Plusieurs centaines de médecins résidents ont tenu un sit-in hier, face au siège de l'administration de l'hôpital Mustapha- Pacha à Alger. «Salaires minables pour métier noble», «La médecine m'a fatigué et l'administration m'a achevé», les banderoles déployées en silence renvoyaient à des revendications purement socioprofessionnelles. «Nous sommes apolitiques. Notre objectif est de porter haut la voix des médecins résidents algériens», atteste le Dr Mohamed Sahnoun, porte-parole d'un jour du mouvement et délégué auprès du Collectif autonome des médecins résidents algériens (Camra) né ily a près de trois semaines. «Ce collectif représente près de 2 500 résidents. Une plate-forme de revendications a été déposée et sera affinée au fur et à mesure des réunions», explique-t-il. Ce dernier insiste sur le caractère collégial du collectif où chaque service au niveau des CHU d'Algérie a délégué un représentant, soit près de 200, et chaque hôpital a désigné un représentant (une trentaine au total, dont une vingtaine à Alger). Pour cette première manifestation, l'objectif du collectif est de se faire connaître. «Plusieurs autres CHU répartis à travers le territoire national font partie du collectif comme à Tlemcen, Oran, Sétif, Sidi Bel Abbès, Blida et Tizi Ouzou», s'en félicite le Dr Amine Benhabib, autre délégué du Camra. Dénonçant le statut du médecin résident et le manque de considération et de moyens, les porte-parole du collectif exposent une série de revendications socioprofessionnelles inhérentes à son rang de médecin/étudiant. Par ordre d'importance, il est demandé en premier l'abrogation des lois et décrets relatifs au service civil des médecins spécialistes. «Cette formule a prouvé son inefficacité. A cause d'elle, il y a une véritable hémorragie des médecins spécialistes. Sur 1 000 étudiants de ma promotion, 200 sont partis à l'étranger. Près de 10% des médecins spécialistes quittent ainsi le pays par an. Plus de 2 000 cardiologues ont émigré. On est conscients qu'on a été formés gratuitement, et on renforce les services des autres pays, c'est désolant. Cette fuite est aussi un geste de désespoir, comme l'immolation», se désole le Dr Benhabib. Sur une liste de revendications distribuée par le collectif, il est mentionné que «seuls les médecins spécialistes sont assujettis à un service civil obligatoire d'un durée variable d'une année à quatre ans selon les zones». «Les médecins spécialistes ainsi mobilisés prennent leur travail pour une corvée. Et l'instabilité des rapports défavorisent les populations des régions concernées», constate le Dr Sahnoun. Toutefois, le collectif propose des alternatives comme l'ouverture de «véritables» postes budgétaires dans toutes les wilayas du pays accompagnés de mesures incitatives. Celles-ci sont énumérées comme suit : la mise à la disposition de médecins spécialistes (MS) postulants d'un plateau technique en adéquation avec leurs qualifications, de logements de fonction à proximité de leur lieu de travail, la gratuité des transports entre la résidence d'origine et le lieu de travail, la majoration des salaires en fonction des zones de travail ainsi que d'accorder la faculté aux MS le droit de pouvoir démissionner de leur poste sans aucune restriction. Le second point nodal des revendications a trait au service militaire. «Nous voulons bénéficier des même droits que les autres citoyens. Qu'on applique aux médecins les mêmes lois et décrets dans ce domaine», insiste le Dr Sahnoun. Le troisième concerne le statut du résident. Dans ce volet, il est demandé la révision du statut actuel «flou et ambigu», selon le Dr Benhabib et qui date de 1996, en incluant le droit syndical. En matière de rémunération, il est également demandé la réévaluation des mensualités ainsi que le droit d'accès aux indemnités en relation avec son statut de praticien en formation spécialisée. «On touche 670 DA la garde. Les 8h de travail sont rémunérées à 1 100 DA. C'est une insulte. J'ai presque honte de parler de ça», s'offusque le Dr Benhabib. Sur une banderole soulevée par les manifestants, il est noté que le salaire ou plutôt les indemnités du médecin résident sont de 31 920 DA. Sur la liste des revendications, il est mentionné la révision de l'allocation d'études à hauteur de 12 750 à 15 000 DA selon l'année d'étude. Le droit à l'indemnité d'encadrement des étudiants internes et externes calculée par référence sur celle du praticien spécialiste de santé publique. Le droit à la prime de contagion, de risque, de documentation et d'intéressement ainsi qu'à un hébergement décent pour les résidents qui habitent à plus de 50 km du lieu de travail. Pour la suite du mouvement de protestation, les porte-parole informent que la liste des revendications a été transmise aux ministères de tutelle (enseignement supérieur et santé) en plus du premier ministère. «Si, dans 48 à 72 heures, nous n'avons pas de réponse, on enclenchera en concertation avec tout le collectif d'autres mouvements de protestation», avertit leDr Benhabib. S. A.