Photo : S. Zoheir Par Badiaa Amarni L'Etat, à travers le ministère de la Pêche, entend organiser et réguler le marché du poisson caractérisé par une grande anarchie où la spéculation règne à tel point que ce produit est devenu un mets de luxe pour le simple consommateur. La sardine, qui, de tout temps, a été le poisson des petites bourses, est le meilleur exemple de ce dérèglement qui ne profite qu'à tous ces intermédiaires. Son prix atteint des sommets, jusqu'à 400 Da le kilogramme, et quand il baisse c'est aux alentour des 150 à 200 DA. Pour mettre un terme à cette désorganisation qui pénalise le consommateur en fin de chaîne, le ministère de la Pêche et des Ressources halieutiques a pris les choses en mains. Il est en train de réaliser un programme très ambitieux pour développer le secteur. Les objectifs annoncés pour le prochain quinquennat 2010-2014 visent, entre autres, «la restructuration des pêcheries, la préservation de la pêche artisanale, le développement de l'aquaculture, la formation, le renforcement de la recherche scientifique et la réforme législative». Réalisation de 12 halles à marée L'un des points qui attirent l'attention est sans doute celui de la restructuration des pêcheries. Il s'agit, dans le cadre de ce programme quinquennal 2010-2014, de la réalisation prochainement de 12 halles à marée le long du littoral algérien, sur les 47 prévues dans le schéma directeur de développement des activités de la pêche et de l'aquaculture à l'horizon 2025 adopté en 2007. Relevant duprogramme lancé dans le cadre du quinquennat 2005-2009, ces halles à marée sont considérées comme étant le levier de la politique de gestion et de développement du secteur de la pêche et des ressources halieutiques. Ces infrastructures seront réalisées sur investissement public et seront, nous l'espérons, un frein pour la spéculation. Lorsque le poisson arrive dans cet espace, il sera vendu à un mandataire qui sera l'intermédiaire entre l'armateur et le vendeur au détail. Ce qui permettra non seulement d'éviter la vente à plusieurs intermédiaires qui fait généralement flamber les prix du poisson, mais aussi d'effectuer des contrôles permanents de la qualité du poisson pêché, grâce aux vétérinaires qui seront présents sur place. En d'autres termes, cette nouvelle organisation permettra un contrôle du marché et une traçabilité du produit. Actuellement, et de l'avis même de plusieurs responsables en charge de ce secteur, seulement 40% de la production halieutique nationale transite par les halles à marée déjà existantes. Ce qui peut porter préjudice à la santé du consommateur, au Trésor public, de même qu'à l'organisation et la régulation de la commercialisation de ces produits. Cette commercialisation, et du fait de leur manque, se fait justement en dehors de ces halles à marées, avec tout ce que cela peut entrainer comme répercussions négatives sur ces produits de la mer hautement périssables, dans la mesure où les conditions d'hygiène et de salubrité ne sont pas toujours respectées. Il existe au niveau des 14 wilayas à façade maritime, 38 infrastructures portuaires de pêche dont 18 ports de pêche, 8 ports mixtes et 12 abris de pêche. Il existe au niveau de ces infrastructures seulement 11 halles à marées dont la répartition le long du littoral n'est pas homogène. D'où la volonté de mettre en place ces 12 autres structures de ce genre. Les travaux de réalisation, dont les délais vont de 6 à 14 mois, ont déjà été lancés sur trois sites, à savoir le port de Zemmouri (Boumerdès), de Boudis (Jijel) et de Collo (Skikda) sur une superficie réservée allant de 900 m2 à 1 500 m2. Pour ce qui est des autres sites, notamment celui d'El Marsa (Chlef), de Gouraya (Tipasa), de Salamandre (Mostaganem), du nouveau port d'El Kala (El Tarf) et de Tigzirt (Tizi Ouzou), les études de réalisation sont en cours et une opération d'identification d'autres sites a été lancée. Un groupe de travail pour réguler les poissonneries Pour mieux gérer la commercialisation du poisson, un groupe de travail conjoint chargé de la régulation des poissonneries et pêcheries a été récemment mis en place par les deux ministères de la Pêche et celui du Commerce. Composé de cadres des deux ministères, ce groupe a pour mission d'évaluer l'état des poissonneries et de régler les problèmes qui bloquent leur fonctionnement. Il examinera les moyens susceptibles d'assurer une bonne exploitation des poissonneries et proposera des mécanismes innovants pour leur gestion. Il s'agira surtout pour le ministère de la Pêche de mettre un terme à l'anarchie qui prévaut actuellement au niveau des 11 pêcheries réparties à travers le territoire national, et pour le ministère du Commerce d'arrêter la spéculation, en effectuant des contrôles réguliers des prix, afin d'éviter que les commerçants de mauvaise foi ne saignent davantage les poches des citoyens, dont beaucoup ne consomment plus de poisson. B. A. Qu'est-ce qu'une halle à marée La halle à marée est un bâtiment installé sur les quais d'un port de pêche, où le poisson est débarqué et trié selon des normes précises et présenté à la vente. La méthode de vente la plus répandue est celle des enchères publiques à la criée. Le poisson est vendu par caisse ou par lot de caisses. Il en existe quelques-unes en Algérie, mais elles sont loin d'être organisées. Celle d'Alger, par exemple, fonctionne selon la méthode du bouche à oreille qui consiste à chuchoter le prix à l'oreille du mandataire qui acceptera ou rejettera la proposition en hochant la tête. Cette méthode favorise les opérations spéculatives, car les échanges et les négociations échappent à toute transparence. L'organisation d'un maximum de halles à marée dans toute l'Algérie contribuera à freiner la spéculation, si leur gestion adopte la transparence.