L'Algérie, dont les besoins en matières premières alimentaires ne cessent d'augmenter, a enregistré ces dernières années une forte croissance de ses importations. La facture alimentaire s'est, en effet accrue de manière considérable pour dépasser les 7 milliards de dollars. Face à cette situation et dans le but de diminuer la dépendance de l'Algérie envers des importations, le gouvernement a mis en place des mécanismes d'encouragement de la production locale. En plus de la promulgation de nouvelles lois et la mise en place de nouveaux dispositifs d'aide et de soutien à l'activité agricole, le gouvernement a opté, pour la mise en application d'un plan d'intensification de la production céréalière, ainsi que le lancement, à partir de l'année dernière, des contrats de performance pour l'ensemble des régions du pays. Le ministère de l'Agriculture et du Développement rural estime que la première action vise donc à améliorer la production céréalière dont la filière a été négligée pendant de nombreuses années. La hausse vertigineuse des prix des céréales sur le marché international entre 2007 et 2008 a poussé le gouvernement à réfléchir sur d'autres issues. Ainsi, après avoir opté pour la conversion agricole, c'est-à-dire de la céréaliculture à l'arboriculture dans le cadre du Plan national de développement agricole (PNDA) lancé à l'époque de Saïd Barkat, les responsables concernés ont de nouveau décidé de reprendre «le chemin des céréales». Sécurité alimentaire du pays oblige même si les prix des céréales ont connu un fléchissement ces derniers temps, et que les dernières récoltes ont enregistré des records inédits. A présent, et afin de relancer la filière des céréales, des mesures ont été prises par le département de Rachid Benaïssa. Ces mesures se traduiront sur le terrain par la sécurisation de la production à travers l'irrigation d'appoint avec un objectif d'arriver à irriguer 350 000 ha dans les trois prochaines années contre 30 000 ha actuellement. Et pour inciter les céréaliculteurs à adhérer à ce plan d'action, les pouvoirs publics se sont engagés à les accompagner financièrement et ce, dans le cadre du programme leasing que gère la Banque de développement agricole et rural (Badr). A ce sujet, il est utile de rappeler la mise en place en 2008 du crédit «Rfig» au bénéfice des céréaliculteurs, des crédits sans intérêts. Toujours dans l'objectif d'assurer la sécurité alimentaire, des contrats de performance liés au renouveau agricole et rural ont été paraphés dimanche à Constantine par les directeurs des services agricoles (DSA) et les conservateurs des forêts de 14 wilayas de l'est du pays en présence du ministre de l'Agriculture et du Développement rural, M. Rachid Benaïssa. Les mesures incitatives de l'Etat Les observateurs de la scène économique ont dû remarquer qu'après avoir tourné le dos au secteur privé le gouvernement a décidé de le soutenir pour développer l'agriculture, particulièrement les céréales. En effet, la volonté d'associer les opérateurs privés est clairement affichée, à maintes reprises. La semaine dernier, depuis Annaba, le ministre de l'Agriculture et du Développement rural a fait savoir qu'«il est ici [lors du séminaire sur la promotion de la qualité du blé dur organisé par le groupe Benamor NDRL], pour exprimer la volonté politique du gouvernement de booster toute la filière vers le haut». «Je suis heureux de voir tous les acteurs se rencontrer et rechercher la mise en synergie qui nous manquait jusque-là», a ajouté le ministre. Pour ce dernier, le président de la République lui « a donné 5 ans pour faire bouger les choses dans les céréales». «Le poids de vos investissements vous oblige à rechercher la durabilité de la filière. Qu'allons-nous faire demain si nous connaissons un nouveau pic des prix sur le marché mondial comme en 2007 à 800 dollars la tonne ?», s'est interrogé le ministre de l'Agriculture qui a rappelé que le président Bouteflika a décidé de maintenir la subvention de 45 000 dinars par tonne en faveur des producteurs nationaux de blé dur en dépit du retour à la normale des cours mondiaux du blé en 2009 et en 2010 entre 250 dollars et 300 dollars la tonne. Pour le représentant du gouvernement, l'enjeu est de taille : il s'agit de la sécurité alimentaire du pays. «Sans souveraineté nationale, on ne peut pas lever le drapeau. Hisser très vite les rendements du blé dur à 25 quintaux l'hectare, devenir un acteur du blé dur à l'international, moi je dis que c'est possible», a rappelé Rachid Benaïssa. Réseau Benamor : une expérience à méditer En plus des différentes initiatives et des mesures incitatives de la part du gouvernement, certains opérateurs privés veulent être des véritables partenaires dans ce nouveau défi. Car, si on regarde simplement du côté de certains grands pays agricoles, les liens entre agriculteurs, transformateurs et les pouvoirs publics sont très étroits. D'où leurs excellentes récoltes annuelles. Les spécialistes en la matière soutiennent que la nouvelle démarche du groupe Benamor, consistant en la création d'un réseau regroupant toutes les parties concernées afin de produire des quantités suffisantes et de qualité de blé dur, même si elle est la première du genre en Algérie, s'inspire des expériences des autres pays. L'expérience réussie de ce groupe dans la tomate industrielle a séduit plus d'un. En effet, en huit ans de travail avec les agriculteurs, ce groupe a réussi à augmenter les rendements de 15 tonnes à l'hectare à 60 tonnes à l'hectare, et à sauver la filière tomate qui allait disparaître. Rachid Benaïssa a félicité publiquement l'initiateur du projet. Il a même exprimé le soutien du gouvernement et dit que l'amélioration du rendement à l'hectare et de la qualité du blé, les deux grandes tares de la céréaliculture algérienne, est désormais possible. Un message destiné également aux autres transformateurs afin de méditer et rééditer le groupe Benamor. Car il y va, en fin de compte, de la sécurité alimentaire du pays. S. B.