Photo : La tribune Par Badiaa Amarni De simples habits usagés vendus, auparavant, au détail dans les nombreux marchés de la capitale et dans les quatre coins du pays, la friperie ou ce qu'on appelle communément «El Pala», est devenue aujourd'hui un commerce à part entière et même légalisé. En effet, des boutiques ouvrent ici et là et on en trouve dans tous les quartiers. Il existe même des commerces de gros qui revendent aux détaillants. La friperie s'impose davantage sur le marché algérien aux côtés d'autres articles vestimentaires qui font l'objet d'importation. Elle arrive même, parfois, à ravir la vedette aux vêtements importés. Car, les citoyens sont de plus en plus nombreux à se rabattre sur ces habits usagés pour se vêtir, surtout en cette période de rentrée scolaire où les dépenses sont multiples, en plus de celles déjà engagées pour le Ramadhan. Ce n'est pas seulement à cause des dépenses supplémentaires de la rentrée ou encore du mois de jeûne, qui grèvent le budget des familles, que ces dernières font leurs achats dans les magasins de friperie. Le manque de moyens mais aussi la recherche de vêtements de qualité qui ne sont pas portés par tout le monde sont les raisons qui poussent les consommateurs à se rendre dans ces boutiques. mestre de l'année en cours, pas moins de 13 804 957 kilogrammes d'articles de friperie ont été importés pour une valeur de l'ordre de 6 429 092 de dollars. Ces statistiques, qui nous ont été fournies par le Centre national de l'informatique et des statistiques (CNIS) des Douanes, sont en légère hausse par rapport à la même période de l'année dernière où il a été importé 12 513 618 kilogrammes de vêtements d'occasion pour une valeur de 5 049 097 dollars. Les pays d'où provient la friperie sont la Tunisie, le Canada, les Etats-Unis, la Chine, les Emirats arabes unis, la Belgique, la Bulgarie, l'Espagne, la France et l'Italie, en plus des Pays-Bas, du Portugal, de l'Allemagne, de la Grande-Bretagne, de la Suède et de la Suisse. Ces informations recueillies auprès du CNIS montrent que l'Italie vient en tête des pays d'importation puisqu'au premier semestre 2007 pas moins de 7 899 461 kilos de fripes ont été écoulés sur le marché national, contre 7 976 334 kilos au premier semestre 2008, soit une légère augmentation pour cette dernière période. La valeur était respectivement de 2 902 942 et de 3 503 072 dollars. Le deuxième pays fournisseur de cette marchandise pour l'Algérie est la Suisse. Les quantités importées en 2008, en provenance de cette région sont de l'ordre de 1 749 935 kg pour une valeur estimée à 913 274 dollars. Des chiffres inférieurs au premier semestre 2007 où il a été enregistré 1 432 285 kg pour une valeur de 707 963 dollars. La France est le troisième pays d'où provient la friperie avec des quantités évaluées à 1 198 954 kilos au premier semestre 2008 pour la somme de 439 304 dollars. Une légère baisse est enregistrée puisque, pour la même période de l'année dernière, il a été importé un volume de 1 234 745 kg pour 489 263 dollars. L'Allemagne qui n'a exporté vers l'Algérie qu'une faible quantité estimée à 557 278 kg, en 2007, a augmenté ce volume pour atteindre 1 029 260 kg au premier semestre 2008. Les estimations sont respectivement de 303 170 et de 634 170 dollars. Les Pays-Bas, les Etats-Unis, la Belgique et le Canada se classent derrière les autres pays susmentionnés. Ils sont suivis de la Grande-Bretagne, de la Suède, de l'Espagne et de la Tunisie. Après l'Italie et la Suisse, la Chine et les Emirats arabes Ce qu'il y a lieu de relever est le fait que plusieurs pays qui ne figuraient pas sur la liste des pays d'importation, en 2007, sont entrés en lice au premier semestre de l'année en cours. C'est le cas de la Chine, des Emirats arabes unis, de la Bulgarie et du Portugal avec des quantités respectives de 22 174, 33 520, 32 660 et 31 880 kg. Visiblement, les importateurs de friperie se sont orientés vers ces pays attirés par les prix compétitifs de cette marchandise, surtout la Chine dont beaucoup de produits inondent déjà le marché national. Une virée au niveau de la capitale nous a permis de constater un grand nombre de boutiques spécialisées dans le commerce de la friperie. On les trouve même alignées les unes à côté des autres. Au niveau de la rue Hassiba Ben Bouali, beaucoup de citoyens se ruent vers ces commerces, attirés pour certains par des affichages annonçant des prix très compétitifs, atteignant parfois 100 DA la pièce. L'intérieur de ces boutiques grouille de monde parfois déçu de la qualité des articles vendus. «Il est vrai qu'on peut tomber sur un vêtement flambant neuf mais ce n'est pas toujours le cas malheureusement», nous confie Amina, mère de famille rencontrée dans l'un des magasins de la rue Hassiba. Et d'ajouter que «maintenant ces habits usagés commencent à faire partie du domaine de luxe puisque leurs prix sont parfois inaccessibles» non sans avouer que de temps à autre elle se permet quand même «des petites folies vu la qualité qui est meilleure que celle des articles importés de Chine». Des clients de toutes les catégories sociales et des chiffres d'affaires intéressants A côté d'elle, une autre cliente nous dit que «les habits et les chaussures chinois même si leurs prix sont bas, ils s'usent vite car leur matière de fabrication n'est pas vraiment de qualité». «C'est pourquoi je préfère me rendre dans ces commerces pour faire mes achats», ajoute notre interlocutrice qui occupe un poste professionnel important mais qui a préféré garder l'anonymat. Elle affirme : «Je débourse beaucoup d'argent dans l'achat de vêtements usagés mais qui sont bien préservés. On a l'impression qu'ils sont neufs, et parfois ils le sont vraiment. Il n'y a qu'à voir leurs étiquettes pour s'en rendre compte». Kamel, étudiant, s'apprêtait à ressortir du magasin lorsque nous l'avons sollicité. Les mains vides, il semblait ne pas trouver ce qu'il cherchait. Mais ce n'était pas le cas finalement puisque notre étudiant trouve excessifs les prix affichés. «Je préfère aller dans les autres commerces à l'exemple de ceux de Boumati pour faire mes achats. J'ai une petite bourse et je ne peux me permettre de tout acheter : livres, chaussures et vêtements… Alors, pour diminuer mes frais, j'achète des vêtements usés.» Selon lui, le commerçant lui avait suggéré de revenir mardi pour trouver des articles moins chers. C'est là, justement, l'une des astuces que seuls les habitués peuvent connaître. Un des vendeurs à qui nous avons parlé nous a déclaré que l'arrivage, chez lui, «se fait samedi et les prix suivent la qualité des articles. A partir de mardi, nous diminuons les prix pour permettre aux clients les moins nantis de s'offrir des fringues à des prix acceptables». Sur la clientèle, notre interlocuteur dira qu'«elle est diversifiée et qu'il n'y a pas seulement les bourses moyennes qui achètent mais aussi les personnes aisées à la recherche de pièces introuvables sur le marché». Selon lui, «il y a même des émigrés qui viennent nous acheter ou même nous vendre des vêtements usagés». Le commerce de la friperie s'étend et les chiffres d'affaires réalisés sont intéressants, consent à nous confier un autre vendeur à El Biar. C'est ce qui explique peut-être la multiplication du nombre de boutiques spécialisées dans ce commerce, et qui se livrent à une concurrence ardue pour se maintenir. A chacun sa façon de faire de la publicité pour attirer la clientèle, mais la plupart excellent dans les affichages des prix ou les annonces quand il s'agit de friperie de choix. Parfois même, des annonces sont passées à travers la presse.