De notre correspondant à Constantine Nasser Hannachi Les écoles ont fermé leurs portes aux enfants non concernés par des examens de fin de cycle. Ceux-ci songent déjà à meubler leur temps en attendant d'avoir, peut-être droit à quelques jours au bord de la mer. Cette transition n'est pas assurée à Constantine. La ville n'a pas finalisé les projets se rapportant aux structures de loisirs. Le Mondial vient dissimuler quelque peu les insuffisances de Cirta en matière de distraction. «Moi, je suis Ziani et toi Chaouchi», clamaient deux bambins en effectuant des tirs au but dans un petit espace vétuste de la ville. Les vacances d'été étrennent leur saison 2009-2010. Les enfants concernés par les épreuves de l'ex-6ème cherchaient leur nom sur les listes des lauréats. Ceux qui sont admis savourent leur succès tout en espérant un temps de relâche appréciable en attendant les grands départs vers la grande bleue. Ce ne sera que partie remise pour les recalés qui se mesureront le 24 juin prochain à une autre session. D'ores et déjà les enfants notamment scolarisés errent dans la cité qui demeure en jachère de tout moyen de distraction à la dimension d'une capitale régionale. Ni parc, ni centre de loisirs, ni aires de jeu aux normes exigées n'existent. Constantine prive ses enfants de délassement. Les plus ou moins grands squattent des quartiers et des cités pour improviser des parties de football, chauffées par cette ambiance de Mondial qui plane sur tout le pays. Mais ce ne sont pas tous les enfants qui descendent taper dans la balle avec les copains. Certains parents interdisent à leurs gosses de fréquenter ces aires de jeu souvent aménagées dans un terrain vide qui devait accueillir… une aire de jeu, quand ce n'est pas dans un bout de rue pas très passante, en s'accommodant de ces petites interruptions pour laisser passer une voiture. «Les temps ne sont pas sûrs. Je ne sais pas qui traîne dans ces endroits», expliquera une maman qui interdit à son fils de traîner avec les enfants du quartier. Toutefois il n'existe pas de substitut, car la ville manque terriblement d'infrastructures pouvant offrir aux enfants un cadre agréable où ils pourraient jouer, se distraire et apprendre, en toute sécurité. Et rien n'est prévu pour changer la donne. La wilaya n'a pas de projets en la matière. Les autorités évoquent à chaque occasion la construction d'un grand parc au niveau de la cité Zouaghi. Le projet a été confié à un opérateur privé. Cependant, le chantier demeure à l'état d'esquisse. De l'autre côté, à Djebel Ouach précisément, il y a tout un patrimoine forestier qui tente de survivre face au béton qui menace. Heureusement, les directions chargées de la préservation de l'environnement veillent. Mais là aussi, l'aménagement du parc confié à un privé traîne. Les enfants attendent encore et toujours ces manèges, auto-tamponneuses, balancelles, carrousel et tous ces jeux qu'ils voient ailleurs sans jamais avoir eux la chance de pouvoir en profiter. Tant que les autorités locales ne prendront pas à bras-le-corps le problème de l'absence de loisirs, les enfants de Constantine continueront à vivre frustration sur frustration. Or, nos élus locaux comme les responsables de l'administration locale n'ont d'yeux que pour les dossiers dits «urgents et prioritaires», sur lesquels ils risquent d'être interpellés d'en haut. Et les loisirs des enfants sont loin de constituer une priorité ou une urgence. En attendant qu'un miracle s'opère et que nos responsables comprennent enfin que l'enfant est en soi un capital et un investissement que nous ne pouvons pas, nous ne devons pas, perdre, les Constantinois pour répondre aux besoins de leurs enfants se ruent vers Batna ou Sétif qui disposent d'un parc. «Il suffit d'une simple réflexion pour doter Constantine en aires de loisirs. La cité renferme autant de places stratégiques pour y ériger des stations ou des chaînes de distractions. Mais il semble que le béton aura tout bouffé pour ne laisser aucune assiette susceptible d'accueillir ce genre de projets», dira un résident. Parallèlement, Constantine «assez sèche» en été dans la mesure où elle se situe à près 80 km de la première plage, ne possède pas de bassins de baignade. Il y a quelques piscines implantées à proximité du Khroub, à Aïn Smara, ou encore aux alentours de la cité sportive CREPS jouxtant le stade chahid Hamlaoui, mais elles ne peuvent contenir tout le monde qui y afflue lors de la période estivale. Les enfants s'ennuient sec à Constantine et les parents se trouvent confrontés à la sempiternelle question : «Où vais-je emmener les gosses pendant le week-end ?» Attention au dérapage des jeunes surfers ! La wilaya de Constantine aux sites féeriques et à la beauté majestueuse, n'offre pas non plus de projections cinématographiques. Le 7ème art reste bloqué faute de salles, celles-ci étant soit en restauration, soit faisant l'objet de contentieux parce qu'elles avaient été louées par le passé à des opérateurs privés. Il n'empêche que sur ce plan, la ville n'affiche pas beaucoup d'intérêt pour le grand écran malgré quelques timides réalisations issues des associations locales. Mais il importe de mettre en exergue l'absence de projection pour les jeunots. Certes, des centres culturels de proximité se lancent parfois dans cette aria, mais les jeunes sont privés de véritables séances cinématographiques qui pourraient leur faire découvrir et aimer cet art. Ce vide sidéral est comblé par les cybercafés qui remplacent le cinéma, le terrain de jeu, le stade, la piscine…voire l'enseignant, les parents. Ces espaces sont en nombre croissant à Constantine. A peine les écoles fermées, les enfants se ruent vers ces lieux où 70 da suffiraient pour télécharger tout ce qu'on veut, bon ou mauvais. Il est rare que les gérants des cybercafés contrôlent tous les jeunes et enfants surfeurs qu'ils accueillent. «Internet est bon et dangereux à la fois notamment pour les enfants assez jeunes. De notre côté, dans notre établissement, d'emblée, on leur interdits tous les sites dangereux et immoraux. C'est aussi valable pour les adultes. Toutefois, la majorité de nos clients viennent pour des téléchargements de jeux et autres divertissements, ce qui ne présente aucun risque», témoigne le propriétaire d'un cybercafé ajoutant que «la Toile n'est pas vraiment ouverte pour bloquer l'accès à tous ces sites interdits. Nous avons procédé sciemment à un verrouillage des fenêtres intempestives et ce, pour éviter aux jeunes accros du net d'être détournés des sites et domaines éducatifs correspondant à leur âge». A ce propos, de nombreux responsables de cybercafés s'accordent à dire que l'accès des enfants à Internet et son usage devraient être surveillés par les parents pour éviter à leurs gosses d'aller dans un monde qui n'est pas le leur, avec tous les dangers que cela représente. La cybercriminalité est une réalité et un véritable fléau que tous les pays tentent d'enrayer. Les cybercafés constituent une bouffée d'oxygène pour les oisifs, mais ils pourraient être source de maux et de dérives dont on ne mesure pas toujours la gravité. Au final, la Toile et ses mondes virtuels comblent les vides laissés par les responsables, à tous les niveaux, qui n'ont toujours pas saisi l'importance des distractions et des jeux dans l'éducation de l'enfant qui, si son monde réel est hostile, rébarbatif, hideux - ce qu'il est-, se réfugie, à son corps défendant, dans des mondes imaginaires, qu'il créerait ou irait chercher sur Internet.