La mise en circulation, pourtant annoncée en grande pompe, du tramway sur le premier tronçon d'Alger de la ligne reliant Bordj El Kiffan au quartier des Bananiers à Mohammedia (7,3 km) a tourné au vinaigre. Signes avant-coureurs ? Et, fait inhabituel, Amar Tou, ministre des Transports, accompagné à l'occasion d'un panel de personnalités à l'instar de Mustapha Benbada, son collègue du Commerce, et d'un certain nombre de hauts responsable tels Mustapha Lahbiri (DG de la Protection civile), Abdelwahid Bouabdellah (P-DG d'Air Algérie) et M'hamed Dabouz (DG d'Algérie Télécom), était arrivé plus tôt que prévu (les «festivités» devaient commencer à 10h30). Mais la «fête» a fini par tourner court lorsque après s'être engouffrés dans une rame, M. Tou et ses «invités» ont été surpris d'apprendre que le tram n'allait pas s'ébranler faute… d'énergie électrique. Une subite panne technique (coupure d'électricité) venait, en effet, de survenir à un moment où l'on s'y attendait le moins. Rien ne justifiait une telle panne pourtant, dès lors que les essais techniques se faisaient tôt le matin sans qu'un problème technique n'ait été signalé. Fait anecdotique : certaines langues se sont vite déliées pour dire que la panne en question n'était pas innocente puisque l'inauguration intervient 66 ans après les horribles massacres du 8 Mai 1945. Le raccourci est vite fait pour désigner (implicitement) le français Alstrom comme «instigateur».Pendant ce temps, c'est la gabegie. La station attenante à la cité Mokhtar-Zerhouni (ex-Bananiers) s'est transformée en une pathétique scène où le ridicule se le disputait à la désorganisation. C'était carrément la débandade. Des élèves ayant séché leurs cours l'espace d'une journée «mémorielle» ont créé un véritable chahut, allant même jusqu'à rendre la tâche davantage plus délicate aux «organisateurs». Entre-temps, réfugié sous un semblant de tente, le ministre «vedette» Amar Tou ne semblait point s'incommoder de la foule bigarrée qui l'entourait, à tel point que des journalistes présents se sont offusqués du fait qu'ils ne pouvaient l'approcher en raison de la présence démesurée des curieux et autres «invités». «Il y a plus de curieux autour du ministre que de journalistes !» lâche sarcastique un confrère. Un avis qui a fait l'unanimité auprès de bon nombre de confrères et consœurs. Sur un ton désintéressé, le ministre donnait plus l'impression d'être le maître d'une cérémonie folklorique que d'un haut responsable venu inaugurer un projet d'une telle ampleur. Après avoir fait languir d'impatience les présents, les premières rames se sont (enfin) résignées à s'ébranler. Priorité au ministre et à ses hôtes. Les autres, notamment les journalistes, n'avaient qu'à se débrouiller. Ceci côté cour. Côté jardin, les choses étaient moins désastreuses. Une fois à l'intérieur du tram, l'usager est surpris : ses nerfs se relaxent et se laissent aller au rythme lent (uniquement pour la circonstance) de la voiture. Le tram a parcouru les treize stations séparant le point de départ (les Bananiers-Mohammadia) du point d'arrivée (Bordj El Kiffan), sous le regard médusé des riverains qui n'en revenaient pas. Le retour, en revanche, s'est passé dans un désintéressement total des riverains. C'est à croire qu'ils se sont d'ores et déjà familiarisés avec le tram. Réflexe ancré dans le subconscient de nos concitoyens, les bousculades aux portes du tramway (les dessertes étaient exclusivement gratuites pour la journée d'hier) étaient au rendez-vous.