En dépit de la croissance économique enregistrée par le secteur, l'Algérie a multiplié ses importations. A voir les sommes colossales allouées au secteur de l'agriculture depuis ces dix dernières années, une question s'impose: quel est le compartiment qui ne fonctionne pas bien dans ce secteur? Car il faut le dire, il y a quelque chose qui ne tourne pas ou fonctionne mal dans le monde agricole où de l'argent a été investi, mais dont les résultats sont en deçà des attentes. Il ne s'agit pas là d'un constat d'un simple citoyen, mais de la remarque faite par le chef de l'Etat, Abdelaziz Bouteflika, lui-même. Le président de la République a témoigné que les progrès enregistrés par la relance du secteur agricole «ne sauraient satisfaire encore», a-t-il déclaré lors d'un discours prononcé à Biskra. Dans ce contexte, il y a lieu de s'interroger sur le fait que les réalisations du secteur ne sont pas à la hauteur des moyens mis par l'Etat auprès des fellahs. La première interrogation concerne le surendettement des agriculteurs. Il y a dix ans, les dettes des fellahs étaient à hauteur de 20 milliards de DA environ. Le chef de l'Etat a procédé en 2001 au dégrèvement de 14 milliards de DA. Alors qu'on s'attendait à un grand réveil du secteur, voilà que les agriculteurs enregistrent des dettes effarantes. En l'espace de sept ans, l'Etat a recensé des dettes estimées à 41 milliards de dinars! Le hic, la production a régressé. En dépit de la croissance économique enregistrée par le secteur, qui est à hauteur de 6% durant toute la dernière décennie, l'Algérie non seulement n'arrive pas à assurer les besoins alimentaires de sa population, mais elle a multiplié ses importations. Comme en témoigne la facture alimentaire qui a triplé ces cinq dernières années en passant de 3 milliards de dollars en 2003 à huit milliards de dollars en 2008. «La sécurité alimentaire du pays demeure excessivement dépendante de l'extérieur, avec une facture des importations alimentaires qui a évolué de moins de 3 milliards de dollars en 2003 à près de 8 milliards de dollars l'année dernière, ce qui reflète surtout une hausse, particulièrement marquée dans nos importations de céréales et de lait», a déclaré le Président Bouteflika. L'autre fait marquant ce secteur ces dernières années, est la flambée des prix des fruits, légumes et viandes ainsi que la rareté de certains produits. Il suffit juste de se rappeler le scandale de la pomme de terre qu'on importait du Canada. Les prix des fruits et légumes s'envolent à l'approche de la moindre occasion. Egalement, l'Etat a eu recours à l'importation de la viande congelée. Les producteurs de lait en sachet et dérivés ne cessent de demander d'augmenter les prix et de nombreux mouvements de grève ont été enregistrés l'année dernière notamment. Cet état de fait est expliqué par l'insuffisance de la production nationale de lait. On ne parvient pas à produire des quantités nécessaires aux besoins de la population algérienne. La faute n'est pas à l'Etat, qui doit assumer quand même sa part de responsabilité. Ce secteur a bénéficié, lors de cette période, de près de 350 milliards de DA directement engagés sur le budget de l'Etat. Si l'Algérie n'a pas subi les conséquences de la crise financière mondiale, c'est parce que l'Etat est venu à la rescousse. Le Trésor public a débloqué près de 190 milliards de DA en subventions pour stabiliser les prix du lait et des semoules. C'est dans ce contexte qu'on s'est interrogé sur le surendettement des agriculteurs. Le paradoxe est le suivant: l'Etat débloque des aides et prend des mesures importantes et la production nationale reste insuffisante alors que les agriculteurs s'endettent et les factures alimentaires augmentent! Résultat: l'Etat arrive encore à la rescousse pour subventionner quelques produits ou éponger carrément les dettes des agriculteurs.