De notre correspondant à Bouira Nacer Haniche Après deux journées d'émeutes et de casse, les citoyens de Bouira se sont réveillés, hier samedi, pour découvrir l'ampleur des dégâts occasionnés par la colère des jeunes révoltés contre les hausses subites de certains produits de large consommation, dont le sucre, l'huile et la farine. Durant la soirée de vendredi dernier, les émeutes sont montées d'un cran comme si les prêches et les conseils donnés lors de la prière étaient de simples paroles en l'air. La cité des 140-Logements et d'autres quartiers de la ville de Bouira ont vécu des scènes d'émeute inoubliables. A la suite de ces confrontations, les révoltés ont saccagé les sièges de l'OPGI, la poste et l'antenne APC, déchirant et cassant tout ce qui se trouvait sur leur passage. Ils se sont également attaqués au siège de la kasma du FLN. Nous avons appris que les forces antiémeutes ont arrêté deux émeutiers, alors qu'aucune information n'a filtré sur le bilan des blessés. Dans les autres localités de la wilaya, la révolte se résume à quelques échauffourées et à la fermeture de la route à plusieurs endroits, sans aucune intervention des services de la gendarmerie. Vers El Esnam, des jeunes venus d'Ahl Ksar ont fermé l'autoroute à l'aide de pneus brûlés et autres pierres ; ils ont été pourchassés par les forces antiémeutes dépêchées sur les lieux depuis Bouira à coups de bombes lacrymogènes. A Aïn Bessem et Raouraoua, les jeunes s'en sont également pris au siège de l'APC. A Lakhdaria, les jeunes ont bombardé de pierres le siège de l'APC, ainsi qu'une entreprise privée de transport d'étudiants en mettant le feu à deux bus stationnés près de la Garde communale. A Bir Ghbalou, Aïn Laloui et Kadiria, plus exactement à Taliouine, les jeunes sont également sortis pendant la nuit pour fermer les routes à l'aide de pneus brûlés, de troncs d'arbre et de pierres. Les manifestants criaient à qui voulait les entendre qu'ils en ont marre du chômage et de la cherté de la vie qu'ils subissent de plein fouet. «Je ne peux plus me permettre un paquet de cigarettes et puis avec la hausse des prix de l'huile, cédée à plus de 800 DA le bidon de 5 litres, et du sucre qui s'est vendu aujourd'hui à 120 DA le kilogramme, nous ne pouvons plus vivre», fulmine un jeune. Plus loin au quartier Ecotec, l'édifice de la direction générale de l'OPGI et le siège de la poste ont été la cible des émeutiers, ce qui a déclenché la consternation des adultes, notamment des fonctionnaires. Cependant, en dépit de ces multiples interventions, aucune arrestation n'a été enregistrée parmi ces jeunes émeutiers. Hier, pendant la journée, un calme régnait dans toutes les communes de la wilaya de Bouira.Mais comment calmer ces jeunes en colère ? Plusieurs explications sont avancées. Ce sont des chômeurs marginalisés ; ces jeunes dont la moyenne d'âge est de 20 ans et qui n'ont aucune perspective d'avenir après avoir quitté les bancs de l'école échappent au contrôle de leurs parents. En tout état de cause, nombre de citoyens ont confié n'avoir jamais assisté à ce type de révolte, même pas en 1988 ou en 2001. Les contestations ont commencé à l'époque par des marches encadrées et l'affrontement n'était intervenu que lorsque les forces de l'ordre ont interdit la manifestation.