«C'est un abandon progressif déguisé et on a l'impression qu'ArcelorMittal se désengage de ces deux mines avant la fin de contrat qui le lie au groupe Ferphos en août 2011 ; les travailleurs sont complètement démoralisés puisque les carrières sont à l'arrêt et on n'extrait plus de minerai, tout ce qu'on charge sur les wagons mis à disposition par la SNTF c'est du tout-venant qu'on achemine vers les hauts fourneaux du complexe sidérurgique d'El Hadjar», dénonce un des mineurs travaillant à l'Ouenza depuis plus d'une trentaine d'années. Effectivement, sur les deux sites miniers, le matériel d'exploitation est à l'arrêt, depuis des mois, on se contente de puiser dans des stocks qui datent des années 50 et dont la teneur en fer se situe entre 32 et 38. C'est ce qui est à l'origine des incidents enregistrés dernièrement dans le haut fourneau dont les tuyères ont été endommagées. Cette importante installation avait dû être mise à l'arrêt pendant 30 heures pour effectuer les travaux de maintenance et de réparation. L'arrêt des deux sites miniers est dû aux pannes à répétition des matériels d'exploitation et du parc roulant immobilisé à 95%, alors qu'un stock de pièces détachées acquises pour plusieurs milliers de dollars périclite dans les magasins. «Ce sont les responsables et les gestionnaires des deux sites établis au siège d'ArcelorMittal Tébessa qui ne veulent pas réagir ou intervenir préférant faire traîner les choses», nous rapporte un contremaître. Poursuivant, il nous apprendra qu'au niveau des quartiers à ciel ouvert Overtic, Chagoura Nord, Chagoura Sud et l'îlot Zerga de l'Ouenza et même sur les chantiers en amont et en aval de Aïn Ezzania de Boukhadra, tout est à l'arrêt et aucune roche à ce jour n'est extraite. Ce qui était encore inconcevable, il y a quelque temps, au temps fort où les sites miniers tournaient à plein régime, est aujourd'hui admis comme étant tout à fait normal au vu de la situation qui prévaut actuellement. En effet, le chantier souterrain 3e et 4e phases de Boukhadra n'a pas connu d'activité depuis un certain temps et cela a été aggravé par un effondrement parce que l'on n'avait pas pris le soin d'étayer les galeries et de prendre les mesures de prévention nécessaires pour éviter un tel incident. Les chantiers ont été ensevelis depuis le niveau 1225 jusqu'au 1300. «Pareille chose n'est pas arrivée depuis près d'un demi-siècle d'exploitation», nous assure notre interlocuteur. Ce qui est sûr, c'est que ArcelorMittal n'a pas tenu ses engagements ayant trait à l'investissement, à la rénovation ou le renouvellement des installations, la situation empire de jour en jour et les sites miniers tombent «en ruine» lentement. La ville minière de l'Ouenza connaît une véritable récession et l'emploi, qui y était florissant, est retombé à son plus bas niveau. «On était 1 500 en 2001 lorsqu'il y a eu la signature de partenariat avec ArcelorMittal, nous affirme un mineur de fond, aujourd'hui on n'est plus que 650 et la saignée continue ; ce faux partenariat n'a jamais été à notre avantage.» Comme si cela ne suffisait pas avec le directeur général d'ArcelorMittal Tébessa par intérim M. Bouchami Abdelouahab, impliqué dans une affaire de malversation, de détournement de deniers publics et de passation de marchés de sous-traitance non conformes à la législation en vigueur, une affaire de 60 milliards de centimes est officiellement traitée par le juge d'instruction près le tribunal d'El Aouinet (Tébessa).Son prédécesseur, M. Benabderrahmane Omar, comme nous l'avions rapporté dans nos précédentes éditions, est sous le coup d'un mandat d'arrêt et est activement recherché par les services de sécurité.