Cent jours après les élections, la Belgique est toujours sans gouvernement mais, alors que la confiance semblait rompue, socialistes francophones et indépendantistes flamands, vainqueurs des élections législatives du 13 juin, se sont donné un sursis. La Flandre, la région néerlandophone du nord du pays, a fait un triomphe à la Nouvelle alliance flamande de Bart De Wever, un historien indépendantiste de 39 ans qui a fait passer son parti de 3% des voix en 2003 à 28% au soir du 13 juin. Côté francophone, le Parti socialiste d'Elio Di Rupo avait triomphé en raflant plus de 36% des suffrages. Lancées début juillet, des négociations sur une réforme du très complexe système fédéral belge, préalable à la formation d'un nouveau gouvernement pour succéder à celui du chrétien-démocrate flamand Yves Leterme, avaient débouché en août sur un accord de principe. Selon les sept partis associés à la négociation, les régions Flandre, Wallonie et Bruxelles-Capitale devraient à l'avenir disposer d'une plus grande autonomie fiscale et de compétences accrues, tout en restant «solidaires» et en évitant la concurrence déloyale. Il était également prévu que la région de Bruxelles, en difficulté financière, verrait ses caisses renflouées de plusieurs centaines de millions d'euros par an. Mais ce compromis avait volé en éclats fin août en raison du manque de confiance qui s'est installé entre le PS et la N-VA durant l'été. Le parti de Bart De Wever soupçonnait les francophones de manquer de sincérité dans leur volonté de réformer l'Etat, tandis que, côté francophone, on reprochait à la N-VA de saboter la négociation en remettant sur la table de nouvelles exigences à chaque fois qu'un accord paraissait à portée de main. Ces dernières semaines, l'hypothèse d'un «plan B», l'éclatement de la Belgique, a de plus en plus été évoqué par de hauts responsables francophones. Alors que la rupture semblait consommée, Bart De Wever et Elio Di Rupo ont toutefois décidé, lundi, à l'issue d'une réunion de quatre heures, de relancer les négociations pour éviter ce que le président du PS a qualifié récemment de «chaos politique». Concrètement, des représentants des sept partis impliqués devaient plancher dès hier sur une révision de la «loi de financement» qui organise les transferts financiers entre l'Etat fédéral et les régions belges. Les négociations reprendront en parallèle sur les autres aspects de la réforme de l'Etat, notamment l'épineuse question de l'arrondissement électoral bilingue français-néerlandais de Bruxelles-Hal-Vilvorde, pomme de discorde depuis des années entre Flamands et francophones.