Photo : S. Zoheir Par Amar Rafa Le FFS a plaidé pour un changement pacifique en Algérie, lors d'un meeting qui se voulait d'envergure maghrébine, auquel ont participé des partis de Tunisie et du Maroc, tenue à la salle Atlas (Alger). Devant une salle archicomble et dans une ambiance festive, le secrétaire national du parti, Karim Tabbou, a, lors d'un discours qui a succédé à des interventions de plusieurs catégories de citoyens, dont des étudiants, enseignants et anciens ou membres fondateurs du parti ainsi que les familles des disparus, a appelé à reconstruire les liens entre les Algériens. A ceux qui disaient que le FFS avait disparu et que c'était l'inertie, Karim Tabbou a répondu : «Nous sommes là.» «Assa, azzeka, le FFS yella, yella», criait l'assistance. Il n'a pas été de main morte pour fustiger le pouvoir, mettant en garde contre la tentation de la violence. Il lancera, ce faisant, un message à la salle surchauffée : «Comme en Egypte, où la jeunesse utilise Facebook et le pouvoir des chameaux et des bêtes de somme, dans la salle Atlas, il y a des hommes et des femmes de conviction», a-t-il affirmé. Il rappellera que le FFS avait bien émis des signaux pour prévenir le fossé entre les gouvernants et le peuple, mais, dit-il, «on n'a pas écouté le bon sens». «Aujourd'hui, le FFS aura la responsabilité de mener un combat difficile». Cependant, a-t-il prévenu, «il faut le mener avec de l'éthique et de la responsabilité», alors que «certains préfèrent le faire dans l'agitation». «Le FFS préfère expliquer sa démarche aux différentes catégories de la société afin de les rallier à la cause du changement», a-t-il dit. En dressant un parallèle avec l'exemple tunisien où un millier d'avocats se sont solidarisés avec la révolte, il a déploré l'absence d'engagement des avocats algériens pour le changement. «Ils ignorent même comment vivent les gens.» «Certains pays veulent changer leur mode de vie. Les événements de Tunisie, d'Egypte et du Bahreïn montrent qu'ils peuvent lutter et vaincre», a ajouté M. Tabbou. Il a estimé que l'Algérie n'est pas à part : «Nous devons peser de toute notre force pour que le processus de renouveau ne se fasse pas sans nous.» «La construction des liens entre les Algériens est essentielle. Nous refusons d'aller sur le terrain de la violence. Nous sommes comme des gouttes d'eau qui, petit à petit, finiront par traverser le béton.»«Le pouvoir a peur de la lutte pacifique. Néanmoins, le changement ne se capte pas sur Al Jajzeera, il se construit. Il faudrait donc se mettre au travail. Pour cela, il faudrait aussi que les forces du changement s'unissent indépendamment de leur langue et origines», a affirmé le secrétaire national du FFS. Il a estimé qu'«il y a ceux qui veulent changer le système, ceux qui veulent changer la société et ceux qui veulent changer des hommes à l'intérieur du système». «Les Algériens ont besoin de se parler, de s'organiser pour opérer le changement». Ce changement doit se faire d'abord par «la sortie de l'exclusion et de la violence» et par «la levée de tous les obstacles à l'organisation et à la libre expression des Algériens». Aussi, selon lui, «les Algériens ont besoin d'un signal politique fort du pouvoir». Il exhortera ce dernier d'être à l'écoute du peuple : «Ouvrez les oreilles, le peuple n'écoute que celui qui l'écoute.» Et d'adresser un message aux décideurs : «N'ayez pas peur des changements, il faut combattre la peur du changement, car il est nécessaire et inéluctable.» Il enchaînera en affirmant que le FFS ne veut rien pour lui. Aux militants, il dira : «L'insurrection que nous voulons est celle de l'intelligence.» A la fin de son discours, Karim Tabbou invitera les militants du parti à ne pas répondre à la provocation à la sortie de la salle. Auparavant, le président de la Ligue algérienne des droits de l'homme (LADDH) a indiqué que si «les peuples tunisien et marocain méritent bien la liberté et la démocratie, il n'y a pas un peuple en ce 20e siècle qui a dépensé autant pour la liberté et l'indépendance que l'Algérie, qui a perdu 1,5 million de martyrs pour recouvrer son indépendance et 200 000 autres et des disparus pour la liberté et la dignité». «Mais, a-t-il affirmé, à notre grand dam, nous avons libéré la terre mais pas les hommes.» «A partir de demain, il faudra qu'on explique que tout ce que entreprend le régime en faveur des jeunes est destiné uniquement à faire perdurer la vie du régime. Donc, il faudrait que l'on s'entende tous pour propager la conscience pour le changement du système.» Mustapha Bouchachi a indiqué que «pour la LADDH, au-delà du pain et de l'eau, la dignité et la liberté sont notre but. Nous nous rangeons du côté de ceux qui les veulent». Il a succédé ainsi à des étudiants et enseignants, qui ont souligné le devoir de changement à commencer par le système d'enseignement. La présence de représentants des partis marocains et tunisiens a été l'occasion de mettre en exergue les démarches de changement dans ces pays, en émettant l'espoir de pouvoir construire un Maghreb uni sur le socle de la démocratie et de la liberté.