La femme est la moitié de l'homme. Elle est même son avenir, chantait le poète. Mère, le paradis est alors sous ses pieds, comme l'atteste notre Prophète (QSSsL). Quitte à ce que la première des mères dans l'histoire de l'humanité, Eve de son prénom, en chasse Adam comme un vulgaire croqueur de pomme. Est-ce pour lui avoir fait quitter les radieuses contrées de l'Eden que l'homme le lui fait payer cher en la reléguant au statut de moins que la moitié ? Même pas la moitié de la moitié. Il est même probable que, pour se donner bonne conscience à moindres frais, l'homme fête les femmes chaque 8 mars en souvenir lointain des luttes des ouvrières et des suffragettes américaines et européennes. Magnanime, il leur accorde même une demi-journée de récréation pour leur faire oublier sans doute des millénaires de patriarcat. Sous toutes les latitudes, les femmes ont un statut d'infériorité, même dans les sociétés les plus évoluées où l'égalité et la parité demeurent un combat des femmes au quotidien. Comme en France, où, à compétences égales et même supérieures, les femmes sont moins bien payées, y compris dans le privé. Dieu merci, ce n'est pas le cas dans notre féconde Algérie, terre d'Islam, où l'égalité salariale est inscrite dans le marbre du droit positif. Encore une fois, Dieu soit loué, notre vaillante ANP compte une femme général(e), médecin de son état, en attendant le jour où une future général(e) serait affectée à l'emploi et la préparation à l'état-major. L'espoir est permis avec une armée qui a compté ses pilotes féminins de chasse bien avant que l'aviation française disposât de ses premiers équipages féminins à bord de Transall de transport. C'était en 1978 et l'Algérie était à l'époque socialiste et révolutionnaire. Il est rassurant de savoir que la magistrature et l'éducation sont largement féminisées dans l'Algérie de 2011. Réjouissant de savoir aussi que notre républicaine police comptera 30% de policières à l'horizon 2014, même si les statistiques ne nous disent pas s'il y aura une forte proportion de commissaires parmi les plus méritantes. En Algérie, les temps changent sous la casquette, sous la robe des magistrats et des avocats, sur les estrades des écoles, dans les amphis universitaires et dans les rédactions des journaux. Il en est de même dans le monde machiste des entreprises où des femmes entreprenantes, inventives, innovantes et audacieuses créent des emplois et de la valeur ajoutée. Dans une société conservatrice et phallocratique, des filles d'Eve ont décidé de savoir et de vouloir entreprendre. En somme, créer leur propre paradis, avec ou sans Adam. Donc, chapeau bas à ces patronnes qui ont créé un jour la «Sève», acronyme de leur association où l'on retrouve aussi Eve, comme un clin d'œil à l'immémorial procès fait à Eve, la première femme à avoir licencié un homme en le chassant du paradis. Mais n'y voyons aucune malice au moment où le code de la famille algérien, amendé en 2005, maintient toujours la femme algérienne sous le tutorat de l'homme. Qui serait son mari, son père, son frère ou même son oncle, habilité par la loi à décider de son bonheur à sa place. Ce statut d'Eve, qui l'aurait finalement sommée de rejoindre la «maison de l'obéissance», demeure assez contraignant pour les Algériennes, en dépit des avancées enregistrées par rapport au code très restrictif de 2004. Même amendé, le code de la famille algérien apparaît très en retrait en regard de la Moudawana marocaine et du code de statut personnel tunisien. Alors Messieurs les hommes, surtout vous qui avez le pouvoir de légiférer, un peu plus d'effort pour que nos femmes deviennent nos moitiés. A parts égales. Et pas des trois quarts d'hommes. N. K.