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Un diagnostic et un traitement précoces s'imposent
Le professeur Ahmed Benzaoui, chef du service rhumatologie au CHU d'Oran
Publié dans La Tribune le 21 - 11 - 2010

De notre envoyée spéciale à Atlanta, aux Etats-Unis
Amel Bouakba
Un diagnostic encore trop souvent tardif, des douleurs intenses, une maladie handicapante et invalidante, la polyarthrite rhumatoïde (PR) continue d'être une maladie peu connue en Algérie. Pourtant, le nombre de malades ne cesse d'augmenter, un peu partout à travers le pays, avertit le professeur Ahmed Benzaoui, chef du service rhumatologie au CHU d'Oran. Rencontré en marge du Congrès de l'ACR 2010 (American College of Rheumatology) tenu à Atlanta aux Etats-Unis, du 6 au 11 novembre dernier, ce spécialiste parle de l'ampleur d'une maladie qui fait face à un manque de sensibilisation, la polyarthrite rhumatoïde qui touche la femme relativement jeune. «90% des femmes, souvent jeunes, (généralement à partir de 40 ans), paient un lourd tribut», dit-il. Statistiquement parlant, entre 0,5 à 1% de la population mondiale est atteinte de PR. En Algérie, 1% des Algériens en sont touchés, soit environ 300 000. «Lorsque la maladie s'installe, la majorité des patients voient leur vie complètement bouleversée», estime le professeur Ahmed
Benzaoui qui précise : «C'est une maladie dont on ne connaît pas les causes, mais on connaît, en revanche, ses mécanismes d'action. C'est ce qui est d'ailleurs à l'origine des traitements, dont les thérapies ciblées, notamment des biothérapies qui ciblent le dysfonctionnement cellulaire des malades.» Ainsi, dit-il, «les propres éléments de défense de l'organisme pour une raison que l'on ignore deviennent des agresseurs, d'où l'apparition des inflammations, des gonflements et autres manifestations». La PR débute par des douleurs et gonflements surtout au niveau des articulations des mains, ce qui génère un handicap fonctionnel et entraîne des répercussions énormes sur la qualité de vie des patients. Les premiers signes cliniques peuvent s'étaler jusqu'à trois mois. L'idéal est de faire un diagnostic durant cette phase car le malade a plus de chances de voir sa maladie se stabiliser (rémission) ; par contre, si ça s'étend, la maladie passe à la chronicité», explique ce spécialiste. «D'où l'importance du diagnostic précoce», souligne-t-il. En fait, prévient-il, «si on laisse évoluer davantage la maladie sans prise en charge adéquate et rapide, d'autres organes risquent d'être affectés (cœur, rein, œil, poumon…). Evoquant le service de rhumatologie du CHU d'Oran, il dira que c'est la structure de tout l'Ouest qui accueille des malades de toute la région présentant des affections rhumatismales parmi lesquelles la PR figure en première position. Quelque 2 000 malades y sont répertoriés, majoritairement des femmes qui viennent consulter tardivement, ce qui complique la prise en charge. «Le diagnostic doit être aussi précoce que possible, pour permettre une prise en charge immédiate du patient car le fait de détecter rapidement la maladie augmente considérablement l'efficacité de la thérapeutique. Cependant, le diagnostic précoce n'est pas facile car les symptômes observés peuvent correspondre à d'autres maladies.» Ce que nous expliquera le professeur Benzaoui : «Le diagnostic repose ainsi sur la présence de plusieurs signes : atteintes inflammatoires de plusieurs articulations mais
également des signes biologiques et radiologiques. Ainsi, une prise de sang permet d'identifier des signes d'inflammations articulaires et de rechercher des facteurs immunologiques de la maladie. Il existe aussi un test biologique qu'on appelle ACPA (anticorps antipeptides cycliques citrullinés). Certains laboratoires spécialisés en Algérie le réalisent, notamment au niveau de l'Institut Pasteur d'Algérie (IPA). Il s'agit là d'un élément biologique indispensable dans le diagnostic de la PR. Il y a lieu de noter, en outre que la radiographie ne permet pas toujours d'éclairer le diagnostic car, au début de la maladie, il n'existe aucune anomalie visible à la radiographie des articulations. Les signes radiographiques n'apparaissent que lorsque l'inflammation a induit des lésions du cartilage articulaire. D'autre part, l'échographie articulaire permet de détecter les érosions osseuses qui ne sont pas encore observées à la radiographie mais malheureusement très peu de centres la pratiquent en Algérie. De même, les ponctions articulaires et biopsies sont indispensables pour le diagnostic de la maladie», indique le professeur Benzaoui. Ce dernier insiste longuement sur la prise en charge urgente de la maladie. La qualité de cette prise en charge repose essentiellement sur un diagnostic et un traitement précoces, affirme-t-il. D'autant que les médecins disposent désormais de médicaments capables de stopper l'évolution de la maladie. Depuis quelques années, dit-il, «le traitement de la polyarthrite rhumatoïde a été révolutionné par l'arrivée de nouveaux traitements, notamment les biothérapies (thérapies ciblées)». Ainsi, avec ces nouvelles armes thérapeutiques, le rhumatologue ne se contente plus de soulager des symptômes, il peut désormais éviter aux malades les destructions articulaires. C'est ce qu'on appelle la rémission. Actuellement, l'Algérie compte quelque 300 rhumatologues bien armés pour lutter contre la PR et assurer une meilleure qualité de vie aux malades grâce aux biothérapies, des traitements plus efficaces et plus ciblés. Le congrès mondial de rhumatologie d'Atlanta a été l'occasion de passer en revue l'avancée de la recherche et d'évoquer ces nouvelles molécules, dont le tocilizumab, qui offrent de nouveaux espoirs pour bloquer la maladie et permettre une vie quasi normale aux patients atteints de PR.


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