Photo : Riad Par Karima Mokrani Un rapport récent de l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle classe l'Algérie comme pays émergent dans certaines disciplines de recherche scientifique, en l'occurrence les mathématiques, les sciences des matériaux, la chimie, la physique, l'informatique et l'engineering. Ce qui signifie qu'il y a de réelles compétences en Algérie dans ces domaines. Les responsables du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique s'en félicitent. Ils considèrent la situation actuelle comme acceptable en matière de production scientifique. Il n'en demeure pas moins que le cadre de formation et de recherche, aussi bien dans ces disciplines que dans d'autres, n'a pas encore atteint le niveau requis. «Aujourd'hui, nous sommes dans une situation acceptable puisque les indicateurs montrent une forte croissance de la production scientifique. Toutefois, devrions-nous le reconnaître, même si l'Algérie commence à émerger comme un pays de recherche scientifique, il y a de grosses lacunes dans le développement technologique. C'est-à-dire le passage de cette recherche académique à une valeur ajoutée pour le secteur socio-économique. Il faut qu'il y ait une véritable relation de partenariat entre le secteur socioéconomique et l'université», a souligné, hier à Tipasa, le directeur général de la recherche scientifique et du développement technologique, au ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, M. Abdelhafid Aourag, en marge d'une rencontre pour la mise en place de deux pôles d'excellence en chimie et en informatique. Comment amener les investisseurs des deux secteurs public et privé à investir dans les produits développés à l'université ? C'est autour de cette question que se sont succédé les interventions des chercheurs présents à la rencontre d'hier. Une question qui entraîne une autre : «Comment motiver le chercheur ?». Selon M. Aourag, dans le monde, il y a une moyenne de 1 063 chercheurs pour un million d'habitants. En Algérie, il n'y en a que 560. Soit la moitié de la moyenne internationale. La Tunisie possède 2 280 chercheurs pour un million d'habitants. Pour atteindre la moyenne internationale, l'Algérie doit investir dans la ressource humaine. «Partout dans le monde, il y a l'incitation à faire de la recherche. Il faut revaloriser le chercheur, lui donner le statut de personnalité de haut niveau, mettre à sa disposition les moyens nécessaires pour se consacrer pleinement à son activité… Et comme l'a dit le président Bouteflika, si le chercheur est payé à 1 000 dollars à l'étranger, il faut qu'il perçoive le même salaire ici en Algérie», plaide le représentant du département de Rachid Harraoubia. Et ce dernier de rappeler qu'en Algérie, il y a plus de 38 000 enseignants universitaires, mais seulement 15 900 font de la recherche. Les autres sont démotivés. Ils ne voient pas l'intérêt de faire de la recherche pour percevoir le même salaire que lorsqu'ils ne s'occupent que de leur travail pédagogique. Dernièrement, le ministère a décidé d'introduire une prime de contractualisation de la recherche. C'est une bonne chose, mais cela ne suffit pas, estiment des chercheurs. Pour ces derniers, le grand problème réside dans le manque d'organisation de l'activité elle-même. D'où l'initiative de mettre en place des pôles d'excellence dans toutes les disciplines, comme c'était le cas hier pour la chimie et l'informatique. Un procédé qui consiste à créer un réseau de chercheurs dans un domaine bien précis pour étudier les moyens d'atteindre et de maintenir l'excellence dans la discipline. M. Aourag soutient qu'il est nécessaire de «passer de la formulation des discours à la formulation concrète des projets de société qui valorisent le statut du chercheur dans la société algérienne». Aussi, insiste-t-il, «il faut investir dans la ressource humaine. Tant que nous n'investissons pas assez dans la ressource humaine, nous ne pourrons pas atteindre les standards internationaux».