Le ministre de la Justice s'est présenté à l'hémicycle pour éclairer les députés sur des questions liées à son secteur. Dont celles concernant l'efficacité de la réforme pénitentiaire, eu égard à la baisse de la criminalité, mais aussi sur la non-construction d'un tribunal au niveau de Aïn Azel, contraignant les citoyens de cette commune à se déplacer jusqu'à Aïn Oulemène, dans la wilaya de Sétif. Les réponses de Tayeb Belaïz ont quelque peu étonné les observateurs. Et pour cause ! Le garde des Sceaux a fait deux annonces. Le déficit cruel en magistrats accusé par son département, ce qui explique qu'il ne peut, de manière responsable, selon ses propos, confier le destin des justiciables à des magistrats débutants, n'ayant pas encore acquis l'expérience et la compétence requises. L'hôte de l'Assemblée ce jeudi, dont la séance était présidée par Messaoud Chihoub, a en fait justifié l'absence de tribunal dans la commune sus-citée. «Nous avons un déficit de 3 000 magistrats», a-t-il indiqué tout en précisant que son département, qui ne formait jusqu'à présent que 300 magistrats par an, allait augmenter le quota pour passer à la formation de 400 magistrats annuellement. En fait, toujours selon le garde des sceaux, l'Algérie a besoin d'au moins 7 000 magistrats pour parer au manque criant dans ce secteur. La deuxième annonce faite par le ministre de la Justice est relative au taux de criminalité. Il a baissé de 31,47% entre 2006 et 2010. Il s'agit surtout de délits de droit commun, à l'image des vols et autres agressions. Il a toutefois déploré l'augmentation de 19% des crimes économiques, liés au commerce informel, à la corruption, au détournement de deniers publics, blanchiment d'argent et de ceux relatifs aux infractions du code de la route depuis l'entrée en vigueur en début d'année du code de la route. Ainsi et malgré la batterie de lois prises, les choses ont peu changé. Voire même la nouvelle législation n'a pas tellement dérangé les délinquants en col blanc. Les scandales financiers continuent à alimenter et à défrayer la chronique nationale malgré les mesures appliquées au niveau des banques et des établissements financiers. Elles semblent apparemment insuffisantes dès lors que le contrôle des écritures n'est pas encore performant de l'aveu même des professionnels du secteur. Il semblerait qu'encore une fois, le problème ne réside pas dans les lois mais dans leur application ou dans leur applicabilité. Notamment lorsqu'elles sont élaborées en méconnaissance du terrain, mais aussi en l'absence de contrôle rigoureux et de compétences intègres. La preuve nous est de nouveau donnée par, pour ne prendre que cet exemple, l'institution dans la loi relative à la prévention et à la lutte contre la corruption adoptée en 2006 de l'instance nationale de prévention et de lutte contre la corruption qui n'est toujours pas fonctionnelle. Le ministre chargé des Relations avec le Parlement nous avait indiqué à l'époque que le président de la République n'arrivait pas à trouver des personnes honnêtes et intègres pour les placer au sein de cette instance. L'ordonnance amendant la loi sus-citée qui doit être adoptée par la chambre basse du Parlement, mardi prochain, introduit une disposition instituant un office central chargé des recherches et de la constatation des infractions de corruption. Elle devra renforcer l'instance de prévention, selon ce que nous a déclaré jeudi le garde des sceaux en marge de la séance plénière. L'office en question relève de la police judiciaire qui a compétence sur l'ensemble du territoire national. U office qui a nécessité, selon M. Belaïz, la formation de juges d'instruction et d'officiers de la police judiciaire. «Nous avons besoin de spécialistes pour les crimes économiques». Mais une question s'impose : comment un office central pourrait-il renforcer l'instance nationale de lutte contre la corruption qui n'existe que sur du papier ?Par ailleurs, concernant l'extradition de Abdelmoumène Khalifa, le garde des sceaux a déclaré que l'Algérie attendait la décision de la Cour suprême britannique qui doit statuer sur le recours introduit par l'ex-golden boy. Quant aux autres affaires, comme celle de Sonatrach, «elles suivent normalement leur cours». F. A.