Entretien réalisé par Hassan Gherab LA TRIBUNE : D'abord, quel est le but de votre visite en Algérie ? James Berisha : L'objectif de ma visite en Algérie est d'informer les citoyens comme les responsables de cet accueillant pays de la situation et de la récente histoire du Kosovo et du peuple kosovar, et, de manière non officielle, demander à l'Algérie de reconnaître l'indépendance du Kosovo. Qui a eu cette idée d'un tour du monde pour le Kosovo ? C'est mon idée. Je suis né au Kosovo et toute ma famille y vit encore. Quand la guerre a commencé, j'étais aux Etats-Unis mais tout mon être était au pays, et mon cœur se déchirait de voir mon pays détruit et mon peuple souffrir des atrocités et des violences qu'aucun mot ne peut décrire. Après la mort de mon père, tué durant la guerre, j'ai décidé de faire quelque chose, de manière pacifique, pour aider mon pays - à la mémoire des nombreuses personnes qui, comme mon père, ont perdu la vie durant la guerre. Voyez-vous, le peuple kosovar est très pacifique, aimable et hospitalier. Je veux que le monde le sache. Nous ne sommes pas un peuple agressif, violent et guerrier. Le projet est-il soutenu par le gouvernement du Kosovo, une ONG nationale ou internationale ou des personnalités ? Du tout. Mon voyage autour du monde n'est pas une mission politique. Il est soutenu par les citoyens du Kosovo. Si vous demandez si le gouvernement du Kosovo ou une quelconque ONG m'ont sponsorisé, ma réponse est non. Ma mission n'est ni financée ni officiellement soutenue par les responsables politiques du Kosovo. Ils sont au courant de mon voyage autour du monde et ils me soutiennent, mais pas de manière officielle. Qui finance alors ce tour du monde ? Ce sont les dons de différents citoyens qui, à l'orée du XXIe siècle, ne veulent pas voir le Kosovo isolé. Chacun donne ce qu'il peut pour aider la mission et lui permettre de se poursuivre. Avez-vous eu des problèmes pour mener votre action ? Si oui, lesquels ? Planifier une mission comme celle-là est plus dure qu'il n'y paraît. Et j'ai donc eu différentes difficultés, mais j'ai pu les surmonter grâce à l'aide de nombreuses personnes et responsables que j'ai rencontrés tout au long de mon périple. Et des aides et des soutiens… Oui ! Là où je suis allé, j'ai rencontré, comme ici chez vous, des personnes très intéressées d'en savoir plus sur le Kosovo et son peuple. Et cet intérêt, pour moi, est en soi un soutien et un encouragement plus que suffisants. Qu'attendez-vous de votre action ? Je ne fais que ce que je sais faire le mieux : voler. Et avec mon petit avion, je parcours le monde pour dire à tous les peuples de la terre que le peuple kosovar a besoin que son pays soit reconnu par tous les Etats et instances internationales. Si j'achève le tour du continent africain et que je réussisse à faire passer ce message à tous les Africains et à les convaincre de reconnaître le Kossovo en tant que pays indépendant et les Kosovars en tant que peuple libre, je pourrai alors dire que j'ai réussi ma mission. Vous avez déjà visité de nombreux pays. Croyez-vous que le message que vous portez soit passé ? Je pense que oui… Je l'espère Que dites-vous aux gouvernements et citoyens du monde que vous rencontrez ? La majorité des gouvernements connaissent déjà la récente histoire de mon pays et de la région. Je vais juste au-devant d'eux pour leur rappeler que le peuple kosovar a besoin de voir que ses efforts pour construire son pays et le voir indépendant soient reconnus dans le monde. Je suis porteur d'un message du peuple et non d'un message politique. Je suis venu en tant que citoyen vers d'autres citoyens, avec un message d'espoir. Les citoyens des pays que j'ai visités l'ont bien compris parce qu'ils ont, eux aussi, des problèmes chaque jour. Les citoyens du Kosovo ne demandent rien, juste les droits humains basiques d'être libres et reconnus par le monde. Revenons au Kosovo. Que pensent les Kosovars de votre action ? Pensent-ils qu'elle apportera quelque chose à leur pays ? Quoi ? Le peuple du Kosovo espère que je réussirai à faire savoir au monde en général et aux pays africains en particulier qu'il y a quelque part un pays qui s'appelle le Kosovo et qui attend d'être reconnu comme tel. Quelle est la situation actuelle du Kosovo ? Le Kosovo est le plus jeune pays et la plus jeune démocratie dans le monde. C'est un pays qui reconstruit lentement mais sûrement son économie et ses infrastructures, après de longues et sombres années de guerre. Quelles sont les relations du Kosovo avec ses voisins et le reste des pays du monde tant occidental que musulman ? Le Kosovo est, historiquement, un pays séculaire. 98% de sa population est musulmane. Mais le Kosovo est un bel exemple de respect des droits de l'Homme et de la liberté de culte. Il n'y a aucune discrimination entre les citoyens du Kosovo ni sur le plan social ni sur les plans culturel, cultuel, administratif ou politique. Le peuple kosovar est très pacifique et c'est la raison pour laquelle le pays a de bonnes relations avec le reste des pays, y compris ceux de la région avec lesquels il a une longue histoire conflictuelle. Malheureusement, paradoxalement, nous n'avons pas beaucoup de contacts avec les autres pays musulmans. Après la guerre, nous espérions que ces derniers nous soutiendraient plus que les autres, cela n'a pas été le cas. Et c'est vraiment déplorable de voir que la majorité des pays qui n'ont pas reconnu l'indépendance du Kosovo sont des pays musulmans. Aujourd'hui, nous avons plus que jamais besoin de leur soutien. Quels atouts (économiques, culturels, sociaux) a le Kosovo pour préserver son indépendance et se développer ? Le Kosovo est petit, mais il a suffisamment de ressources naturelles et humaines pour se construire et se développer. Le Kosovo a la population la plus jeune en Europe. 50% de la population a moins de 35 ans. C'est un véritable et important potentiel qui n'a besoin que d'opportunités pour amorcer le développement du pays. Comme voyez-vous l'avenir du Kosovo ? Un pays où la paix règne et où la démocratie garantit la liberté et les droits humains à tout un chacun. Y a-t-il d'autres actions ou projets prévus par vous ou d'autres pour soutenir «Flying for Kosovo» et aider le Kosovo à prendre sa place dans le monde ? Je suis encore loin du terme de ma mission. «Flying for Kosovo» est un projet de longue haleine. La première étape de mon périple à travers le monde était les Etats-Unis, le Canada et l'Amérique du Sud. L'Afrique est ma seconde mission qui ne s'arrêtera que lorsque mon message, le message du peuple kosovar, sera parvenu et compris. Enfin, qu'avez-vous à dire aux Algériens ? J'aimerais que tous les Algériens sachent que le Kosovo est un beau pays, qu'ils viennent et qu'ils le visitent et le découvrent par eux-mêmes ! Toute personne, de quelque pays qu'elle soit, est la bienvenue chez nous. Le Kosovo n'impose de visa à personne. On peut venir librement et voir ! H. G. * Traduit de l'anglais par la rédaction