Après le tremblement de terre qui avait dévasté Haïti, en janvier 2010, Slate.com s'était posé la question : où frappera le prochain séisme de grande ampleur ? Il existe d'autres endroits qui présentent une activité sismique non négligeable et dont on parle peu. Etats-Unis Ligne de faille Delta du Mississippi inférieur, Nouvelle Madrid. Dernier séisme de grande ampleur : 1812. Les raisons d'être vigilants Une série de tremblements de terre survenus au début du XIXe siècle le long de la faille de la Nouvelle Madrid - qui s'étend sur certaines parties de l'Illinois, du Missouri, de l'Arkansas, du Kentucky, du Tennessee et du Mississippi - a inversé le sens du débit du Mississippi. Les secousses ont aussi fait tinter des cloches d'église à Boston et touché une zone trois fois plus grande que celle affectée par le séisme de San Francisco de 1906. Aujourd'hui, les principales villes de Saint Louis et de Memphis se situent dans la zone à risque, sans doute la ligne de faille la plus menaçante des Etats-Unis. L'agence américaine des situations d'urgence, la FEMA, a lancé une mise en garde en 2008 : un tremblement de terre majeur au niveau de la faille de la Nouvelle Madrid pourrait provoquer les «plus graves dégâts économiques dus à une catastrophe naturelle qui frapperait les Etats-Unis», dans une large mesure à cause d'un manque relatif de préparation aux séismes, comparé à la Californie et au Nord-Ouest Pacifique. Turquie Ligne de faille : Anatolie du Nord. Dernier séisme de grande ampleur : Duzce, 1999. Les raisons d'être vigilants Le séisme d'Izmit (1999), ville située non loin de la côte de la mer Noire, au sud-est d'Istanbul, a tué près de 18 000 personnes. Les secousses d'Izmit étaient les dernières d'une série de tremblements survenus ces 70 dernières années en direction de l'Ouest dans toute la Turquie. A peine trois mois plus tard, une réplique a fait presque 900 morts. Ces quarante dernières années, la Turquie a connu plus de six séismes faisant plus de 1 000 victimes mortelles. Plus inquiétant, les scientifiques pensent que le prochain séisme pourrait se produire légèrement à l'ouest d'Izmit et directement au sud d'Istanbul, qui ne compte pas moins de 12 millions d'habitants. Le cumul de l'activité sismique pourrait en fait engendrer quelques événements de moindre importance plutôt qu'un unique méga-séisme. Ce qui n'est tout de même pas pour rassurer la population de cette ville au patrimoine historique d'une richesse unique. Australie Ligne de faille entre les plaques pacifique, philippine et eurasienne. Dernier séisme de grande ampleur : Newcastle, 1989. Les raisons d'être vigilant Contrairement aux autres pays de cette liste, l'Australie ne se trouve pas sur une ligne de faille comprise entre deux plaques tectoniques. En fait, le pays occupe une zone intraplaque, ce qui constitue un motif de vigilance. L'activité sismique de l'Australie est le résultat de mouvements tectoniques qui s'opèrent loin du continent. Cela revient à dire qu'aucune région d'Australie n'est à l'abri de secousses telluriques et que celles-ci sont extrêmement difficiles à anticiper. Heureusement, la plupart des séismes australiens, y compris dix d'une magnitude supérieure à 4 qui se sont produits en 2008, ont touché une région aride du centre du pays. Les dégâts ont donc été très limités. Mais le caractère imprévisible des secousses a engendré un sentiment de sécurité qui ne correspond pas à la réalité des menaces. Les matériaux de construction utilisés dans des grandes villes comme Sydney sont vieux, usés et, d'une manière générale, fragiles, comme l'a montré un séisme relativement mineur (de magnitude de 5,5) qui a eu lieu en 1989 à Newcastle et a provoqué des dégâts d'un montant dépassant le milliard d'euros. Un tremblement de terre à Sydney - dont la population est quinze fois supérieure à celle de Newcastle - serait beaucoup plus meurtrier. Népal Ligne de faille Chevauchement frontal (HFT), chevauchement principal bordier (MBT), chevauchement principal central (MCT) himalayens. Dernier séisme de grande ampleur : région frontalière entre le Népal et l'Inde, 1988. Les raisons d'être vigilants Tout à fait au sud de la chaîne himalayenne, à seulement 240 km au sud-ouest du mont Everest, la capitale du Népal, Katmandou, se situe à la jonction entre les plaques indienne et eurasienne. Bien qu'on n'ait enregistré aucun séisme majeur dans cette région ces dernières années, les géologues avertissent que la présence de nombreuses failles le long des montagnes himalayennes comporte le risque d'un événement sismique de très grande ampleur dans la capitale népalaise. Le plus grave, c'est que le pays est très mal préparé contre les tremblements de terre : les techniques de construction népalaises sont inadaptées et la population urbaine ce cesse de croître. L'absence d'activité sismique récente est d'autant plus inquiétante que, généralement, plus l'intervalle entre les séismes est long, plus le prochain tremblement risque d'être particulièrement puissant. Japon Ligne de faille ligne tectonique médiane, ligne tectonique d'Itoigawa-Shizuoka, ligne tectonique de Tanakura. Dernier séisme de grande ampleur : grand séisme de Hanshin-Awaji, 1995. Les raisons d'être vigilants Le Japon, c'est connu, est un pays à risque sismique. On se rappelle, par exemple, les secousses qui ont fait trembler Kobé en 1995, tuant 6 400 personnes. Grâce à leur expérience des tremblements de terre, les Japonais ont investi de façon considérable dans la préparation aux séismes et dans des infrastructures sismo-résistantes. Pour autant, ils ne doivent pas sous-estimer les menaces. Le danger est d'autant plus important que la densité démographique des villes japonaises est énorme. Si un puissant séisme frappe des mégapoles comme Tokyo ou Kyoto, le nombre de tués pourrait atteindre 60 000, voire plus. Le bilan du grand séisme de Kanto (1923) dépasse largement les 100 000 morts. En outre, l'activité sismique au large des côtes japonaises rend le pays vulnérable aux tsunamis. Autre risque à ne pas négliger : le Japon repose dans une large mesure sur l'énergie nucléaire. Or, un tremblement de terre survenu en 2007 avait provoqué une dangereuse fuite dans la centrale nucléaire de Kashiwazaki. A. S. *Andrew Swift est chercheur et éditorialiste à Foreign PolicyIn slate.fr