion et authenticité leurs personnages. Au fil des tableaux, une réelle symbiose a été créée entre le public et la scène et l'émotion était fortement palpable au sein du TNA.La pertinente scénographie conçue par Razik Nacib a su transposer l'atmosphère de la pièce grâce à une imagination surréaliste. Le décor réalisé par Mohamed Yahyaoui et Ferah Mohamed était impressionnant. Sans tomber dans le réalisme surfait, un mur de laine, clin d'œil à la région, reflétait tout en finesse le sujet de la pièce. Grâce à la maîtrise de la lumière par Djaber Hedjab et du son par Ali Hafsi, les scènes des répliques du tremblement de terre étaient surprenantes, donnant encore plus corps à la situation que vivaient les personnages. Quant à la musique composée par Abdelkader Amri, elle s'intégrait tout en harmonie avec l'atmosphère scénique. Sans aucune discordance. Grâce à la cohérence de tous ces éléments artistiques, les amateurs du 4ème art ont été gratifiés d'un spectacle de qualité à l'esthétique théâtrale d'une pure beauté. A l'exemple de celle où les principaux protagonistes, agenouillés en demi-cercle, chacun d'eux éclairé par un halo de lumière dans une atmosphère obscure aux reflets rougeoyants, clament leur détresse. Ces scènes poignantes fortement applaudies ont été allégées par la voix cristalline de la petite fille symbolisant l'espoir.En effet, c'est elle qui percevra la fameuse lueur permettant la délivrance du groupe. Au final, seul le personnage du fou restera sous les décombres car il refuse de retourner dans le chaos de la vie, où les repères sont éclatés. Dans la dernière scène, telle une cerise sur le gâteau, les comédiens gratifient le public d'un véritable tableau vivant, salués d'applaudissements nourris. Au final, pour sa première participation à la compétition du FNTP, la troupe représentant le TROB a réalisé un véritable coup de maître qui lui a valu un tonnerre d'applaudissements et même une des rares standing-ovations des membres du jury. S. A.