Les résultats d'une étude menée par Tim Nawrot de l'université Hasselt à Diepenbeek (Belgique) et ses collègues belges et suisses, publiés en ligne par la revue scientifique The Lancet, risquent de faire battre la chamade au cœur de toutes les personnes vivant dans des milieux pollués. Car, en voulant mesurer l'importance respective des différents facteurs connus pour déclencher un infarctus du myocarde, ces chercheurs ont mis en évidence le rôle majeur joué par la pollution atmosphérique. Déjà, une récente étude nord-américaine avait conclu qu'une augmentation de l'exposition de 10 µg/m⊃3; aux particules de 10 microns ou moins se traduit, au bout d'un an, par un accroissement de 43% du taux de mortalité par infarctus.Cette fois, les chercheurs ont comparé la proportion d'infarctus susceptibles d'être provoqués par les principaux responsables d'infarctus, en analysant la littérature scientifique. En ce qui concerne la pollution, le risque était alors calculé pour une augmentation de 30 µg/m3 de particules de 10 microns ou moins de diamètre. En tenant compte uniquement de la force de l'association, ils considèrent que la consommation de cocaïne arrive en tête, suivie des repas copieux, du fait de fumer du chanvre, des émotions négatives, d'un effort physique, de la consommation d'alcool, de l'activité sexuelle, de l'exposition à la circulation routière, des infections respiratoires et de la consommation de café. Dans ce cas, la pollution atmosphérique arrive en dernier. Mais en tenant compte de la fréquence réelle des risques dans la vie quotidienne, le classement est bien différent : l'exposition à la circulation routière prend la première place, elle serait responsable de 7,4% des infarctus. Viennent ensuite l'effort physique (6,2%), l'alcool (5%), le café (5%) la pollution atmosphérique (4,8 %), les émotions négatives (3,9%) et la colère (3,1%). «Notre travail montre que de faibles risques présents tout le temps peuvent avoir une importance considérable en termes de santé publique», notent les auteurs, en ajoutant que «l'amélioration de la qualité de l'air est un objectif très pertinent pour réduire l'incidence de cette maladie dans la population générale». L'an dernier, à la même époque, une équipe CNRS/Inserm de Montpellier, dirigée par Sylvain Richard et travaillant en collaboration avec des chercheurs d'Avignon, avait publié dans la revue American Journal of Respiratory and Critical Care Medicine, les preuves d'un effet direct de la pollution urbaine sur la fonction cardiaque, mais chez le rat en bonne santé. Leurs travaux portaient sur une exposition prolongée au monoxyde de carbone (CO), dans des conditions mimant la pollution citadine.Ils montraient qu'il provoquait une augmentation de la taille du ventricule gauche, source potentielle d'insuffisance cardiaque, ainsi qu'une altération de la contraction des cardiomyocytes pouvant entraîner des troubles du rythme cardiaque. «Très récemment, nous avons montré, toujours chez le rat et dans les mêmes conditions expérimentales, que le monoxyde de carbone avait un effet aggravant sur les infarctus artificiellement créés», explique Sylvain Richard. «Et, bonne nouvelle, ces effets néfastes de la pollution peuvent être en partie prévenus par un exercice physique modéré.» Les habitants des villes savent donc ce qu'il leur reste à faire pour protéger leur cœur de l'air ambiant... A. L. In lepoint.fr