Une caravane de solidarité avec les victimes des essais nucléaires français à Reggane (13 février 1960) a été lancée hier en direction d'Adrar. Le signal de départ de cette initiative, menée par l'association El Amel d'aide aux personnes atteintes de cancer (CPMC), a été donné, hier, par le président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'Homme (CNCPPDH), Farouk Ksentini, en présence de la présidente de cette association Amina Kettab. Cette initiative, qui a été lancée à l'occasion du 51e anniversaire des essais nucléaires français de Hamoudia (Reggane) et de la Journée internationale de lutte contre le cancer, vise à «pousser les autorités françaises à reconnaître les crimes coloniaux commis à Adrar et à réfléchir à indemniser les Algériens qui souffrent encore des effets de ces essais, plus d'un quart de siècle après», a affirmé Farouk Ksentini lors d'une conférence de presse. La présidente de l'association El Amel, quant a elle, a rappelé la triste réalité de la progression effarante du cancer en Algérie, qui atteint plus de 40 000 nouveaux cas annuellement - la majorité est recensée au Sud algérien -, dont les causes n'en sont pas moins liées aux essais nucléaires français dans la région. Au programme de cette caravane qui sillonnera du 11 au 13 février la région figurent, en effet, des rencontres de sensibilisation dans les communes d'Adrar et de Reggane, en direction de la frange féminine, sur l'importance du dépistage précoce des cancers de l'utérus et du sein et les voies de leurs traitement et prévention. Cette caravane de solidarité, qui regroupe plus de vingt-deux professeurs en cancérologie, cadres médicaux, chefs de service de grands hôpitaux d'Algérie, des experts étrangers et professeurs en droit, ainsi, que des représentants des médias, sera également l'occasion de débattre de la question des essais nucléaires effectués par la France coloniale dans la région de Reggane, selon les organisateurs. Elle sera précédée par une rencontre scientifique sur l'oncologie, consacrée au corps médical exerçant à Adrar. Les scientifiques et juristes auront à débattre des cancers radio-induits et à démontrer de la relation de cause à effet entre les radiations nucléaires et les cancers qui se sont déclarés dans la région, en vue de l'introduction d'une action judiciaire visant à obtenir de la France la reconnaissance des crimes et l'indemnisation des victimes, ont déclaré les organisateurs. Il s'agit d'obtenir la révision de la loi sur l'indemnisation des victimes qui, par les conditions qu'elle impose, notamment en limitant les indemnisations aux seules personnes ayant vécu les essais, exclut les victimes algériennes. Me Ksentini dira à, ce sujet, que s'il est reconnu que le cancer se transmet génétiquement : «Donc, il est impératif de réviser cette loi pour étendre les bénéfices aux générations après les essais et celles qui viendront après.» D'où l'intérêt du travail scientifique qui sera entrepris et qui sera sanctionné par un appel à la conscience universelle de tous les peuples ayant vécu la même situation afin de réviser cette loi, a-t-on affirmé. Cette caravane, qui comporte un volet relatif à l'assistance médicale et matérielle, sera l'opportunité pour la tenue d'une journée scientifique. Elle est programmée au profit des enseignants et médecins locaux et sera ponctuée par un protocole d'accord entre l'association El Amel et celle dite du «13 février» de Reggane pour la prise en charge des malades cancéreux. Cinq autres protocoles seront signés, en outre, avec la Direction de la santé d'Adrar, en vertu desquels seront définis les cas des malades à traiter dans les hôpitaux d'Alger et de Tizi Ouzou, a indiqué Layachi Daadoua, parlementaire et membre de la commission. Enfin, les membres de la délégation procéderont à la distribution des chaises roulantes au profit de 56 personnes, dont un enfant handicapé dans la commune de Reggane, ainsi que le matériel destiné aux hypertendus et diabétiques. A. R.