Plusieurs pays refusent depuis quelque temps de ravitailler en kérosène des avions de ligne iraniens dans un acte inédit qui pourrait fortement accentuer la tension entre l'Iran et les Occidentaux. Des appareils des compagnies Iran Air et Mahan Airlines se trouvent confrontés à des difficultés sur des aéroports allemands, britanniques et même émiratis. Téhéran s'indigne. «Refuser de fournir du carburant aux avions de ligne iraniens constitue une violation des conventions internationales», a dit un responsable iranien. Des représailles contre les pays qui priveraient les avions iraniens de carburant ne sont pas écartées. «Nous ferons la même chose aux bateaux et aux avions de ces pays qui nous causent des problèmes», dira un député iranien. L'attitude de ces pays est pourtant difficilement explicable par les pressions politiques visant l'Iran. Le ravitaillement des avions de ligne iraniens n'est pas interdit par les sanctions européennes ou les sanctions de l'ONU et aucune interdiction de ce type n'a été envisagée. Cependant, cette nouvelle défiance visant l'Iran survient après l'adoption de plusieurs mesures par les Emirats arabes unis vis-à-vis de l'Iran. La Banque centrale des EAU a décidé de geler 41 comptes bancaires iraniens se reposant sur une prétendue application des résolutions de l'ONU contre l'Iran. Le Conseil de sécurité des Nations unies a imposé, le 12 juin dernier, une nouvelle série de sanctions touchant l'Iran. Il s'agit de la quatrième batterie depuis décembre 2006. Parallèlement, les Etats-Unis ont renforcé leur régime unilatéral de sanctions. Barack Obama a décrété une loi visant notamment les importations iraniennes de carburants. Dans cette optique, plusieurs pays et entreprises européens ont réduit leurs importations de brut iranien. Des compagnies sont allées jusqu'à arrêter de fournir l'Iran en pétrole raffiné. La décision d'interdire l'espace de l'UE à la flotte d'Airbus A320 et de Boeing B-727 et B-747 de la compagnie Iran Air aurait été prise à l'unanimité des membres du comité de la sécurité aérienne. La raison ? De supposés «problèmes de sécurité», selon la Commission européenne. La décision européenne intervient alors que l'Iran vient d'affirmer être prêt à reprendre, en septembre, les négociations avec les pays du groupe 5+1 sur son programme nucléaire. A condition que les objectifs de ce dialogue soient clairement définis au préalable. L'UE a qualifié de «bonne nouvelle» la déclaration iranienne. Dans une lettre à la chef de la diplomatie européenne Catherine Ashton, le secrétaire du Conseil suprême de la sécurité nationale iranien, Saïd Jalili, a rappelé les trois conditions posées par le président Ahmadinejad, le 28 juin, aux grandes puissances. Il a demandé à Mme Ashton de préciser si «le but des discussions est l'entente et la coopération ou la poursuite de l'hostilité et de la confrontation» envers l'Iran et ses droits légitimes dans le domaine nucléaire. Jalili a aussi demandé aux grandes puissances d'accepter «la logique du dialogue dont la condition est de cesser toute menace et pression», ainsi que de préciser «leur position sur les armes atomiques que possède le régime sioniste». La Russie a demandé une reprise rapide des négociations. Le 28 juin dernier, le président Ahmadinejad avait annoncé le gel pour deux mois des discussions avec les puissances occidentales en réaction aux sanctions adoptées, le 9 juin, par le Conseil de sécurité, suivies d'autres, unilatérales, des Etats-Unis et des pays de l'UE. Le président iranien avait réclamé que les discussions soient élargies à d'autres pays, faisant notamment référence à la Turquie et au Brésil. Ces deux pays ont été cosignataires en mai d'un accord fort significatif avec Téhéran. Bien que proche d'une offre des grandes puissances, cette option a été froidement accueillie par les Occidentaux. M. B.