L'Etat algérien consacre annuellement un lourd budget d'investissement au profit de l'université et de l'enseignement supérieur de manière générale. Au jour d'aujourd'hui, le secteur offre un cumul de 1 300 000 places pédagogiques et 550 000 lits d'hébergement. En matière d'encadrement, les statistiques officielles mentionnent 40 977 enseignants, soit en moyenne 1 encadreur pour 28 étudiants. Cela va sans détailler tous les efforts dédiés à l'équipement des laboratoires et des ateliers de recherche, le renouvellement incessant de la documentation, la généralisation des techniques nouvelles de la communication et de l'Internet, ainsi que la prise en charge des stages de formation et de perfectionnement à l'étranger. Une dépense publique colossale. En retour, l'université ne participe pas suffisamment au développement du pays. En tout cas sa contribution concrète reste bien en deçà de l'attention croissante dont elle ne cesse de bénéficier. Ce constat est partagé par les dirigeants politiques et les universitaires, eux-mêmes. Ces dernières années, la politique du gouvernement insiste beaucoup sur cette question essentielle. Les réformes successives introduites dans ce secteur visent justement à promouvoir l'excellence à travers une réelle insertion de l'université dans le monde productif. Le système LMD (licence-master-doctorat), qui vient d'être élargi à toutes les spécialités, ambitionne de mettre la compétence et le savoir-faire au cœur même de l'acte pédagogique. Délaissant quelque peu le volet théorique et académique, en suscitant d'ailleurs les critiques acerbes de certains syndicats d'enseignants et de quelques organisations estudiantines, cette nouvelle approche se propose d'effacer progressivement les cloisons qui séparent toujours le monde de l'entreprise de l'environnement universitaire. Ainsi, disent les défenseurs du système LMD, l'étudiant verra une partie de sa scolarité se confondre avec l'activité productive, le professeur y exercera comme un expert et comme un manager, et le chercheur pilotera des projets générateurs de richesses et sera le moteur de la puissance de son établissement grâce à son apport en sciences fondamentales. «Les chercheurs seront la pierre angulaire de cette nouvelle configuration parce qu'ils intégreront les logiques de marché de manière spécifique, d'autant que la recherche fondamentale fonctionne selon une horloge tout à fait différente de celle qui règle la cadence des entreprises. Il s'agit là d'un changement profond dans les comportements et dans les méthodes de travail aussi bien à l'université que dans l'entreprise», explique Djoudi Merabet, le recteur de l'université de Béjaïa qui compte parmi les promoteurs les plus convaincus de ce système du LMD. La promulgation fin 2009 du statut particulier de l'enseignant chercheur et la récente publication d'un décret exécutif portant sur les conditions d'exercice des activités de recherche et les modalités de leur rétribution œuvrent dans ce même sens avec, en sus, le désir de limiter la fuite des cerveaux et des compétences vers l'étranger. Afin d'enraciner davantage ce critère de l'excellence, la tutelle a initié, ces deux dernières années, 9 écoles nationales préparatoires et 17 pôles d'excellence, afin d'accueillir les meilleurs bacheliers à l'échelle nationale pour des formations de qualité dans des filières comme les sciences techniques, les sciences économiques et de gestion, les sciences commerciales et les technologies. L'enjeu fondamental porte sur la préparation de nouvelles élites qui seraient capables de produire des solutions durables aux entreprises et aux institutions algériennes dans le cadre des mutations internationales toujours en cours. Un challenge, qui au-delà des moyens matériels à mettre en œuvre, impose beaucoup de sérieux et de doigté aux responsables et aux partenaires de l'université. L'innovation, qui va de pair avec la recherche, est à ce prix. Le sérieux et l'intégrité sont, en toute chose, la clé du succès. K. A.