Gardée confidentielle durant des semaines, l'audience accordée ce 3 décembre par le président de la République Abdelaziz Bouteflika à M. Lakshmi Niwas Mittal (LNM), le président-directeur général du groupe indien Arcelor Mittal Annaba, n'avait pas fait l'objet de larges commentaires sur la place économique à Annaba. Cependant, en provoquant une conférence de presse au siège de son institution, 24 heures à peine après cette audience, M. Mebarki confirme l'impression qu'elle était très attendue. Et comment pouvait-il en être autrement ? Durant des semaines, à Mittal Steel El Hadjar, où l'indien est actionnaire majoritaire, les cadres, travailleurs et syndicalistes suspectaient un événement qui devait intervenir. La fébrilité des gestionnaires indiens, notamment de Sanjay Kumar, leur directeur général, indiquait qu'il était important. C'est le même état d'esprit qui avait gagné le milieu des mines de fer à Djebel Onk et Tébessa. Au siège de la direction générale du groupe Ferphos, l'heure est au bilan et à l'étude des opportunités de partenariat. Arcelor Mittal en représente une pour la prospection et l'exploitation du minerai de Ghar Djebilet et autres investissements dans la transformation du phosphate. Une expérience de partenariat entre les deux existe déjà. Elle est matérialisée dans la Société Mittal Steel Tébessa aux actifs détenus à 70% par Arcelor Mittal et 30% par le groupe Ferphos. C'est dire qu'il ne fallait pas des intuitions inspirées d'un économiste pour dessiner le profil de ce que devait être l'ordre du jour de cette conférence de presse. L'offre faite par LNM au président de la République d'acquérir le minerai de Ghar Djebilet ne pouvait pas laisser indifférent le PDG du groupe Ferphos. Tout en prêtant une oreille attentive à toutes les questions des représentants de la presse, M. Mebarki retraçait une à une les performances réalisées par les différentes entreprises de son groupe. En moins de 3 années, ce dernier a réussi à porter sa production de phosphate de 784.000 à 1,5 million tonnes/an en 2006. Il a parallèlement augmenté son chiffre d'affaires de 1384 à 2932 MDA. La progression de ses ventes à l'étranger a eu un effet comptable très positif sur la croissance du groupe. De 2004 à 2006, Ferphos a vu ses activités soutenues et conduites à rester innovantes et productives face à une concurrence internationale intense. L'augmentation de la production et des exportations du phosphate a étonné plus d'un par l'intensité de son rythme. Elle a permis à l'emploi d'amorcer une légère remontée. Autre performance, pour la 1ère fois dans les annales de l'industrie du phosphate en Algérie, les exportations du phosphate (produit marchand) atteignaient de janvier à fin septembre 2006, 1 million de tonnes pour une recette de plus de 40 millions de dollars. A nouveau groupe, nouvelles activités et nouveaux profits, c'est avec à l'esprit ce principe que Ferphos a développé ses positions sur le marché international et consolidé sa présence sur le marché national. L'année 2007 est prévue pour être celle de la concrétisation des grands projets d'investissement et de partenariat. Elle sera précédée par des opérations de privatisation. Ainsi après les mines de la région de Tébessa au profit de Mittal Steel, cette privatisation devrait toucher en 2007 la Société des mines du fer (Somifer) et en 2008, celle de la réalisation immobilière (Ferbat) et courant 2009/2010, l'ensemble du groupe Ferphos. De 8e producteur mondial de phosphate en 2005, Ferphos est passé à 6e en 2006. Il ambitionne à très court terme la 5e place avec une production de 1,2 million de tonnes/an pour une capacité installée de 2 millions de tonnes/an. Et pour peu que Ferphos trouve le partenaire idéal pour la réalisation d'une industrie de transformation, elle atteindra les 4 millions de tonnes. Sa décision de créer en 2007, dans le cadre du partenariat Mittal Steel/Ferphos/SNTF, une société de transport ferroviaire et l'acquisition de 8 locomotives pour le transport rapide de la totalité de sa production en est un signe révélateur. La création d'une autre société pour la production d'engrais simples et composés fait partie de ces grands projets. Le dossier est déjà bien ficelé avec, en novembre 2006, le lancement d'un avis d'appel d'offres et l'achat d'un terrain d'assiette à Bab El Assa (Tlemcen). Toutes ces perspectives de développement et de redéploiement ont pour base, les réserves du minerai de phosphate estimées à 2 milliards de tonnes. Mais faudrait-il que tous ces projets créateurs de quelque 15.000 postes de travail en amont et aval, ne fassent pas l'objet d'un blocage. C'est le cas en ce qui concerne la réalisation à Bellara (Jijel) d'une unité de production de phosphate. Lors de la conférence de presse, M. Mebarki a pointé un doigt accusateur sur le wali de Jijel et la direction des forêts de Guelma. " Le wali de Jijel a estimé utile une enquête commodo incommodo. Il y a quatre années qu'elle a été lancée. Elle n'est toujours pas achevée. Face à la mauvaise volonté de ce commis de l'Etat, nous avons décidé de déplacer ce projet à Oued Fraga dans la wilaya de Guelma. Cette fois c'est la direction des forêts qui tarde à nous remettre l'autorisation de nous implanter. Si cette situation perdure, nos partenaires investisseurs vont s'impatienter. Nous risquons de les perdre", a déploré le patron de Ferphos. Bien qu'il n'ait rien dit sur les opportunités de partenariat avec Arcelor Mittal pour l'exploitation du minerai de Ghar Djebilet, dans les propos de M. Mebarki, tout indique qu'il le souhaite.